Trade School Vancouver : L’éducation en troc

Il est 18h, et un cours un peu particulier débute à Gastown. La pluie s’abat sur Vancouver en cette soirée de février et un match des Canucks est au programme. «Il y a toutes ces excuses pour ne pas venir, et vous êtes là», félicite le professeur.

Le professeur, c’est Greg Ryder, et c’est sur Twitter qu’il a entendu parler de la Trade School Vancouver, une école participative fonctionnant grâce au troc, et sans aucun échange d’argent. Greg Ryder est consultant en affaires et a désormais devant lui une dizaine d’élèves de tous âges, prêts à suivre son cours de deux heures sur le développement professionnel, intitulé Career Planning 101.

Des cours comme celui-ci, il y en a plusieurs par semaine à la Trade School Vancouver, en passant de la fabrication de la bière, à l’initiation au piano ou à l’étude de l’apiculture. Ils sont tous offerts gratuitement ou en échange de certains articles ou services inscrits sur une liste par les professeurs concernés. Sandwiches, stylos, légumes bio, volontaires pour un projet, poèmes,… les listes sont variées et les professeurs se montrent inventifs !

«L’autre jour, un des professeurs a demandé une leçon de soudage en échange de son enseignement,» nous explique Matt Kump, un des organisateurs. «On ne pensait pas que ça allait marcher… Et un des élèves le lui a proposé !,» ajoute-t-il, encore sidéré.

Greg Ryder, lui, a simplement demandé à ses élèves de lui donner des conseils pour améliorer sa pédagogie. “Et des cartes café,” ajoute-t-il en souriant.

Les débuts d’une Success Story
Tout a commencé à New York en 2010, alors qu’un groupe d’amis adeptes des bons plans et de la philosophie du Do It Yourself décide de créer une plateforme pour «troquer la connaissance».

C’est dans leur petit magasin du Lower East Side, reconverti en salle de classe pour l’occasion, que la première Trade School est née. Avec plus de 800 étudiants en trente jours, le succès est retentissant.

Il s’en est depuis créé plus d’une quarantaine, de Mexico à Ho Chi Minh, en passant (enfin) par Vancouver, où une Trade School est installée depuis janvier 2013.

Greg Ryder donne un cours à la Trade School Vancouver | Photo par Coralie Tripier

Greg Ryder donne un cours à la Trade School Vancouver | Photo par Coralie Tripier

«J’espère que la Trade School encourage le respect mutuel entre les personnes. Avec un respect mutuel, tout est possible,» explique Caroline Woolard, l’une des pionnières new-yorkaises de cette école pas comme les autres.

Malgré son succès, la Trade School reste basée sur le bénévolat afin de respecter son mandat : zéro argent. Ce sont donc des bénévoles passionnés, tout comme Matt Kump, qui organisent les emplois du temps et s’occupent de trouver des salles pour les professeurs et leurs élèves.

«Nous avons tous des emplois à temps plein,» explique l’organisateur. «Je suis créateur de sites web, alors j’ai utilisé mes connaissances pour participer à la création du site de la Trade School

L’école pour tous, et tous pour l’école
L’autre particularité de la Trade School, c’est que tout le monde peut y enseigner en proposant une classe via le site internet, et le concept plaît.

«Toute personne passionnée par un sujet peut l’enseigner,» explique Matt Kump, qui croule sous les propositions et a dû créer une liste d’attente pour les professeurs. «Jusqu’à maintenant, ça s’est toujours très bien passé!» ajoute-t-il.

Les motivations des professeurs à enseigner sont variées. Pour Greg Ryder, il s’agit d’apporter son aide aux nombreuses personnes qui cherchent à développer ou à rediriger leurs carrières, un enjeu d’actualité.

«Si je peux contribuer à résoudre un problème de société à travers un format différent qui ne coûte pas un sou à mes élèves, je suis partant,» explique-t-il.

Un succès aussi retentissant était inattendu, et selon le professeur du jour, il indique le potentiel de ce nouveau mode d’enseignement inspiré par l’économie de solidarité.

Matt Kump, un des organisateurs de la Trade School Vancouver | Photo par Coralie Tripier

Matt Kump, un des organisateurs de la Trade School Vancouver | Photo par Coralie Tripier

«Le fait que les classes se remplissent aussi vite et que la Trade School soit aussi populaire en si peu de temps montre bien le besoin et la demande qui existent pour un modèle éducatif non-traditionnel,» dit Greg Ryder. «La révolution est en chemin».

L’inscription aux classes est ouverte à tous, sur la base du «premier arrivé, premier servi,» et les places sont chères, si l’on peut dire.

A Vancouver, ce sont les cours de fabrication de bière qui ont le plus de succès, nous explique Matt Kump, l’organisateur. «Ils se remplissent en une journée,» ajoute-t-il en riant.

Alors n’attendez pas, et rendez-vous sur le site de la Trade School Vancouver pour troquer un sourire, des fleurs, ou des grains de café contre un peu de connaissance.

 

Trade School Vancouver
tradeschool.coop/Vancouver/class