Fêtes et élans de cœurs

Un sans-abri et son chien sur la rue Granville. | Photo par aliphoto2007, Flickr

Un sans-abri et son chien sur la rue Granville. | Photo par aliphoto2007, Flickr

Je viens d’une petite île où le jour, où le soleil ne brille pas… il brille toujours ! Au sens propre comme au figuré. L’été dure 365 jours. Le quotidien est paisible. « L’herbe est toujours plus verte de l’autre côté de la clôture », dit le dicton. Laisser un pays du Tiers-monde pour embrasser le grand continent nord-américain ne peut qu’être salutaire. Une hiérarchie plate est plus harmonieuse que celle appelée pyramidale. « Utopie », mes méninges me crient! Je vais donc faire l’autruche pour éviter une désillusion fort désagréable.

Oui, le choc culturel m’a touché après avoir sillonné les quartiers de la ville. J’ai ri, j’ai pleuré, j’ai été emplie d’optimisme et je me suis aussi enfouie dans mes oreillers, à hiberner les mois d’hiver.

Le jour de l’Action de Grâce, le fameux Thanksgiving, alors que les recettes sur les restes du repas de la veille pleuvaient sur ma page Facebook – les sandwichs à la dinde avaient la côte d’honneur – je ne pouvais m’empêcher d’éprouver un pincement au cœur en pensant aux sans-abris sur les beaux trottoirs du centre-ville. Le Thanksgiving ne sous-entend-t-il pas aussi le sens du partage? C’est ma conception et ma foi personnelle.

Je pense à ces longs mois d’hiver qui sont à nos portes et au courage de ces personnes qui affrontent la pluie hivernale et la neige. Et pourtant, tous les hommes, qu’importe le pays ou la planète où nous vivons – oui, il semblerait qu’il y ait d’autres planètes habitées, mais ce sera un autre sujet de discussion-ont les mêmes besoins!

J’ai été témoin de scènes plus que touchantes dans la grande rue de Granville, des images qui m’ont fait comprendre que tout ce dont nous avons besoin, c’est de partager de l’Amour. J’ai vu un jeune homme serrant dans ses bras son chien, les deux profondément endormis, peu soucieux que leur couverture de laine leur ait échappé. Le monde tourne à côté d’eux, les affaires fructifient, les soucis aussi sont légions. Nos yeux sont acclimatés, conditionnés et ne souffrent plus de telles scènes.

Or, sur ce fond de bigarrure sociale, se tisse une toile de solidarité. Le contraste est net. La culture canadienne démontre également un bel exemple d’écoute et de main tendue. Les banques alimentaires offrent un spectacle à se pâmer de joie avec leur organisation réglée comme du papier à musique. La longue file d’abonnés de faibles revenus, de communautés confonduesse délectent des produits sur les tables de service. C’est le carrefour de rencontre des continents. La personne d’origine africaine côtoie le Canadien d’origine européenne sans qu’aucun jugement ne soit porté. C’est Noël tous les jours dans ces centres. La qualité des produits n’a rien à envier aux grandes surfaces : les salades et le pain (y compris la pâtisserie) sont frais, ainsi que les légumes. Beaucoup de ces grandes surfaces alimentent ces services grâcieusement.

En poussant mon enquête un peu plus loin, j’ai découvert que par respect pour les cultures qui pratiquent la tradition halal (viande purifiée en vertu du rite islamique), une banque de nourriture halal est destinée à cette communauté exclusivement.

Les semaines ont passé depuis Thanksgiving. Le compte à rebours de Noël et du Nouvel An est enclenché. Les collectes aussi ! Nombreux sont les organismes à disposer de caissons pour recueillir chaussettes et couvertures neuves pour les plus démunis. Un geste honorable pour rendre l’hiver un peu moins froid.