Taille d’athlète et tête d’acteur de cinéma ?

Art Phillips (à gauche), ancien maire de Vancouver, et Gregor Robertson (à droite), actuel maire de Vancouver. |  Photos par Greg Ehlers (à gauche) et Ariane Colenbrande (à droite)

Art Phillips (à gauche), ancien maire de Vancouver, et Gregor Robertson (à droite), actuel maire de Vancouver. |
Photos par Greg Ehlers (à gauche) et Ariane Colenbrande (à droite)

Quand Art Phillips (1930 à 2013) a été élu maire de Vancouver pour son premier de deux mandats en 1972, il était âgé de 42 ans. Il avait été conseiller municipal depuis la fin des années 60. C’était l’époque dorée du NPA, qui contrôlait la scène politique municipale depuis près de 40 ans.

Art Phillips ne partageait pas du tout la vision et les objectifs du NPA sous la direction du maire d’alors, Tom Campbell, (aucun lien de famille avec Gordon Campbell qui a été élu maire en 1986, pour ensuite devenir premier ministre de la province). Il s’inquiétait de l’orientation que prenait le développement urbain, en particulier le projet de construire une autoroute qui traverserait le centre-ville et le quartier Chinatown, pour ensuite rejoindre Vancouver Nord et Ouest. Il ne reste de ce projet que les deux bretelles d’accès, qui n’y ont jamais mené, soit les viaducs Dunsmuir et Georgia.

À la fin des années 60, il avait fondé TEAM, The Election Action Movement. Il avait déjà connu un succès phénoménal en affaires et voulait redresser l’orientation que prenait sa ville, qui s’inspirait alors des pires modèles nord-américains de l’époque. On lui doit le verdissement du West End et la mise en place des culs-de-sac qui ont eu pour effet de calmer et réduire la circulation automobile, qui s’en servait comme raccourci entre le centre-ville et les banlieues nord de l’Anse Burrard, le début des mesures de densification urbaine. On lui doit aussi la transformation de la rive sud de False Creek en quartier résidentiel, (qu’il a d’ailleurs habité), la création du Fonds de Dotation Immobilière, (qui est propriétaire de plusieurs terrains municipaux) et surtout, le déplacement des réunions du conseil municipal en soirée, pour y faciliter la participation des citoyens.

Puis après son deuxième mandat à la mairie, et quelques mois en politique fédérale, sous la bannière libérale en 1979, il est retourné à l’entreprise qu’il avait fondée en 1964, et qui portait son nom et celui de ses partenaires (Art) Phillips, (Bob) Hager et (Rudy) North, devenu PHN, rachetée par RBC pour 1,8 milliards en 2008.

Art Phillips faisait plus de 6’2”, avait une taille d’athlète et une tête d’acteur de Hollywood. On le considère comme le maire le plus influent que Vancouver ait connu et on lui doit ce qu’on appelle aujourd’hui le vancouvérisme, qui fait encore et toujours l’envie de ceux qui viennent voir ce qui se passe ici. Un espace public porte d’ailleurs son nom, le Art Phillips Park, petit triangle de verdure moderne, à côté de la station de SkyTrain Burrard.

Quand Gregor Robertson a été élu à la mairie de Vancouver pour le premier de ses deux mandats, en 2008, il était âgé de 43 ans. Il avait été élu membre de l’Assemblée législative de Victoria sous la bannière néo-démocrate en 2005, poste qu’il a quitté pour se présenter à la mairie de Vancouver en 2008. Il avait été co-fondateur de la désormais célèbre entreprise de jus de fruits et de légumes bio Happy Planet. Il a fondé le parti municipal Vision, en réaction et en opposition au NPA, qui a dirigé la mairie de Vancouver de 1986 à 2008, sauf pendant les trois ans du mandat de Larry Campbell, maire COPE de 2002 à 2005, maintenant sénateur à Ottawa (encore… aucun lien de famille avec Tom Campbell ou Gordon Campbell). Il veut faire de Vancouver la ville la plus verte d’Amérique du Nord, poursuivre le développement des pistes cyclables, s’investir dans les projets de développement et de densification urbaine, mettre à bon usage les ressources du fonds de dotation immobilière créé par Art Phillips pour construire des immeubles à logements pour les sans-abri et les citoyens à faible revenu, et faire démolir les bretelles d’accès de l’autoroute qui n’a jamais vu le jour au centre ville, nommées viaducs Georgia et Dunsmuir.

Il a procédé à la fermeture de Point Grey Road, dans le quartier du même nom (qu’il habite d’ailleurs maintenant), pour compléter un projet de piste cyclable verte, toute en bord de mer, de plus d’une vingtaine de kilomètres, promise depuis 1986.

Gregor Robertson fait plus de 6’2″, a une taille d’athlète et une tête d’acteur de Hollywood.

Qui sait si dans une trentaine d’années, on parlera de l’héritage politique de Gregor Robertson avec autant d’admiration qu’on le fait pour Art Phillips, et qu’on rebaptisera un des parcs qui longe Point Grey Road, entre MacDonald et Alma, le Gregor Robertson Park.