La francophonie en C.-B. face à de nouveaux défis

Photo d'Association francophone de Surrey

Photo d’Association francophone de Surrey

La Francophonie, c’est un vaste pays, sans frontières. C’est celui de la langue française. En une phrase, le poète québécois Gilles Vigneault avait résumé ce qui lie aujourd’hui près de dix millions de Canadiens, soit 30% de la population, autour de la langue de Molière. En Colombie-Britannique, dans cette province à large majorité anglophone, ils sont 300 000 à s’exprimer, penser, rêver et vivre en français. Un groupe qui, malgré les différences d’origines et de cultures, se rassemble autour d’un point commun : la pratique et l’amour d’une langue. Ils forment une francophonie aux multiples visages qui fait face à de nouveaux défis, ceux de trouver une cohérence et une attractivité pour perdurer.

Le militantisme : une époque révolue?

Depuis une dizaine d’années en Colombie-Britannique, en lien direct avec les flux migratoires, le visage de la francophonie a changé. Autrefois composée de populations venant des provinces de l’Est canadien, elle se compose aujourd’hui de membres en provenance de France mais aussi et surtout d’Afrique du Nord et Sub-saharienne. Le dernier recensement fédéral de 2006 montre qu’un francophone sur huit est né dans la province, 57 % sont nés ailleurs au Canada et 29% à l’extérieur du pays. En 2001, ce dernier chiffre représentait 14%. Cette évolution de la communauté induit un changement dans l’implication et le sentiment d’appartenance à la francophonie, comme en témoigne Jamal Nawry. Coordinateur au sein de l’Association francophone de Surrey entre 2000 et 2004, il occupe depuis deux mois la fonction de Directeur. « Il y a dix ans, on demandait des infrastructures, des services et plus de reconnaissance du français en territoire anglophone. On revendiquait le droit d’être là. Le militantisme a depuis porté en partie ses fruits et aujourd’hui, le fait d’adhérer à la francophonie traduit davantage un intérêt culturel. Les gens veulent participer à des activités ».

Des moyens limités…

« Les francophones cherchent à se retrouver et à se connaître. C’est pour cela qu’à Richmond, nous organisons des petits déjeuners tous les mercredis. Mais au-delà de cela, ce qui illustre la francophonie pour moi c’est l’entraide et la solidarité » poursuit Marielle Phaneuf Demorest, Fondatrice et Directrice de l’Association francophone de Richmond. Cette oreille attentive à tous ceux qui la contactent, avoue avoir aidé récemment un jeune Camerounais à trouver des meubles pour son installation. Mais les subventions et les cotisations ne sont pas suffisantes, l’association de Richmond n’a toujours pas de locaux… cinquante ans après sa création. Les petits déjeuners se font toujours chez Marielle.

Du côté de la Société de la Maison de la Francophonie à Vancouver, malgré la présence dans ses locaux d’une dizaine d’associations francophones, on manque toujours d’espace pour accueillir tous les acteurs de la francophonie et créer un grand pôle avec des espaces d’accueil pour le public comme des salles de spectacles ou encore un foyer de jeunes.

La poésie française comme activité fédératrice à l'Association francophone de Surrey. Photo d'Association francophone de Surrey

La poésie française comme activité fédératrice à l’Association francophone de Surrey. Photo d’Association francophone de Surrey

Le défi de l’identité plurielle

Outre la question des moyens, la francophonie doit faire face à une autre réalité. Celle de son visage multiple qui constitue aussi bien une richesse qu’un défi. Comment fédérer autour d’une seule langue des cultures aussi diverses que la culture française, sénégalaise, marocaine ou encore vietnamienne? Quel avenir pour la francophonie?

« C’est une de nos grosses interrogations ici à Surrey », répond Jamal. « Nous menons actuellement une réflexion sur l’ensemble des activités à proposer qui intéresseraient et impliqueraient davantage de francophones. Et c’est loin d’être évident de combiner les intérêts de chacun avec ce dénominateur commun qu’est la langue française ».

Une partie de la solution reposerait sur les enfants. L’école étant fédératrice, les trente-sept écoles francophones de la Colombie Britannique et les 40 000 enfants inscrits en immersion devraient assurer les beaux jours du français et participer à la création de ce lien communautaire.

Vers la francophilie?

L’installation récente de Canadian Parents for French, association qui regroupe les parents d’élèves en immersion, dans les locaux de la Maison de la Francophonie est un signe fort d’un nouveau changement qui s’opère au sein de la communauté francophone en Colombie-Britannique. Les francophiles, ces personnes amoureuses du français ou désirant maîtriser la deuxième langue officielle du pays, sont friands d’activités en français. Cette matière n’a jamais autant eu la cote dans les écoles et les classes ne sont pas assez nombreuses pour satisfaire toutes les demandes. Inclure les francophiles dans la francophonie est un bien nécessaire. « Nous ne combattons pas l’anglais, au contraire, nous voulons que nos enfants maitrisent les deux langues. C’est une richesse de pratiquer plusieurs langues. Cela prouve une ouverture sur le monde et c’est cela même l’esprit de la francophonie » conclut Jamal.