Les prix surprises

L’automne est là. Les feuilles mortes n’en finissent pas de mourir et nous connaissons maintenant les lauréats des différents prix Nobel. Alice Munro nous a fait honneur avec son prix de littérature qui donne, par la même occasion, ses titres de noblesse à un genre littéraire souvent snobé : la nouvelle. Puisqu’il est question de nouvelle voici une nouvelle nouvelle : la création des prix Poubel, nommés en l’honneur d’Ella Poubel, créatrice du mouvement de rejet de tout acte ou comportement déshonorant.

Le prix Poubel. Photo par D. Billy, Flickr

Le prix Poubel. Photo par D. Billy, Flickr

Ces prix, sans récompense, compensent, entre autres, les excès d’honneur qui ont tendance à nous faire oublier que le monde n’est pas aussi parfait qu’on voudrait nous le faire croire. Une sorte de prix rabat-joie. Cette chronique donc risque de vous déplaire. Toujours est-il que les prix sont amplement mérités. Une longue réflexion et de sérieux débats internes ont donnés des résultats souvent surprenants. Les choix, reconnus à l’unanimité, ont été difficiles à faire car il y avait beaucoup de concurrence.

Le jury, composé d’une seule personne (l’auteur de cette chronique en l’occurrence), s’est réuni plusieurs fois par jour avant d’en arriver au palmarès qui suit.

Prix Poubel du honni soit qui mal y pense : Remis pour la première fois au gouvernement de Madame Pauline Marois, Première ministre du Québec. La Charte des valeurs québécoises lui mérite ce prix. Le jury est conscient que ce choix risque de déplaire à certains, mais il a fallu prendre en considération les contradictions et les intentions nébuleuses de cette proposition de charte pour en arriver à ce résultat.

Prix Poubel de l’occasion perdue : Adrian Dix et ses cohortes reçoivent, sans contestation, cette attribution. Parti largement favori lors du déclenchement de l’élection provinciale au printemps dernier, le chef du parti néo-démocrate se retrouve au lendemain du scrutin avec un résultat des plus abominables. Christy Clark lui inflige une raclée politique qui s’inscrit dans les annales de l’histoire de la Colombie-Britannique. Un camouflet qui finalement l’obligera plus tard à démissionner de son poste de leader. Résultat de cette défaite ? Nous sommes, depuis, assujettis au sourire insupportable et permanent de notre Première ministre. Et dire, Monsieur Dix, que sans vos bévues et mauvais conseils reçus durant votre campagne électorale, on aurait pu être heureux.

Prix Poubel de la malhonnêteté : Après pas mal d’hésitation, ce sont finalement les véreux et tricheurs du Sénat qui l’emportent. En concurrence sérieuse et déloyale avec les sportifs qui se dopent, cyclistes et athlètes en particulier, ce sont les membres du Sénat, qui ont abusé de leur pouvoir aux dépens des contribuables canadiens et qui ont utilisé à mauvais escient leurs privilèges, à qui ce prix revient. Le Premier ministre Stephen Harper a nommé la plupart d’entre eux. Il devrait donc partager le blâme et s’adjuger une partie du prix. Connaissant notre oiseau, il y a de forte chance qu’il décline toute responsabilité dans cette débâcle.

Prix Poubel de la vanité : Décerné à Abdi Hassan, ce chef pirate somalien arrêté à Bruxelles alors qu’il débarquait à l’aéroport. Il est tombé dans le piège tendu par les autorités belges. Lui faisant croire qu’il allait participer à un film mettant ses hauts faits de piraterie en valeur, Abdi Hassan, sentant la gloire prochaine et entendant déjà sonner les trompettes de la renommée, est tombé droit dans le panneau. À se demander si les pirates somaliens ont ri de cette histoire qui prouve qu’on peut être pirate et stupide à la fois?

Prix Poubel de la honte : Gagné haut la main par Sylvio Berlusconi, ancien président du Conseil italien. Devenu la risée de tout un pays, ce bouffon multi-milliardaire, organisateur d’orgies légendaires auxquelles ni vous, ni moi, avons été invités, a réussi à embarrasser son peuple et ses alliés politiques pendant des années. Se croyant invulnérable, intouchable tout en estimant que l’argent peut tout arranger, le voilà maintenant au pied du mur de la prison. Qui s’en plaindra ?

Prix Poubel du ridicule : Obtenu par les leaders politiques africains qui demandent l’immunité contre toute poursuite, par la cour internationale, pour crime envers l’humanité pendant toute la durée de leur mandat. Il faut avoir une sacrée dose de culot pour faire une demande pareille. En somme ces leaders cherchent un permis de tuer. Et on ose dire que le ridicule ne tue pas.

Prix Poubel de l’irresponsabilité : Remporté, peu avant la remise des prix, par le Parti Républicain américain dont la branche extrémiste du Tea Party a tenu en otage les Etats-Unis. La haine aveugle qu’éprouve cette faction à l’égard du Président Barack Obama, l’a poussé à amener leur pays au bord du gouffre économique, balayant du revers, d’une main dédaigneuse, toute conséquence néfaste que pourrait causer leur action. Le Tea Party, ce n’est vraiment pas ma cup of tea.

Et finalement, à titre personnel, Vladimir Poutine a reçu le prix Poubel du leader le plus machiavélique. La liste de ses méfaits, faute d’espace, est bien trop longue pour l’étaler.

La distribution des prix Poubel est, pour le moment, terminée. Que les récipiendaires s’effacent et ne fassent plus parler d’eux. Ainsi soit-il.