« Macbeth », une adaptation culturelle et universelle 

Photo par Nicky Newman

Du 16 au 21 janvier, la Vancouver Playhouse vous invite à une adaptation surprenante et controversée de Macbeth. Un classique revisité à la sauce audacieuse du metteur en scène et dramaturge sud-africain Brett Bailey et sa compagnie, Third World Bunfight.

Brett Bailey propose une version contemporaine de cet opéra de Verdi, inspiré de la tragédie de Shakespeare, pour dénoncer le néo-colonialisme au Congo.

Après une excellente réception à travers l’Europe, la pièce sera jouée pour la toute première fois au Canada, à Vancouver, dans le cadre du Festival PuSh.

Une décision culturelle, voire même multiculturelle

Il Centro, le Centre culturel italien de Vancouver, ne cesse de mettre en avant des productions culturelles et parfois décalées en rapport avec des initiatives italiennes, comme l’an dernier avec le spectacle au titre évocateur, Green Porno. Cette année, le centre a décidé de collaborer avec l’Opéra de Vancouver pour présenter au public l’adaptation de Macbeth mise en scène par Brett Bailey et composée par Fabrizio Cassel à partir de l’œuvre originale de Giuseppe Verdi.

« L’Opéra de Vancouver voulait organiser un événement spécial pour débuter la saison en coïncidant avec PuSh, alors nous avons rejoint les deux groupes en tant que partenaire communautaire pour promouvoir l’opéra », explique Mauro Vescera, directeur général d’Il Centro.

Un enfant soldat dans la version de Macbeth de Brett Bailey. | Photo de Morne van Syl et Brett Bailey

Certes, le rapport avec l’Italie est évident – c’est la langue de Verdi, de l’opéra en général, et de cette pièce en particulier –, mais la pièce a une dimension culturelle et internationale bien plus ample, comme le résume Mauro Vescera : « il s’agit d’un groupe sud-africain, qui nous propose son adaptation d’un opéra italien tiré d’une pièce écossaise, jouée à Vancouver, donc je pense que l’on devrait avoir un public assez intéressant… »

Une combinaison pour le moins inattendue, mais qui ne semble pas dérouter Brett Bailey : « les artistes impliqués sont des chanteurs d’opéra très qualifiés, ils parlent italien et allemand. Le français est la langue officielle du Congo, mais musicalement cela ne marchait pas vraiment. De plus, les interprètes ne parlent pas français, ce qui aurait été difficile. Bien qu’ils aient différentes origines, ils maîtrisent tous leur art en italien donc cela a été une décision plutôt facile à prendre. »

Mauro Vescera explique avec fierté que cette œuvre multiculturelle et collaborative transcende les frontières et barrières linguistiques pour rapprocher les cultures : « nous voulons partager notre culture, et l’une des meilleures façons de le faire est en partageant nos expertises, notre public, nos ressources, afin d’apporter à la ville un nombre plus important de ces événements culturels. »

Une œuvre intemporelle qui ose briser les conventions classiques

Brett Bailey raconte : « J’étais intrigué par ce qu’il se passe au Congo. En Afrique du Sud, nous avons des milliers de réfugiés congolais donc je voulais vraiment creuser et comprendre comment et pourquoi ils en étaient arrivés là. » C’est en en apprenant plus sur la guerre au Congo qu’est née l’idée de transposer la situation dans le cadre de Macbeth. Le dramaturge avoue qu’il n’est ni habitué ni grand amateur d’opéra. Il l’utilise comme support, le déforme et l’actualise tout en gardant la tristesse originelle de l’histoire de Macbeth.

Il dévoile que le public peut s’attendre à un spectacle humoristique extrêmement visuel et borderline, un va-et-vient incessant entre tragédie classique et farce africanisée chorégraphiée au rythme des percussions. La pièce ultramoderne sera offerte avec des surtitres dans un anglais populaire « cru, de base, que tout le monde peut comprendre » pour non seulement aider à la compréhension, mais aussi apporter une dimension plus réelle au récit.

Outre le côté artistique, Brett Bailey aimerait que l’on retienne que « des choses terribles se produisent en Afrique centrale, et nous, consommateurs, sommes complètements passifs. Six millions de personnes ont été tuées en Afrique sur une période de 20 ans, et presque personne ne le sait. L’histoire de Macbeth est universelle. J’aurais pu choisir n’importe quel autre pays, transposer cette histoire dans n’importe quelle autre situation, aux États-Unis même. »

Brett Bailey a choisi le Congo parce que c’est une histoire qui le touche directement, mais inévitablement chacun peut y voir un parallèle avec notre société, notre faim destructrice de pouvoir. Avec son art, il prouve que l’on peut mêler classique et contemporain, tragédie et kitsch, fiction et réalité universelle.

 

Macbeth, du 16 au 21 janvier 2017 au Vancouver Playhouse