L’année damnée

2020 touche à sa fin. Ouf ! Ce soupir de soulagement n’est pas immérité. Je sais, il ne faut pas vendre la peau de cette année avant de l’avoir enterrée mais, en toute confidence, je peux vous le dire, j’ai hâte qu’elle finisse. Je meurs d’impatience de lui crier : adieu et bon débarras. Elle nous en a trop fait voir.

À propos : voici, à trois semaines et quelques poussières de la nouvelle année 2021, la dernière parution du journal cette année. Le temps de faire le bilan; la tradition l’exige. Je vous préviens d’avance, vous vous en doutez, ce constat n’est pas fameux. Il se résume en un mot, un virus : COVID-19.

« J’avais pourtant fondé tant d’espoir à la naissance du nouvel an. Avec un si beau chiffre, 2020… » | Photo par Kelly Sikkema

J’avais pourtant fondé tant d’espoir à la naissance du nouvel an. Avec un si beau chiffre, 2020, je me suis dit que ces deux 20 à la queue leu-leu devraient nous donner un très bon cru. J’y ai cru. Un an prometteur, ai-je pensé. La réalité, vous en conviendrez, fut tout autre. Nous avons vécu un annus horribilis, courtoisie de la COVID-19 pour ne pas la nommer. Madame, peu satisfaite de son séjour en Chine où elle fit ses premières armes à la fin de l’année précédente, décida de partir à la conquête du monde, histoire de nous enquiquiner, de nous nuire, de nous faire peur et ultimement de nous détruire. Entreprise, en partie, réussie. D’épidémie elle est passée, de manière impromptue, à pandémie, une ennemie à qui, depuis, nous faisons la guerre. Oui, nous sommes toujours en guerre contre cette adversaire tenace et maléfique qui nous en veut à mort.

À l’origine, j’ai fait semblant de l’ignorer. Je ne tenais pas à lui accorder trop d’importance. On m’avait pourtant prévenu : cette maladie est dangereuse, à éviter à tout prix. J’ai depuis appris ma leçon. Je m’arrange dorénavant pour la maintenir à distance tel que recommandé. De sa future fin misérable, je m’en lave les mains et je porte un masque pour qu’elle ne puisse me voir venir. Je l’observe et remarque qu’elle s’infiltre méthodiquement d’un peu partout : mariages, funérailles, lieux de culte, que sais-je ? Elle s’invite dans les familles pour gâcher les réjouissances. Une horreur. Elle s’en prend à nos loisirs, à nos plaisirs, gâche nos fêtes, se paie nos têtes. Et dire que l’on risque de passer encore une bonne partie de l’an prochain en sa compagnie. « Rien que d’y penser j’en ai la nausée », nous fait savoir, de sa tombe, Jean-Paul Sartre.

L’importance de la COVID-19 dans nos vies, tout au long de 2020, pourrait lui mériter le titre de personnalité de l’année décerné par le magazine Time. Cette distinction devrait rendre Donald Trump furibond, lui qui a tout fait pour l’obtenir, se montrant, en fin de parcours, plus odieux que jamais. À préciser qu’il n’est pas nécessaire de faire preuve d’un comportement honorable pour recevoir cette marque de reconnaissance. Hitler (1938) et Staline (1939 et 1942) ainsi que l’ordinateur (1982) ont obtenu ce titre. Pas de quoi se pavaner.

La COVID-19 marquera notre millénaire de son empreinte indélébile et fera de 2020, en tant que période de crise, une année référence. Elle a contribué à une série d’annulation d’événements culturels, artistiques, politiques et sportifs sur lesquels nous comptions tous. Une sale teigne. Heureusement, elle n’a pu empêcher l’élection de Joe Biden à la présidence des États-Unis. Il aurait manqué plus que ça. Elle a aussi servi d’excuse à Justin Trudeau, en cherche de maturité ou de crédibilité, de se laisser pousser la barbe.

Il s’est avéré, les experts en la matière enfin l’admettent, que sur la COVID-19 nous possédions, à l’origine, très peu d’informations. On y est allé au pifomètre. Puis au fil des jours et à l’annonce des ravages qu’elle commettait sur tous les continents, il a fallu se rendre à l’évidence que : nous avions affaire à une adversaire de taille et qu’il n’était plus question de la ménager ou de la prendre avec des pincettes. Fini le laxisme dont nous avions fait preuve au début. Il fallait prendre le taureau par les cornes et lui faire sa fête pensèrent donc, un peu tardivement, une fois dans l’arène avant la mise à mort, les picadors de la médecine et les toréadors de la politique.

L’estocade pour le moment n’a pas encore eu lieu. Les vaccins arrivent paraît-il. J’espère qu’ils ne se feront pas trop attendre. Nous allons devoir faire preuve de patience. Je commence à en manquer.

Tous ces déboires, néanmoins, ne doivent pas me faire oublier de vous souhaiter, comme de coutume, malgré les circonstances, des joyeuses fêtes de fin d’année avant de se retrouver l’an prochain, je l’espère, sains et saufs.