Promis, juré, craché

Les candidats aux élections fédérales 2015. | Photo par CBC/Reuters

Les candidats aux élections fédérales 2015. | Photo par CBC/Reuters

En campagne électorale, les promesses pleuvent. Elles sont annoncées coup par coup, toujours dans le but d’alimenter le cycle des nouvelles. Aucun parti ne fait exception, chacun voulant gagner en momentum, direction le jour du scrutin.

Au quotidien ou presque, les leaders, toujours dans des lieux bondés de partisans souriants et fébriles, présentent un nouvel engagement. Stephen Harper annonce un nouveau crédit d’impôt, Thomas Mulcair promet un budget équilibré, Justin Trudeau s’engage à davantage de logements abordables.

En campagne électorale, les partis politiques carburent aux promesses. Les promesses, en effet, font partie intégrante de toute campagne. Autant les conservateurs que les néo-démocrates et les libéraux procèdent par promesses pour annoncer leur plate-forme politique. Une à la fois, jamais deux sans trois.

Ces promesses sont souvent plus alléchantes les unes que les autres. En matière de transport en commun, par exemple, Justin Trudeau promet vingt milliards sur 10 ans, Thomas Mulcair promet 1,3 milliard par année pendant vingt ans et Stephen Harper rappelle son engagement d’environ un milliard par année.

Par contre, ces promesses portent également à confusion, pour ne rien dire du cynisme qu’elles alimentent au sein d’un pan de la population.

Par exemple, bien que les mandats soient d’au plus 4 ans – les élections ont désormais lieu à dates fixes au fédéral ainsi que dans de nombreuses provinces –, les partis politiques font néanmoins des promesses sur une décennie, voire parfois deux. Cependant, comment respecter son engagement en 2020 lorsque son mandat est à échéance en 2019 ?

Difficile de donner suite à une promesse, disons-le simplement, une fois le parti relégué aux bancs de l’opposition.

Plus directement, qu’en est-il de ces promesses après la campagne électorale ? Sont-elles de la poudre aux yeux, des paroles vides prononcées dans le but de séduire les électeurs ? Ou les partis joignent-ils plutôt l’acte à la parole ? Bref, les partis politiques réalisent-ils les promesses énoncées en campagne électorale ?

Évidemment, les partis qui perdent leur pari le jour du scrutin ne pourront donner suite à leurs promesses électorales. Les règles du jeu à Ottawa autorisent des projets de loi de la part des membres de l’opposition, or ces derniers sont plus souvent que non défaits, d’autant plus que ces projets sont assortis de limitations financières.

Que dire du parti qui remporte les élections ? Traduit-il ses promesses électorales en projets de loi et lignes budgétaires ? La plate-forme du parti conservateur aux élections fédérales de 2011, par exemple, est-elle aujourd’hui réalité ?

C’est la question que s’est posée une équipe de chercheurs de l’Université Laval. Leurs résultats de recherche sont étonnants : 78% des promesses ont été réalisées, 7% ont été partiellement réalisées et 15% ont été rompues. C’est donc dire que Stephen Harper et le gouvernement conservateur ont, pour l’essentiel, tenu parole. Autrement dit, les promesses des conservateurs étaient sincères.

Le travail de recherche mené est sérieux. L’équipe a compilé 140 promesses dans la plate-forme électorale du parti conservateur aux élections de 2011. Seuls les engagements concrets ont été pris en ligne de compte. Par exemple, les conservateurs promettaient que chaque détenu sous responsabilité fédérale subisse un test de dépistage au moins une fois par année. Cette promesse devint réalité dans le cadre du projet de loi c-12.

Tous les détails sont disponibles sur internet dans le site du Polimètre Harper. L’équipe de recherche a d’ailleurs réalisé un travail semblable pour le plus récent gouvernement du parti québécois et elle suit en ce moment la réalisation des promesses du gouvernement du parti libéral du Québec.

Cela étant, bien que Harper et son équipe aient pour l’essentiel tenu leur pari, les derniers sondages font état d’un recul des conservateurs dans les intentions de vote, comme quoi la réalisation des promesses électorales n’est pas la route vers la réélection.

Rémi Léger est professeur de sciences politiques à SFU.