« L’espace du dedans », entre influences extérieures et empreintes culturelles

 

Photo par Charlotte Cami

Photo par Charlotte Cami

Alors que Vancouver vogue de salon en salon ̶ sortant tout juste du Interior Design Show West (IDS West), qui a attiré de nombreux designers et amateurs d’aménagement intérieur du 25 au 28 septembre au Convention Centre, et s’acheminant vers le salon Home + Design, qui se tiendra du 16 au 19 octobre à BC Place –, La Source vous emmène dans cet espace du dedans qui nous fait dire : « Je suis à la maison ». Quelles influences de l’extérieur, des lieux, de l’environnement, et quelles empreintes culturelles se retrouvent-elles dans notre salon ?

« Le bois est partout dans nos maisons, avant tout parce que nous n’avons pas besoin de l’importer », observe Garvin Froome, directeur artistique du documentaire Coast Modern, rencontré au salon IDS West et qui a étudié l’architecture moderne de la côte nord-ouest sur trois générations avec le directeur producteur Mike Bernard.

Les riches et abondantes ressources en bois de la Colombie-Britannique permettent d’exploiter plusieurs sortes de bois, le plus utilisé étant le cèdre. Mais son utilisation peut également varier : à Whistler, par exemple, le designer d’intérieur Yves St Hilaire utilise « le bois brut pour une couleur naturelle et le bois brûlé pour une meilleure résistance lorsque celui-ci doit faire face aux éléments extérieurs ».

D’autres matériaux à portée de main ou symboliquement associés à notre environnement se retrouvent également dans nos maisons. C’est le cas du béton, utilisé aussi bien dans l’habitation que sur la terrasse, ou de l’acier, dont l’utilisation est largement influencée par l’omniprésence de l’entreprise Boeing sur la côte ouest.

Dès lors, on remarque que, influencés par l’environnement, les designers de la côte ouest déploient de plus en plus d’énergie à gommer la démarcation entre intérieur et extérieur. Les exemples sont nombreux : limitation des huisseries sur les baies-vitrées, prolongement des sols vers les terrasses extérieures, multiplication des jardins d’hiver etc.

La tâche n’est pas aisée car il s’agit notamment d’adapter la matière première aux conditions météorologiques. Garvin Froome précise notamment que dans notre région, les toits doivent être relativement pentus afin que la neige et la pluie puissent s’évacuer.

Par ailleurs, loin de l’architecture urbaine des années trente, influencée notamment par le Français Le Corbusier, il ne s’agit plus d’élever les structures mais de les remettre au sol. Le travail sur la côte ouest consiste davantage à ouvrir la maison vers la nature, le zen et de manière générale, l’« organique », permettant ainsi aux designers de célébrer les matériaux naturels.

Cette sensibilité à l’environnement, nécessaire au métier d’architecte en général, doit également être présente dans la relation aux clients. Le design d’intérieur demeure un processus émotionnel, mais surtout intime, où l’artiste doit connaître les désirs de ses clients, leurs habitudes, leurs cultures.

Jody Phillips, gestionnaire principale de l’évènement IDS West, affirme que les designers voient leurs commandes fleurir avec l’arrivée de nombreux clients hong-kongais. La communauté asiatique prédominante sur la côte ouest de la Colombie-Britannique influence ainsi la façon de travailler des designers de la côte nord-ouest.

 Notre collaboratrice Marion Durand en compagnie de Jody Phillips, gestionnaire principale du salon IDS West. | Photo par Charlotte Cami


Notre collaboratrice Marion Durand en compagnie de Jody Phillips, gestionnaire principale du salon IDS West. | Photo par Charlotte Cami

Le design des salles à manger évolue en fonction des cultures : les tables imaginées pour recevoir les invités sont quasiment toutes rondes, mais certaines sont également basses car répondant à des critères culturels importants. Par exemple, certaines familles d’origines japonaises ou coréennes souhaitent pouvoir manger assis par terre. Les designers se doivent dès lors de répondre à ces critères, gardant ainsi la culture occidentale tout en respectant les traditions de certains pays d’Asie.

D´autre part, le feng shui, la croyance originellement chinoise en l’harmonie et l’équilibre dans l’habitation, dicte de plus en plus la conception d’une maison. La planification de l’espace et le placement des meubles deviennent des éléments clés au flux harmonieux d’énergie (ou « chi »). Il est même nécessaire à certains designers de consulter un maître feng shui pour satisfaire les sensibilités des clients.

Les clients d’origines chinoise et malaisienne ont des demandes également spécifiques en matière d’aménagement d’intérieur. Ils préfèrent un style pur, minimaliste et mo-
derne, correspondant au modèle d’intérieur de leur pays d’origine.

Dès lors, au-delà d’un recours artistique et matériel auquel ont accès des familles de niveau social relativement élevé, le design d’intérieur est un autre symbole de la diversité culturelle présente sur la côte nord-ouest du Pacifique.

L’aménagement de notre intérieur est fait pour que chacun puisse perpétuer ses traditions sociales, culturelles et reli-
gieuses originelles, dans une nouvelle région en construction. Les foyers de l’ouest de la Colombie-Britannique deviennent ainsi des véhicules de notre construction identitaire, ayant donc un impact sur qui nous pourrions devenir.