Comment les francophones célèbrent-ils Pâques ?

Le dimanche 1er avril, il ne sera pas uniquement question de jouer des tours, mais également de spiritualité et de gourmandise avec les célébrations de Pâques. La deuxième fête chrétienne la plus importante après Noël rassemblera les fidèles au sein des églises. Quant aux moins pratiquants, voire non-croyants, ils se réuniront en famille. La communauté chrétienne francophone de la région métropolitaine de Vancouver s’y prépare, non sans se buter à certains obstacles. Un sacerdoce mettant leur foi à l’épreuve.

Pâques demeure une fête pour les francophones dépassant le fait religieux. Les racines catholiques de bon nombre de francophones s’y expriment. C’est un moment de réunion et de partage attendu. Bien que ce soit important, certaines caractéristiques de la communauté francophone du grand Vancouver, telles que la démographie, l’exercice de la foi, la langue, expliquent les difficultés des chrétiens à trouver une église où pratiquer leur foi, à moins que ce ne soit l’inverse.

Pâques et ses traditions religieuses

« Le dimanche de Pâques, nous célébrons la résurrection du Christ et la lumière qu’il a apportée au monde, c’est une grande fête », explique le père Claude, de l’église Notre-Dame de Fatima à Coquitlam. Le Carême,
une période de quarante jours correspondant au jeûne de Jésus dans le désert, précède Pâques. Six semaines durant lesquelles les chrétiens sont appelés à changer leurs habitudes, à bénéficier d’un temps d’introspection pour devenir meilleurs. Une sorte de renaissance à l’image de celle du Christ.

La semaine sainte précédant Pâques débutera le 25 mars avec le dimanche des Rameaux, puis deux journées que sont le jeudi saint, commémorant le dernier repas du Christ, et le Vendredi saint, jour de sa crucifixion. La tradition veut que ce dernier soit un jour de jeûne. Le samedi étant la veillée pascale pour allumer le feu nouveau et baptiser des adultes s’il y en a.

Le jour de Pâques, les églises Notre-Dame de Fatima et Saint-Sacrement à Vancouver donneront une messe entièrement en français, contrairement aux autres célébrations, mais habituelle pour un dimanche. Nul doute que davantage de francophones feront le déplacement.

Fille de l’une des membres de l’Association des mamans francophones de Vancouver et de Colombie-Britannique.

Comme pour Yieldy, mauricienne habitante de Surrey et arrivée en Colombie-Britannique il y a treize ans, pour qui Pâques est une vraie fête : « Après la messe, la famille se retrouve chez l’aîné pour un déjeuner qui dure jusqu’au dîner, un bon repas avec de la viande pour célébrer la résurrection ». Une fête où les petits plats sont mis dans les grands, où sa famille danse, se rencontre. À l’image de beaucoup de familles croyantes pratiquantes.

Pâques, pour les grands et les petits !

La rareté des messes en français

Une pratique de la foi qui s’essouffle, une langue minoritaire, une communauté dynamique et principalement âgée mais qui s’étiole, les distances, voilà de quoi expliquer la situation. Un constat partagé par les paroisses et leurs paroissiens. L’église constitue souvent un repère pour les nouveaux arrivants. Le Père Miguel, de l’église Saint-Sacrement, classée héritage francophone de la province malgré le fait qu’elle ne soit plus nationale, explique le lien direct créé entre la communauté chrétienne francophone, l’Église et la langue. Entre gage de conservation culturelle et joie de vivre sa foi en français.

À leur arrivée, Yieldy et sa famille ont cherché une église car « on se sent renouer avec ce qu’on a quitté à l’Île Maurice », sans pour autant exiger que ce soit en français, tant ces messes sont difficiles d’accès de par leur rareté. Elle y participe seulement trois à quatre fois par an, à regret. Une caractéristique commune à la majorité des chrétiens francophones, qui privilégient les messes en anglais, langue de leur quotidien désormais.

Alors comment retenir les fidèles au sein des églises chrétiennes francophones ? Faut-il conserver la langue ou la foi ? Certains se posent la question, bien qu’il apparaisse évident que de vivre sa foi en français réponde aux besoins des chrétiens. Toutes ces églises donnent des messes en français plusieurs fois par semaine, en plus du dimanche.

Certains se rendent alors à l’église Vieille Catholique à Vancouver où le père Gérard exerce, proche de l’église chrétienne et aux mêmes célébrations, notamment Pâques. Venu de la Gaspésie,
il prépare de nouveaux prêtres asiatiques à parler français pour assurer sa relève. À l’église Saint-Sacrement de Vancouver, le Père Miguel, espagnol, apprend toujours le français. Le père Claude, originaire du Congo, est arrivé pour s’occuper des chrétiens francophones. Toutes les deux semaines le dimanche après-midi, il célèbre une seconde messe franco-africaine « avec des chants africains, pour toutes les communautés d’Afrique », un pas en faveur des chrétiens. Cette année, le dimanche des Rameaux sera d’ailleurs célébré lors du Festival du bois, un accès à la communauté francophone et un rappel de certaines racines chrétiennes. Un autre pas dont se félicite le père Claude.

Savoir rassembler

Pâques représente aussi une fête familiale pour beaucoup de francophones qui en font une fête désacralisée. Bénédicte, de l’association des Mamans francophones de Vancouver et de Colombie-Britannique, organise chaque année une rencontre attendue avec une cinquantaine de personnes autour d’un repas à la fortune du pot et des activités pour les enfants, avec les traditionnels œufs en chocolat. Mais pour cause de calendrier chargé cette année, aucune rencontre ne sera prévue, ce qu’elle regrette. Les prêtres comprennent qu’il est nécessaire de faire un pas en faveur de la communauté francophone malgré son peu de pratique religieuse. Le père Miguel, qui admet que « comme en Europe, les gens ne vont plus vraiment à l’église », constate que de jeunes familles francophones et francophiles arrivent peu à peu.

Un café après la messe est préparé chaque dimanche pour faire se rencontrer la communauté. Une démarche qui plaît beaucoup. Yieldy, comme nombre de chrétiens francophones, notamment en provenance d’Afrique et du Québec, en est en demande, bien que les rencontres soient compliquées à organiser dans un cadre religieux. Ce qui n’entame en rien la ferveur de Pâques, une célébration où « la joie est dans le cœur de tous ».