Au tableau : les couleurs de l’enfance au 19e siècle

« Il ne s’agit pas de peindre la vie, mais de rendre vivante la peinture », comme l’a dit le peintre Pierre Bonnard. Et quelle période plus vivante que celle de l’enfance !? La galerie Uno Langmann Limited dévoile du 1er au 30 septembre les enfants du 19e siècle avec l’exposition Time to Play. Les regards et coups de pinceaux de cinq peintres y sont présentés, tout comme le temps de l’enfance, entre jeux et activités quotidiennes de cette époque.

Créée en 1977 par Uno Langmann, amoureux des arts et spécialiste des 18e, 19e et début 20e siècle, la galerie a acquis une solide renommée quant à sa collection d’œuvres d’art de très haute qualité. Cette exposition constitue une nouvelle occasion de le constater, tout comme de découvrir la place inédite de l’enfant en peinture.

Une démarche artistique novatrice

Si, pendant longtemps, le portrait est resté une forme classique et répandue pour représenter l’enfant en peinture, au cours du 19e siècle, une autre approche émerge. Jeanette Langmann, qui travaille avec son père à la galerie, a hérité de sa curiosité pour cette période. Elle explique que c’est durant celle-ci que « le marché de l’art s’est ouvert à ce type de peinture, représentant des enfants de toutes les classes sociales au quotidien ». Les classes moyennes ont commencé à avoir les moyens d’acquérir des œuvres d’art et à passer commande auprès des artistes. Ne plus se contenter des portraits des classes aisées, mais mettre en lumière la part active de l’enfance. Comme regarder par un trou de serrure ce que ces chers bambins expérimentent.

D’après Jeanette, les peintures exposées ont « de la personnalité ». Un choix pointu basé sur différents aspects tels la qualité, la technique, les conditions du sujet. L’apparition de la représentation des enfants dans leurs activités quotidiennes devient commune, révélant les mœurs et les loisirs de chacun. Les classes populaires comme les classes aisées s’exposent. Certains peintres illustrent la vie de famille quand d’autres peignent les enfants jouant sur les places publiques.

L’intimité de l’enfance

Gustave Leonard de Jonghe, Francis Coates Jones, Charles Bertrand d’Entraygues, Luplau Janssen et Sylvius Paoletti sont les « maîtres d’œuvre » de l’exposition. Jeanette affirme que « ce qui est spécifique pour cette époque, c’est que ces œuvres représentent l’intimité ». Scènes de vie familiale, instants de jeux entre enfants. Le courant artistique hollandais est représenté. Celui-ci dépeint la classe ouvrière, donnant des informations sur ses conditions de vie, comme l’absence de certains biens, ou les activités enfantines. C’est toute une époque qui se montre à travers le prisme de l’enfance. C’est également un nouveau regard sur cette enfance. Un des tableaux préférés de Jeanette, A Friendly Game, est signé du peintre américain de renom Francis Coates Jones. Il y dévoile sa femme et ses filles faisant une partie de dames. « J’aime beaucoup les 2 petites filles, leurs robes et tous les détails de l’arrière plan ». Le jeu de couleur et la technique utilisée mettent en valeur les personnages.

A Friendly Game de Francis Coates Jones (1857–1932). | Photo par Uno Langmann Limited

A Friendly Game de Francis Coates Jones (1857–1932). | Photo par Uno Langmann Limited

Autre tableau : A Game of Forfeits, du peintre français Charles Bertrand d’Entraygues, met en scène six enfants jouant aux gages à l’abri des regards adultes. Cette œuvre est un bon exemple de l’apparition des classes moyennes dans l’art au 19e siècle. « C’est un moment d’amusement et d’intimité », souligne Jeanette. Ce type de peinture est tout à fait novateur. Ayant vu de nombreux tableaux, Jeanette Langmann les choisit aisément : « quand vous aimez vraiment une œuvre d’art, c’est évident, et il est facile de la vendre car vous partagez votre enthousiasme ». Et à défaut de les vendre toutes, elle a le loisir de les contempler à la galerie.

De par le choix des différents peintres, « on plonge vraiment dans cette époque, on pénètre dans la vie quotidienne et on voit les enfants tels qu’ils étaient selon leur classe sociale », note Jeanette. Entrer dans l’intimité des enfants du 19e siècle, c’est prêter attention à ce qu’ils sont, à leurs activités, au-delà des considérations sociales. L’exposition se fait témoin d’une époque, mais également du temps de l’enfance. Jeanette Langman conclut avec un sourire « on se réjouit toujours de l’enfance».

 

Uno Langman Limited Gallery
Time to Play
du 1er au 30 septembre
www.unolangmann.com