En temps de pandémie… de l’ombre à la lumière…sucrée

Que peut-on faire lorsque chaque personne dans notre entourage pourrait être porteur d’une terrible maladie ?
Nous devons continuer d’essayer de vivre nos vies le plus normalement possible. Je suis un étudiant à UBC et pendant le Temps d’Avant (c’est le nom que j’ai donné au temps avant cette pandémie), j’avais une vie d’étudiant bien remplie. Il y avait des fêtes toutes les fins de semaine, je révisais mes cours avec mes amis à la bibliothèque, et surtout je ne me méfiais pas lorsque j’allais au supermarché ou si je serrais la main de mes amis. Le Temps d’Avant était un monde beaucoup plus insouciant qui n’avait pas encore ressenti les effets dévastateurs de la COVID-19.

Lorsque la pandémie a commencé, j’ai beaucoup réfléchi à la peur et à l’appréhension que je ressentais au quotidien. Ces émotions m’ont rappelé un épisode d’une émission de télé que j’aimais regarder quand j’étais enfant, Doctor Who. Cette émission raconte l’histoire d’un extraterrestre qui s’appelle le Docteur, et qui voyage dans le temps. Une de ses aventures l’amène dans la plus grande bibliothèque de l’univers où le Docteur découvre que celle-ci a été envahie par des monstres de l’ombre qui s’appellent les Vashta Nerada. Ces monstres microscopiques vivent en essaims dans n’importe quelle ombre projetée par le soleil. Si quelqu’un a la malchance d’être touché par une des ombres des Vashta Nerada, il est dévoré instantanément. Le Docteur passe cet épisode entier à fuir les ombres, craignant quelque chose qu’il ne peut pas voir.

Que sont ces ombres ? Les frayeurs éprouvées par le Docteur face aux Vashta Nerada sont des émotions que tout le monde ressent de nos jours. Ces monstres de l’ombre pourraient m’atteindre sans que je le sache. Faire des choses banales comme me promener ou toucher une poignée de porte pourrait avoir des conséquences désastreuses.

Le 13 mars a marqué le début d’une période de grand changement dans le monde. Dans un sens, la vie était un peu moins pimentée. Mon expérience universitaire a été gravement entravée au point que chaque jour ressemblait à une fin de semaine. Souvent, lorsque je me réveillais le matin, je demandais à mes colocataires ce qu’ils avaient de prévu pour la journée et ils me disaient, « Pas grand-chose, Liam. » Cette perte quasi totale d’autonomie me dérangeait de façon extrême. Tout d’un coup, je suis redevenu un enfant face aux caprices de pouvoirs plus grands que moi, et incapable de faire grand-chose pour contrôler ma vie. Ma famille étant à cinq mille kilomètres de moi, il fallait que je gagne en maturité rapidement et que je me prenne en main, car personne ne viendrait m’aider si je tombais malade. Je savais que les ombres attendaient que je fasse un mauvais pas. Donc je suis resté à la maison et j’ai grandi.

Trouver des choses à faire. Heureusement, je n’étais pas seul pendant cette pandémie. L’arrivée des ombres a créé des liens indestructibles entre moi et les amis avec qui je vivais. Nous avons vécu une des périodes les plus bizarres de nos vies en commun et nous avons grandi ensemble. Nous avons passé des journées entières cloués aux jeux vidéo et à jouer au foot. Cependant, pour quelqu’un comme moi, rester à la maison n’a pas été la chose la plus facile du monde. Dans le Temps d’Avant, je me délectais de m’asseoir dans les cafés en écoutant de la musique, prendre le bus pour aller en cours ou me balader en ville. Désormais privé de ces sorties, je me suis rendu compte à quel point ces aspects de ma vie étaient importants pour moi. Comment pourrais-je combler ce vide dans ma vie ? J’ai commencé à reprendre de nombreux petits passe-temps pour m’occuper. Je n’allais pas m’ennuyer pendant cette pandémie, ce serait une période d’apprentissage même si je n’allais plus à l’université.

J’avais maintenant le temps d’explorer le monde de la pâtisserie et de m’entraîner en photographie. Si la vie était un peu moins pimentée, je n’avais qu’à y rajouter un peu de sucre pour la rendre plus douce. Au grand plaisir de mes amis, c’est exactement ce que j’ai fait. Je transformais périodiquement notre cuisine en pâtisserie d’où je sortais des beignets, des gâteaux au fromage et toutes sortes de sucreries. Peu importe l’état du monde, je ne serais pas empêché de trouver un peu de lumière dans ces ombres.