L’homme qui murmurait à l’oreille de Hogan’s Alley

Les maisons livrent leurs secrets. Photo par James Johnstone

Il y a la grande et la petite histoire, les événements historiques et ceux marquant des vies. Bien souvent les circonstances historiques apportent leur lot de joies et de maux. Alors des maux aux mots, les communautés s’expriment et partagent leur histoire, leur culture. Le festival de la poésie Hogan’s Alley rassemble pour la seconde édition des artistes qui nous transmettront leur culture à travers leur art. Et il se peut qu’il y ait de belles surprises.

A Strathcona, des performeurs, des poètes, des musiciens, des auteurs, des conteurs viendront mettre leur créativité au service de la transmission culturelle. Hogan’s Alley est le quartier historique de la communauté noire de Vancouver. C’est également ici que Jack Deighton, plus connu sous le nom de Gassy Jack, vint en 1865 avant de s’établir dans le quartier connu aujourd’hui sous le nom Gastown, ce que peu de personnes savent.

Les événements programmés permettront l’interaction entre le public et les artistes. Le festival a à cœur cette année de placer la communauté noire en avant, ne serait-ce que par les lieux de programmation. A travers les récits, les mots deviendront des liens entre le passé et le présent. Ils seront là pour faire partager l’âme d’une culture. Le quartier de Hogan’s Alley qui a contribué au partage ethnique entre les communautés, sera lui mis en avant.

L’âme des demeures, l’histoire d’un quartier

Parmi les artistes cette année, James Johnstone, chercheur spécialiste dans l’histoire des habitations, animera une visite autour de l’héritage de la communauté noire du quartier. Ce passionné d’histoire et amoureux de son quartier, a exploré les archives de près de 800 maisons dont plus de 300 dans le secteur. Ce sont les bruits de sa propre maison qui ont aiguisé sa curiosité. Après un déménagement dans une maison ancienne, les craquements lorsqu’il montait son escalier l’ont interpellé. Sa maison essayait de lui dire quelque chose. Il a cherché à en savoir plus, qui avait habité là avant lui. C’est ainsi qu’il a commencé ses recherches et que la passion est née. Il s’est rendu compte que les maisons avaient toutes des liens de par leur histoire.

James Johnstone devant la maison Dunlevy. Photo par James Johnstone

Auparavant James Johnstone était guide pour les touristes japonais suite aux attentats du 11 septembre 2001, ce tourisme s’est effondré et l’historien s’est retrouvé sans emploi. Ses voisins et les habitants de ces maisons lui ont conseillé d’en faire son métier et de découvrir les secrets des demeures.

Cet ancien guide s’est alors spécialisé comme historien des maisons, conteur de l’histoire du quartier. Ses passions pour la géographie, l’histoire, l’architecture, et les langues s’y trouvent combinées.

Si chacun sait que Jimi Hendrix a vécu à Vancouver dans ce quartier, qui sait que ce champion de boxe italien changea de nom car sa mère n’aimait pas le savoir boxer, ou bien les deux frères noirs qui signèrent la Charte de la ville de Vancouver en 1886 à une époque où les noirs étaient victimes de discriminations, c’est l’histoire de Vancouver et pas seulement celle d’un quartier que portent ces maisons. Comme il explique : « Il y a beaucoup de connections avec l’histoire noire ici et beaucoup de fierté pour cette communauté. »

Il connait chaque maison. « Ce ne sont pas de grandes histoires mais elles sont fascinantes. Le combat des familles immigrantes, la manière dont les gens se sont débrouillés pour faire vivre leur famille, j’y suis sensible. » Généralement les gens sont contents mais « parfois on découvre des événements pas très heureux voire tragiques qui ont pu arriver dans les maisons comme des morts, des suicides et parfois des meurtres. Certains ne veulent pas en parler, d’autres trouvent ça cool ! »

Il attend le festival avec impatience « Peut-être certains auront des liens avec le quartier, des gens intéressés par la culture noire américaine, des curieux. J’apprendrai d’eux comme ils apprendront de moi, c’est un fabuleux moyen de dialoguer. » Cette visite guidée lui permettra peut-être aussi de remplir les blancs en transmettant un héritage historique. Bien qu’il aime la musique et la poésie, comme il dit « je ne pense pas que je ferai la visite en rimes, les gens viendront pour la poésie des lieux. »

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Hogan’s Alley Poetry Festival 2012 : Poetic Justice
Du 28 au 30 septembre
www.blackdotcollective.org/HAPF2012
www.househistorian.blogspot.ca/