MashUp, plus qu’une exposition d’art moderne

Pelicans Staring at Woman with Nose Bleeding par John Baldessari. | Photo par John Baldessari

Pelicans Staring at Woman with Nose Bleeding par John Baldessari. | Photo par John Baldessari

Présentée jusqu’au 20 juin, l’exposition intitulée MashUp est la plus grande jamais présentée par la Vancouver Art Gallery (VAG). Elle a pris plus de trois ans pour se réaliser et elle s’étend sur quatre étages, dans tous les recoins de la galerie. Mais qu’est-ce au juste que ce mashup ?

Il s’agit tout simplement d’un mode de création artistique qui explore le collage et l’association d’images, d’objets, de sons et de mots souvent trouvés ici et là que des artistes comme Pablo Picasso et Georges Braque ont commencé à utiliser au début du 20e siècle.

L’exposition retrace les différentes formes que ce mode de création a prises depuis ses débuts, du cubisme à l’art contemporain numérique. On s’y intéresse aux arts visuels, mais aussi à l’architecture, au design, à la mode, à la musique et aux installations de toutes sortes.

Constamment influencé par les changements technologiques, ce mode de production, d’abord artistique, est devenu dominant dans notre culture mais aussi dans notre mode d’existence.

Un grand pari risqué
Le principal défi « muséographique » : présenter une exposition à thème qui ne soit pas un mélange hétéroclite d’objets présentés « pêle-mêle » de façon trop relâchée. Le risque était de perdre le fil et l’âme du MashUp en submergeant les spectateurs dans un environnement conceptuel et artistique trop vague.

 

Untitled par Hannah Hach. | Photo par Hannah Höch

Untitled par Hannah Hach. | Photo par Hannah Höch

Au final, le pari est gagné, même si on peut se trouver ici et là désorienté par les différentes pistes qui nous sont présentées. La chronologie et l’évolution technologique de ce mode de production divisée en quatre sections/planchers différenciés par des titres/époques a prévalu et aide beaucoup à bien structurer l’exposition. Les flâneurs s’y sentiront à l’aise.

Des œuvres cérébrales ?
Une autre difficulté tenait au fait que plusieurs œuvres, en particulier les readymades (dont
l’urinoir de Marcel Duchamp) et les plus contemporaines, font appel à l’intellect. Comment, dès lors, permettre aux visiteurs moins habitués à l’art contemporain (installations/sculptures) d’entrer dans une relation qui soit une expérience enrichissante ?

La présence de textes descriptifs/explicatifs intellectuellement accessibles jouent très bien leur rôle : ils « ouvrent » les œuvres les plus difficiles d’accès et renseignent sur les motivations de leurs créateurs.

Pour Bruce Grenville, co-commissaire de l’exposition, la présentation des oeuvres qui tablent sur des idées « ne doit pas être seulement faite d’une façon intellectuelle, mais aussi affective, dans le but de provoquer une réponse émotionnelle. Une bonne présentation visuelle peut avoir un impact affectif aussi intéressant que l’impact intellectuel ». Un effort a donc été fait pour créer des « coups » visuels stimulants. Cependant, peu d’attention est accordée aux différentes motivations esthétiques, politiques ou idéologiques qui sous-tendent les oeuvres présentées.

Selon Bruce Grenville, « il est de plus en plus important d’aider les gens à naviguer dans le monde des images qui les entourent, à être conscients de la construction et de la signification de ces images ».

MashUp s’inscrit dans cette volonté de faire connaître la culture visuelle de notre temps et ses origines. On y fait de l’éducation à la littératie visuelle.

Visiteurs ouverts

Cette exposition requiert un engagement et une ouverture d’esprit de la part des visiteurs. Les critères d’appréciation de peintures du début du 20e siècle ne sont pas les mêmes que ceux dont on a besoin pour apprécier certaines installations/sculptures contemporaines du premier étage de la galerie. Celles-ci doivent être « domestiquées » en cherchant des qualités novatrices, énigmatiques et intrigantes sur le plan social ou politique. Cette recherche peut contribuer à remettre en question nos valeurs, nos façons de penser et à s’interroger sur la signification de l’art dans le monde d’aujourd’hui.

Pour visiter l’exposition en suivant une ligne chronologique, il faut commencer au quatrième étage et descendre. À l’inverse, pour voir tout de suite les nouvelles formes numériques et contemporaines du MashUp, il faut commencer par le premier étage et monter.

Un modèle pour des expositions ultérieures

L’envergure conceptuelle et physique de MashUp s’inscrit dans le plan de développement de la VAG et de la construction d’une nouvelle galerie. Deux fois plus grande, elle pourrait permettre des expositions à plus grande échelle et plus complexes. MashUp a permis au personnel d’acquérir une expérience plus complexe : elle devrait servir de modèle pour des expositions ultérieures, possiblement dans une nouvelle galerie.

Bruce Grenville, qui est à l’origine du projet, avoue que l’accent mis sur l’ampleur de l’exposition est aussi un message à la population et aux différents niveaux de gouvernement : « La VAG prouve par cette exposition qu’elle peut présenter de grandes expositions d’envergure internationale. »

Pour le conservateur, « le plus grand défi de la VAG sera de bien comprendre et répondre aux changements démographiques, culturels et socio-économiques de Vancouver. Le nouvel édifice pourrait bien devenir le symbole d’une nouvelle ère pour Vancouver et sa galerie d’art ».

 

Vancouver Art Gallery – MashUp
http://vanartgallery.bc.ca/the_exhibitions/exhibit_mashup.html