Les ayants droit de la 13e Avenue Est et de Point Grey Road !

Utiliser les espaces publics au profit du public. | Photo par Stephen Rees

Utiliser les espaces publics au profit du public. | Photo par Stephen Rees

Deux phénomènes qui ont un certain air de famille peuvent s’observer cet été dans deux quartiers résidentiels de Vancouver : Point Grey et Grandview qui en principe ont plus de différences que de ressemblances. Les résidences de Point Grey Road sont parmi les plus chères de la ville, où la majorité des évaluations foncières tournent autour de 10 à 20 millions et où se trouve la propriété avec l’évaluation foncière la plus élevée de Vancouver, soit 65 millions de dollars ! En contrepartie, les propriétés de la 13e Avenue Est sont plus modestes, leurs prix se situant dans le bas de la fourchette pour les propriétés unifamiliales à Vancouver, autour de 1,5 million de dollars. Voici comment les deux me semblent s’apparenter pour des raisons qui me paraissent comparables.

Prenons d’abord le cas de la portion de la 13e Avenue à l‘est de Victoria près de laquelle le marché fermier de Trout Lake se déroule tous les samedis, du début mai à la fin octobre, de 9 heures à 14 heures. Pour des raisons que je n’arrive pas à m’expliquer, les résidents du tronçon de cette avenue qui va de Victoria à Templeton ont réussi depuis quelques années à convaincre les autorités municipales d’y interdire la circulation automobile et le stationnement les jours de marché. Il en résulte donc qu’à peine une trentaine de voitures exhibant fièrement leur permis temporaire de stationnement y sont garées, excluant ainsi tous les non résidants qui auraient la mauvaise idée de prétendre qu’ils ont aussi le droit, en tant que citoyen de Vancouver, d’y garer leur voiture le temps de faire des courses au marché. Ce qu’ils peuvent faire dans toutes les autres rues avoisinantes…

Je comprends bien que ces propriétaires et résidants veulent pouvoir se garer devant chez eux, même s’ils ont tous ou presque un garage ou un espace de stationnement, ou les deux, qu’ils peuvent accéder par la ruelle, mais qui est sans doute occupé à ranger tout sauf leur véhicule. Il y a déjà une solution juste et équitable pour tous. C’est l’application du principe des permis de stationnement à longueur d’année pour tous sur la 13e à l’est de Victoria, (et qui devrait être appliqué dans tous les quartiers résidentiels de Vancouver) comme c’est le cas à l’ouest de Victoria. Pourquoi ce traitement de faveur ?

Point Grey Road est devenue très célèbre il y a deux ans maintenant quand elle a été fermée à la circulation automobile, sauf pour les riverains, pour en faire une voie cyclable reliant Macdonald à Alma, complétant ainsi une piste cyclable de 28 kilomètres qui mène du Centre des Congrès jusqu’à Spanish Banks. Maintenant il s’agit de rendre la vie des piétons plus agréable et plus sécuritaire le long du même tronçon, en y accomplissant diverses améliorations allant de l’installation d’un nouveau mobilier urbain, d’un nouvel éclairage, à la plantation d’arbres et de verdure, mais surtout à l’élargissement du trottoir de 1,32 mètre. Ceci veut dire la récupération de la lisière entre le trottoir et la propriété privée, sur laquelle plusieurs propriétaires ont planté des haies, des arbres et autre verdure sur cette portion qui appartient à la ville. Les propriétaires touchés ont choisi, en connaissance de cause et au fil des années, l’aménagement paysager de cet espace selon leur goût et leurs moyens parfois considérables avec l’accord de la ville, tout en sachant que la journée où cette dernière aurait besoin de cet espace ils n’auraient pas de recours contre le retrait de cette verdure sinon que d’alerter l’opinion publique, ce qu’ils ont fait allègrement, en criant haut et fort à qui voulait les écouter que la ville se préparait à sacrifier leurs haies, leurs arbres ou leurs fleurs, au profit d’un trottoir en béton.

Mais voilà, le principe de privilégier la verdure au profit du béton n’est pas un mauvais principe. Mais le principe d’utiliser les espaces publics au profit du public qui de surcroît en est le propriétaire est encore mieux. Les propriétaires touchés crient au scandale ! Vous rendez-vous compte ? Quelle audace, oser nous enlever nos devantures verdoyantes privées pour faciliter l’accès et contribuer à la qualité de vie des autres citoyens qui souhaitent aller s’y balader ?

C’est un peu comme refuser à ses concitoyens la possibilité d’aller se garer près du marché Trout Lake, pour ne pas être dérangé par toutes ces voitures qui de toute façon ne viennent que pour profiter du parc et du marché, pendant que tous les autres résidants des autres rues autour, eux, les reçoivent sans trop rechigner.

Dans les deux cas, vive l’esprit de communauté !