À la recherche du temps perdu

Un saint pour le 29 février ?

Un saint pour le 29 février ?

Tout comme Proust, je suis à la recherche du temps perdu. Alors sans plus gâcher un instant, histoire de gagner du temps, entrons dans le vif du sujet : février 2012, nous y sommes, un mois pas comme les autres. Un mois qui, année bissextile oblige, s‘allonge de 24 heures tous les 4 ans. Un mois généralement lésé ou laissé pour compte si nous faisons le compte. Un mois de 29 jours plutôt que de 28 jours. Nous approchons de cette 29ème journée de rabiot. À bien y penser : a-t-on besoin de ce 29 février qui ne fait pas nécessairement le bonheur de tous ?

Soyons honnête, à priori cette journée paraît bizarre. Une anomalie. C’est une verrue, un abcès. On se demande ce qu’elle fait là. On la regarde du coin de l’œil et on a envie de lui dire : « Mais qui vous a invitée ? Vous n’avez pas autre chose à faire plutôt que de venir déranger nos habitudes ?

On peut très bien se passer de vous ». Mais ne soyons pas ingrats car cette journée supplémentaire vient sauver la mise de tous ces mathématiciens et astronomes qui avaient compliqué la vie de leurs concitoyens  en leur imposant un calendrier lunaire de 355 jours. C’est là qu’intervint alors César. D’un geste impérial et dédaigneux, je spécule, il mit un astérisque en haut de « l’annus » et imposa le calendrier julien qui fit place au grégorien mais pas au carolingien. Tagada tsoin tsoin.

À vrai dire, en ce qui me concerne, je n’ai, en principe, aucune raison de me plaindre ; je ne suis pas né un 29 février et je n’ai donc pas à attendre 4 ans pour recevoir mes cadeaux d’anniversaires.

Par ailleurs un jour de plus par an fait, sans doute, l’affaire de ceux qui sont payés à l’heure. Les autres, toutefois, dont le salaire est versé sur une base annuelle, ne doivent pas être contents. Il leur faut en effet diviser leur salaire par 366 jours au lieu de 365. Une journée de travail pour rien. De quoi râler, manifester et monter aux barricades, que l’on soit syndiqué ou pas. Il existe des droits que l’on ne peut bafouer. Il y a des limites à tout. Il est possible toutefois, de contourner le problème. Le 29 février prenez congé, restez au lit si le cœur vous en dit. Détendez-vous. Faites de cette journée un moment de loisir et de réflexion. Récupérez tranquillement. Relaxez-vous de la fatigue physique et mentale accumulée au cours des 1460 jours précédents.

Profitez-en pour aller voir votre masseuse ou ma sœur qui peut aussi soigner tous vos bobos. Faites de ce 29 février le jour du soigneur. Consacrez ce dernier jour du mois à vous-même et à la méditation. Et essayez de répondre à la seule question qui doit tous nous préoccuper : Que faut-il faire de cette journée ? L’ignorer ? La castrer ? La dédaigner ? La snober ? L’hypothéquer ou au contraire la vénérer, la célébrer, l’aduler, l’embrasser ? La subjuguer ? Tout est possible mais on devrait au moins la sanctifier. Consultez votre calendrier. Vous verrez qu’aucun saint ne figure à la date du 29 février? Personne à l’affiche. Une page blanche, béante. Un jour sans saint. « C’est comme une voiture sans ceinture » disait mon oncle qui portait des bretelles. Aucune sécurité. S’il devait nous arriver un pépin cette journée-là on ne saurait à quel saint se vouer. Comment se fait-il que la papauté n’y ait pas pensé ?  Est-on en mal de Saint ?

Aucun candidat au temple de la sainte renommée ? Et s’il leur manque un saint je serais celui-là. Je serais ainsi, après m’être donné un mal de saint, le nouveau saint au sein de l’église. J’en vois déjà plusieurs parmi vous, affolés par cette idée, s’écrier « Cachez ce saint que je ne saurais voir ! ». N’ayez crainte. Je retire ma candidature. Je crois, nez en moins, que le poste devrait être affiché. « Recherchons saint à tout faire. Un saint qui ne verrait aucun inconvénient à n’être célébré que tous les 4 ans ». Un saint simple quoi.

En attendant que l’église se décide, que vais-je faire ce 29 février ?

Perdre mon temps sans doute puisque je viens de vous faire perdre le vôtre. Il paraît que le temps perdu ne se rattrape plus. C’est faux. Les années bissextiles sont là pour ça.