Moussa Magassa, un homme de paix

Moussa Magassa

Moussa Magassa - Photo par Moussa Magassa

Chaque année, en février, les Canadiens sont invités à célébrer le mois de l’Histoire des Noirs. L’occasion de souligner l’héritage des concitoyens de descendance africaine et de promouvoir leurs réalisations d’hier et d’aujourd’hui. En 2012, le Canada met en avant le Bicentenaire de la guerre de 1812, ainsi que les contributions des soldats noirs dans la lutte pour le pays. De son côté, La Source a rencontré Moussa Magassa, un homme de paix, dont les combats ne passent pas inaperçus.

Enseignant à l’Université de Victoria, il est également Président de la Société francophone de Victoria. Passionné par les problématiques de résolution des conflits et de consolidation de la paix, il en a fait sa spécialité. Moussa Magassa est un homme de conviction, qui croit d’abord en l’humain. Il se définit lui-même comme : « ce genre de personne qui croit en l’importance déterminante des relations, des interactions humaines”. La paix étant selon lui “la seule alternative et solution durable pour nous tous” .

Enfants soldats

Les enfants soldats: une question chère à Moussa Magassa

Les enfants soldats: une question chère à Moussa Magassa - Photo par hdptcar, Flickr

La question de la place des enfants soldats, enrôlés lors des conflits de guerre notamment en Afrique, est chère à cet homme. Un sujet qu’il connaît bien sur le terrain et qu’il s’attache à rendre plus visible en organisant notamment des rencontres pluridisciplinaires. Le 28 janvier 2012, il animait l’atelier : « Comment retrouver l’enfant derrière le soldat intransigeant ? ».

Car si leur nombre a sensiblement diminué ces dernières années en raison du règlement d’un certain nombre de conflits et grâce à un cadre normatif plus
étoffé, le phénomène reste préoccupant. L’organisation internationale Human Rights Watch estime le nombre d’enfants enrégimentés dans le monde à 300 000.

De l’Afrique au Canada

Né au Sénégal, Moussa Magassa a grandi dans le petit village de Soringo. Il est l’aîné d’une vingtaine de frères et sœurs, et a été élevé par ses belles-mères. Puis, à l’adolescence, il quitte le village pour Dakar. « Si c’était à refaire, je le referai » dit-il sans hésiter. La curiosité intellectuelle le porte jusqu’en Afrique du Sud. A cette époque, l’apartheid prend tout juste fin, Mandela sort de prison. Très investi dans le mouvement pour la paix, Moussa Magassa obtient sa maîtrise en résolution des conflits.

Entre 1996 et 2001, il est sur le terrain et travaille notamment avec des jeunes des townships, enlisés dans la violence post-apartheid. Il tente de leur apprendre « qu’autre chose est possible ». Si l’Afrique du Sud est pour lui une période de construction professionnelle, elle intervient dans une société déchirée et chaotique, où « le désespoir de ces jeunes », audible dans leur voix, restera longtemps gravé dans sa mémoire.

Arrivé au Canada en 2001, Moussa Magassa rejoint les équipes de l’Immigrants Service Society

(ISSBC) où il accomplit une mission qui lui correspond bien : faciliter l’adaptation des étrangers et réfugiés dans leur nouveau pays d’accueil. Il enseigne aujourd’hui à Victoria différentes matières liées aux droits humains et à la résolution des conflits. Il conseille également l’Université en matière d’éducation aux droits humains. Amené à régler des différends entre étudiants, souvent liés à des problèmes de discrimination, il se décrit comme un
« mercenaire intellectuel » pour qui les principes de tolérance et d’égalité doivent être transmis le plus largement possible, y compris aux Canadiens.

M. Magassa confesse souvent: « Je crois au concept africain de l’Ubuntu, qui signifie que nous sommes humains à cause d’autres êtres humains. Ce principe est basé sur notre humanité commune et notre responsabilité les uns envers les autres. »

Moussa Magassa est de ceux qui contribuent à établir des dialogues entre les hommes. Et ces années passées loin du continent africain n’ont pas émoussé son esprit de partage et de rassemblement. Lors de cet atelier sur les enfants soldats, il souligne : « Pour cet ancien enfant soldat venu témoigner, c’est la première fois qu’il a pu s’exprimer ainsi. Et pour certaines personnes dans l’assemblée, c’était sans doute la première fois qu’elles rencontraient un enfant soldat. ». Les ponts sont jetés.