Le fou de l’info

Il faut de tout pour faire un monde. Et mon monde est un fourre-tout d’amies et d’amis de tous genres pour qui j’éprouve beaucoup d’affection. Tous font preuve d’un esprit aussi vif que fin. Un grand nombre d’entre eux se distinguent par leur audace, leur curiosité et leur goût pour l’aventure. D’autres, pas tous, s’intéressent au monde des arts et à celui de la politique. Quelques uns d’entre eux, même, à mon grand désarroi, ont voté pour Harper. La plupart ont fait élire Trudeau. Certains, des je-m’en-foutistes, se sont abstenus de voter. L’un d’entre eux, suite à mes reproches, m’a suggéré de m’occuper de mes oignons avant de m’envoyer paître. Depuis, je me tais. J’obtempère comme disait ma mère.

Le président Obama et sa femme à La Havane, Cuba. | Photo de IIP Photo Archive

Le président Obama et sa femme à La Havane, Cuba. | Photo de IIP Photo Archive

Parmi tout ce beau monde qui m’entoure, j’aimerais attirer l’attention, en particulier, sur un individu que je côtoie régulièrement, qui passe son temps à éplucher les nouvelles et autres informations relayées par les médias qu’il consulte ad nauseam. Un vrai fou de l’info. Afin de protéger son identité, appelons-le Toto, tout simplement, pour les besoins de la cause.

Cet ami proche (il habite mon quartier), à ses heures perdues, écrit des billets pour Blog-à-part (le 160 millionième blog du genre). En fait, c’est un blogueur blagueur. Parfois méchant, souvent cynique, rarement subtil, jamais habile et occasionnellement cruel, comme en témoignent ces quelques extraits d’articles qui suivent, commentant l’actualité de ces quinze derniers jours.

Sur la question du déficit, Toto l’avisé, en gros, faisant preuve d’une logique implacable, a écrit ceci : « Le gouvernement Libéral de Justin Trudeau n’a pas attendu le 25 décembre pour enfiler le costume et les bottes du Père Noël. Dans sa hotte, une série de beaux cadeaux destinés à ravigoter l’économie canadienne tout en rectifiant certaines carences et déficiences laissées derrière par le feu gouvernement Conservateur ».

Et d’ajouter, délirant : « Le déficit nous redonne de l’espoir. L’espoir fait vivre. Vivons donc au-dessus de nos moyens car nous en avons les moyens » et de conclure « le gouvernement libéral s’est fixé un objectif : faire des Canadiens des citoyens heureux et endettés. C’est mieux que d’être soumis, ignorés et désolés ».

Commentant les horribles attentats perpétrés par des djihadistes barbares à Bruxelles et à Lahore, Toto l’effronté imagina une virée au Paradis où les grands prophètes, tous plus « cool » les uns que les autres, se la coulent douce. Arrivent les terroristes kamikazes de Bruxelles qui viennent frapper à la porte du Paradis afin de réclamer les vierges qui leur sont dues sans savoir que depuis l’arrivée de Wolinski (voir google) au jardin enchanté, elles ne sont plus aussi vierges qu’elles ne l’étaient. Devant le refus de les laisser entrer, une belle échauffourée s’ensuivit. Cabu, qui passait par là, s’adressant à leur prophète venu les rencontrer, lui demanda «dis-moi c’est toujours aussi dur d’être aimé par des cons ? ». Le prophète, lassé et désespéré de tous ces crimes commis en son nom, fit la moue, hocha la tête et se lamenta tout en s’éloignant. Jésus le prit dans ses bras et le consola.

Observant l’affaire Ghomeshi, Toto l’authentique s’est contenté, chose rare, d’être succinct, sans doute influencé par la pratique du « haiku » japonais qui a donné ceci : « Verdict : non coupable. Je me sens coupable, je croyais qu’il était coupable. Mea culpable ».

Au sujet de la visite de Barack Obama à Cuba, Toto l’emmerdeur s’en est tenu à ces lignes : « Fidel à sa promesse, le président des États-Unis s’est rendu à Cuba avec sa famille, mettant ainsi fin à une ridicule animosité, entre les deux pays, qui n’avait que trop duré ». Puis, de poursuivre, moqueur : « Les mauvaises langues prétendent que Barak Obama, avec sa famille, tenaient à visiter l’île avant la totale normalisation des relations, craignant un futur afflux insupportable de touristes américains vers Cuba la castriste. Sans oublier la possibilité que Donald Trump n’y bâtisse un hôtel de mauvais goût à la hauteur de sa mégalomanie ».

Apprenant le décès de Rob Ford, l’ancien maire de Toronto, Toto le blogueur sans pitié, auteur de publicité pour marque de véhicules tout-terrain, ne put s’empêcher d’écrire ceci, l’anglais étant son fort : « Ford wasn’t built to last » ou encore, plus irritant : « Rob Ford a craqué ».

La Première ministre de la Colombie-Britannique fit elle aussi les frais de son humour décapant lorsque Toto, le souffre-douleur, apprit, à sa grande stupeur, qu’afin de renflouer les caisses de son parti, Mme Christy Clark, je n’invente rien, était prête à octroyer des rencontres avec elle, en tête à tête, moyennant le versement d’une certaine somme d’argent qui peut varier selon la tête du client. Notre blogueur a saisi l’occasion pour rappeler que ce genre de commerce porte un nom bien spécifique connu de ceux qui fréquentent ou non les quartiers malfamés.

Sacré Toto, il n’en manque pas une pour se faire détester.

Bref rappel : tout cela a été écrit un 1er avril.