L’auberge espagnole de Vancouver

En quelques mois, les quatre amis vancouvérois ont accueilli près de 150 voyageurs.

En quelques mois, les quatre amis vancouvérois ont accueilli près de 150 voyageurs.

Chez Brennan, Dan, Jordan et Quinn, on a le sens de l’hospitalité. Les colocataires ont en effet décidé d’ouvrir en grand les portes de leur maison, qui, en l’espace de quatre mois, a accueilli près de 150 voyageurs. Une démarche animée par la volonté de partager et de rencontrer, mais aussi une manière pour eux de parcourir le monde par procuration.

Entrer dans cette maison est comme entrer en pays inconnu. Un pays peuplé d’étrangers où l’on se sent vite chez soi. Un pays où l’anglais approximatif serait la langue officielle. Depuis le mois de mars, la maison a vu défiler un nombre impressionnant de touristes des quatre coins du globe. « On tient un petit classement par nationalité. Les Allemands sont loin devant, mais les Français se rapprochent petit à petit. La langue dominante est l’espagnol, avec beaucoup de Latino-américains et de voyageurs qui viennent d’Espagne », raconte Brennan. « Pour nous qui venons d’un petit village de l’Ontario et qui n’avions jamais eu l’occasion de rencontrer autant d’étrangers, c’est un vrai échange culturel », ajoute Jordan.

Sur la vague du couchsurfing

Leurs invités, les quatre hôtes les trouvent par le biais du couchsurfing. Le principe : une plateforme web où des locaux proposent gratuitement un toit aux voyageurs cherchant à séjourner dans leur ville. Une méthode d’hébergement qui est désormais passée à la postérité, et pas uniquement chez les voyageurs les plus aguerris.

« Le couchsurfing est rapidement devenu très populaire, des amis nous en avaient parlé. Nous avions cette grande maison et nous avons décidé d’essayer », explique Quinn. Le déclic, pour eux, a été l’accueil d’un couple de Français : « C’était comme si on se connaissait depuis toujours. Ils ne devaient rester que quelques jours et sont restés trois semaines », continue Quinn. Une expérience qui les a poussés à ouvrir leur maison à de plus en plus de couchsurfers. Dan précise : « Après, ça s’est très vite enchaîné. Une fois nous nous sommes mêmes retrouvés à héberger dix-huit couchsurfers en même temps ! »

Pour accueillir tant de voyageurs, un minimum d’organisation est nécessaire. Le jardin peut accueillir plusieurs tentes, mais c’est surtout le grenier, qui, à l’étage, est bondé de matelas et de sacs de couchage. Côté signalétique, Quinn a tagué un signe distinctif sur le sol pour que les invités trouvent facilement leur chemin depuis la station de Skytrain. Brennan, lui, s’amuse de voir comment les couchsurfers s’approprient le lieu : « La plupart du temps nous avons notre surfer résident. C’est un peu celui qui est là depuis plusieurs jours et qui explique aux autres comment fonctionne la maison. En ce moment c’est Daniel, un Allemand qui était déjà venu il y a plusieurs semaines. »

Au chat et à la souris avec le propriétaire

Il peut sembler étonnant que le propriétaire de la maison, dont les quatre hôtes ne sont que locataires, ne s’oppose pas à ces nombreuses visites. « Il ne nous a jamais dit s’il était pour ou contre. Il faut dire qu’on ne lui a jamais expliqué qu’on recevait autant de personnes ! », confie Dan.

Par précaution cependant, Quinn et ses colocataires font en sorte que le propriétaire ne se retrouve pas nez à nez avec une quinzaine de couchsurfers : « Un jour, le propriétaire m’a appelé pour me prévenir qu’il allait passer quelques minutes plus tard. Il a fallu faire preuve de persuasion pour convaincre des surfers qui venaient d’arriver de cacher leurs sacs dans le fourgon de Brennan et d’aller nous attendre au bout de la rue jusqu’à ce qu’on vienne les chercher… »

Si les anecdotes ne manquent pas depuis que la maison s’est ouverte aux voyageurs du monde entier, la parenthèse enchantée de ces derniers mois devrait pourtant bientôt se refermer. Le propriétaire a en effet décidé de détruire la maison pour en reconstruire une nouvelle, ne renouvelant pas le bail des quatre amis. Ceux-ci s’en attristent mais philosophent : « C’est une grande page qui va se tourner pour nous et pour tous les amoureux de cette maison. C’est paradoxal, mais si proche de la fin, elle n’a jamais été aussi vivante.