Les téléséries québécoises ont-elles un public en C.-B. ?

Photos de Radio-Canada

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Si les Guylaine Tremblay et Martin Matte de ce monde convoitent d’augmenter leur nombre de fans, il se pointerait pour eux une niche potentielle du côté de la Colombie-Britannique. Ces comédiens québécois, lauréats du dernier Gala Artis1, semblent avoir la cote auprès du public francophone de la Colombie-Britannique, et ce, comme bien d’autres de leurs pairs. Mais attention… on parle ici d’un public francophone majoritairement québécois !

Y a-t-il des accros aux téléséries québécoises parmi les francophones de la Colombie-Britannique ? C’est ce que La Source est allée vérifier. Loin d’être scientifique comme les sondages de Léger Marketing, Insights West ou INSEE, cette petite enquête populaire2 dessine toutefois des tendances intéressantes. Quel est le top 3 des facteurs favorisant – ou pas – l’écoute des séries télévisées québécoises ?

Audacieuses, intelligentes et originales

« Ça fait du bien de regarder des émissions francophones lorsque l’on vit dans un milieu anglophone. La qualité des téléséries québécoises est supérieure à ce qui se fait du côté anglophone, que ce soit canadien, ou même américain. », lance le Québécois Simon, Vancouvérois depuis 14 ans. Québécois d’origine et ici depuis 12 ans, J.-F. rejoint les propos de ce dernier en affirmant suivre quelques séries comme Les Pêcheurs, Les Parent, Taxi-22 « parce qu’elles sont des séries intelligentes et originales ».

Problème de langue

Bien que ces derniers soulignent la qualité des séries télévisées québécoises, pourquoi certains francophones d’ici ne sont-ils pas au rendez-vous ? « L’accent québécois est difficile; ça prend une bonne concentration. Le sens de l’humour est différent, les expressions sont différentes. J’ai essayé, mais ça me distrait », confie Edda, vivant ici depuis 13 ans. Originaire de Madagascar, elle affirme pourtant avoir essayé de suivre la très populaire télésérie québécoise Unité 9 diffusée à Radio-Canada; une recommandation de ses collègues de travail francophones. Mais il semble qu’Edda rejoint certains ressortissants français puisque :
« Ce drame carcéral intense, émouvant et juste, n’a pas trouvé mieux qu’une modeste diffusion en fin de soirée sur TV5 Monde », écrivait le journaliste français Pierre Langlais de Télérama.fr dans son article intitulé : Pourquoi la France boude-t-elle les séries québécoises ?

La petite vie demeure la seule série télévisée québécoise et canadienne à avoir franchi la barre des quatre millions de téléspectateurs. | Photo de Radio-Canada

La petite vie demeure la seule série télévisée québécoise et canadienne à avoir franchi la barre des quatre millions de téléspectateurs. | Photo de Radio-Canada

La langue s’avère donc un frein pour certains francophones non québécois. Les propos de Julien, un Français résidant à Vancouver, qui ne regarde pas de séries québécoises, le démontrent une fois de plus. « C’est un ami anglophone qui m’a suggéré de regarder la télésérie québécoise Série Noire ». En substance, c’est l’histoire d’un Vancouvérois anglophone, écoutant une série télévisée francophone québécoise sous-titrée en français, qui recommande celle-ci en raison de sa qualité, à son ami francophone de France… Problème de langue à l’horizon ?

C’est culturel !

Comme l’écrit Le Figaro, « les séries télé sont à la fois le reflet d’une société et le miroir de ses aspirations », et il faut l’avouer, les gens s’intéressent particulièrement à ce qui les rejoint. « Même si ça fait un bout de temps [qu’on a quitté le Québec], on est attiré par la culture québécoise », répond Christian lorsqu’on lui demande ses raisons de suivre les téléséries québécoises. Ayant déménagé à Vancouver il y a 32 ans, cet originaire du Québec confirme suivre l’histoire des personnages d’Unité 9 et de Les pays d’en-haut, et ne pas être amateur des séries britanno-colombiennes. Simon, un autre répondant, dit admirer la qualité des productions québécoises. Et de souligner qu’il regarde Les pays d’en-haut, 19-2, et dit avoir réellement apprécié Les Invisibles « Parce que c’est de ma génération et que ça me rejoint ».

Quelle que soit la chaîne, la plateforme ou la taille de l’écran, les créations du Québec sont dévorées au quotidien par les Québécois… surtout au Québec ! C’est culturel ! « J’ai retrouvé un amour pour le français avec la naissance de mes enfants. C’est ma culture. Pour mes enfants, je vais privilégier les téléséries en français », soutient la Québécoise Joane, maintenant à Vancouver depuis 28 ans.

Mais attention, ce n’est pas tous les Québécois d’origine vivant à Vancouver qui se font un plaisir d’être devant le petit écran. Certains admettent sans détour ne pas suivre les téléséries québécoises. Mais, selon les résultats, il s’agit là d’une minorité…

1 Le prix Artis est un prix québécois remis aux artistes du domaine télévisuel, sélectionnés par le grand public par sondage. Il a porté, pendant quelques années, le nom de prix MetroStar – Gala du Public. Le 31e Gala Artis avait lieu le 24 avril dernier sur le Réseau TVA.

2 Recherche dont les interviewés devaient respecter deux seuls critères : 1) être francophone ou francophile, et 2) habiter la Colombie-Britannique depuis 10 ans et plus.

« De la télé, on en mange ! », affirment M. et Mme Tout-le-monde Québécois

En chiffres, lors de la semaine des finales de saison (28 mars au 3 avril 2016) pour la plupart des téléséries/téléromans québécois, près de 2 018 000 amateurs des détenues d’Unité 9 étaient au rendez-vous. Sachant que la population totale du Québec se chiffrait à 8 263 600 habitants en 2015, cette série télévisée chouchou du public semble avoir captivé près du quart de la population québécoise. Ailleurs au Canada, la préférée des téléspectateurs canadiens, The Big Bang Theory, a attiré 4 251 000 téléspectateurs, soit 12 % de la population du pays (35 851 774).

Pour les Québécois nostalgiques

Photo de Radio-Canada

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Ce n’est pas nouveau que les Québécois soient fous de la télé. On n’a qu’à penser à La petite vie qui demeure la seule série télévisée québécoise et canadienne à avoir franchi la barre des quatre millions de téléspectateurs. Également, la télésérie Les Filles de Caleb, dont les cotes d’écoute ont souvent frôlé les quatre millions de personnes. « Le soir de la diffusion, les rues étaient vides, les hôpitaux étaient vides, les magasins aussi », rappelle la comédienne principale, Marina Orsini. « Je pense qu’au départ, les Québécois sont assoiffés de ça, ont besoin de se rappeler d’où ils viennent, pour mieux savoir où ils vont, explique-t-elle. Et cette série-là nous a fait connaître à travers le monde. Combien d’immigrants du Québec me disent que c’est grâce à nous s’ils ont connu la Belle-Province », soulignait-elle l’an dernier en entrevue lors du 25e anniversaire de la télésérie.