VIFF: Du sang dans les téléphones portables

République Démocratique du Congo, territoire du Walikale dans la province du Nord-Kivu. En pleine jungle, dans la ville de Bisie, des groupes armés : les Simba, les Interahamwes, les Mai-Mai, ou les forces armées de la République Démocratique du Congo (FARDC), se disputent l’exploitation illégale de mines dont sont extraits différents minerais comme le coltan, la cassitérite, le tungstène ou l’étain, dans ce pays rongé par la guerre civile depuis plus de 15 ans.

C’est dans cette région de non-droit, où l’on s’estime chanceux quand on en revient vivant, que le cinéaste danois Frank Piasecki Poulsen s’est rendu, à la recherche de la vérité. Certes, il aurait largement préféré réaliser son enquête et ses interviews confortablement installé à son bureau au Danemark, mais il ne s’est trouvé personne pour bien vouloir répondre à ses questions pour le moins dérangeantes sur l’utilisation de ces minerais dans la fabrication de nos téléphones portables.

Bien que les Nations-Unies aient rendu deux rapports qui ne laissent aucune place au doute sur la situation dont ils sont les témoins au quotidien, le sujet du lien entre ce commerce de minerais et le financement de la guerre est impossible à aborder avec leurs représentants sur place, en proie à la peur. Le défi, dans ce cas, est de trouver des personnes suffisamment désespérées pour ne plus avoir rien à perdre à témoigner et qui donnent même l’impression d’être soulagées d’un poids…

Blood in the Mobile

Scène du documentaire Blood in the Mobile - Photo par VIFF

Blood in the Mobile est un de ces documentaires réalisés par des hommes et femmes courageux qui n’hésitent pas à mettre leur vie en danger pour nous rapporter la preuve des exactions dont ils soupçonnent l’existence. Produit par Koncern TV-og Filmproduktion au Danemark, en coproduction avec Chili film et Gebrueder Beetz en Allemagne, et avec le soutien de DANIDA, MEDIA et l’Institut du Film Danois, le film a été présenté au Danemark le 1er septembre 2010. A présent, sa sortie est programmée dans au moins 15 autres pays dont l’Allemagne, la France, l’Angleterre, les Etats-Unis et le Canada. Après Halifax, Nouvelle Ecosse, et Toronto, c’est dans le cadre du Festival International du Film de Vancouver que vous pourrez découvrir ce documentaire, samedi 8 octobre à 21h et jeudi 13 octobre à 11h00 à l’Empire Granville 7.

Mais ce documentaire suscite un certain nombre de questions : qu’en est-il de nos propres responsabilités dans l’histoire ? Que faisons-nous de notre rôle de consommateur du produit fini en bout de chaîne et du pouvoir économique qu’il nous confère sur les acteurs de ce drame humain ? Car de cette chaîne de terreur, de meurtres, d’exactions, d’enrichissement indécent au profit de ceux qui travaillent comme esclaves dans ces mines, nous pouvons y opposer notre volonté de consommer de façon éthique, conscients que notre rôle, loin d’être secondaire, est en réalité déterminant pour le futur de ces populations, dans la mesure où si nous boycottons les produits issus de ce genre de pratiques, nous réduisons le pouvoir de ceux qu’y s’en nourrissent au mépris du respect le plus élémentaire de la dignité humaine.

Notre implication va même bien au-delà. La vraie question, en ce qui nous concerne, est de savoir dans quelle mesure nous avons la capacité de vivre une vie réellement riche et épanouissante quand on connait les conséquences dramatiques que peuvent engendrer notre inaction dans des domaines où le poids de nos choix se mesure en nombre de victimes, pas toujours si loin que ça de chez nous d’ailleurs…

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