L’Italie fait entendre ses voix à l’unisson

Le VIFC et le chœur suisse à l’occasion du concert annuel du chœur suisse de Vancouver le 13 juin 2015 au Vancouver Alpen Club. | Photo par Bernie Strotmann

Le VIFC et le chœur suisse à l’occasion du concert annuel du chœur suisse
de Vancouver le 13 juin 2015 au Vancouver Alpen Club. | Photo par Bernie Strotmann

« Promouvoir la musique folklorique italienne au sein de la communauté italienne et de la société canadienne en général », voilà ce qu’écrivait Gordon Campbell, ancien premier ministre de la Colombie-Britannique, à l’occasion du 40e anniversaire de l’ensemble vocal Vancouver Italian Folk Chorus (VIFC). Créé en 1970 par le père Bernard Rossi, ce chœur s’attache toujours à partager son héritage par le biais de nombreux concerts et productions d’enregistrements.

C’est d’ailleurs ce qu’il réalisera à nouveau le 4 juillet prochain en proposant un truculent voyage musical de deux heures au Italian Cultural Centre de Vancouver. « Il y aura de la belle musique italienne et d’excellents solistes. », assure l’actuel président Joseph Pighin, évoquant notamment les fameux opéras Tu sei bella de Verdi, È il ciel sereno de Rossini ainsi que la très populaire chanson vénitienne Barcarola, ou encore l’indémodable Flying free.

Plaisir et nécessité de partager une culture commune

Né en Italie du nord, Joseph Pighin, membre du chœur depuis sa création, est arrivé à Vancouver en 1951 à l’âge de 15 ans pendant la seconde grande vague d’immigration italienne. Il raconte : « Quand nous sommes arrivés ici, il n’y avait pas grand chose à faire. On allait à l’église. Puis, les gens se sont mis à se rassembler et à créer différentes associations. À cette époque, la ville comptait trois chœurs italiens. Le père Bernard Rossi a alors proposé de créer un seul grand ensemble ». Rapidement, il est devenu mixte. « Au début, c’était une chorale d’hommes mais deux ou trois ans plus tard, les femmes nous ont rejoints. », précise le président. En 1974, l’ensemble se scinde en deux chorales distinctes, le VIFC et l’Italian Choir of BC (ICBC); chacune ayant trouvé sa place dans le paysage culturel vancouvérois.

Un ensemble vocal inclusif

Gordon Campbell avait rappelé en 2010 : « La souvenance de l’héritage culturel de nos concitoyens est une part importante de la construction de notre futur collectif. Notre multiculturalisme a joué un rôle important dans le développement de notre grande province et est une source de fierté et de force pour les habitants de la Colombie-Britannique ». C’est aussi la fierté du VIFC qui, contrairement à l’ICBC exclusivement composé de membres d’origine italienne, se veut un ensemble inclusif et diversifié. Une spécificité de longue date comme le confirme Joseph Pighin : « À l’époque où nous étions une cinquantaine de membres, treize nationalités différentes chantaient ensemble ! Aujourd’hui, nous sommes toujours très diversifiés, mais nous sommes moins nombreux ». Le chœur, dirigé par l’Autrichienne Helga Belluz, compte désormais 33 choristes dont 4 Autrichiens, 6 Chinois, 2 Argentins et 2 Canadiens. Il est de plus accompagné au piano par Eric Sitkowiecki, d’origine polonaise. L’ensemble a profité de cette diversité culturelle pour apprendre des chansons en langue française, allemande ou, encore plus étonnant, la traduction en langue chinoise de La sui monti dell’est issu de l’opéra inachevé Turandot de Puccini ! Très souvent, le VIFC collabore avec d’autres chorales, enrichissant ainsi son répertoire qui approche désormais la centaine de morceaux.

L’amitié et le patrimoine culturel à l’épreuve du temps

Durant des décennies, le VIFC s’est produit dans les lieux les plus prestigieux de Vancouver, à travers le Canada et à l’occasion d’événements importants comme la première visite du pape Jean-Paul II à Abbotsford en 1984 ou la célébration du nouveau millénaire. « Les liens d’amitié, l’héritage commun et l’amour de la musique ont été la pierre angulaire de son succès. », écrivait le très honorable Stephen Harper, ancien premier ministre du Canada, en 2010. Succès qui a également conduit l’ensemble à chanter non seulement en Amérique du Nord (San Francisco, Portland, Chicago, Seattle) mais aussi en Autriche et en Italie comme un retour aux sources.

Cependant, malgré sa vitalité, le VIFC semble destiné à devenir un ensemble de solistes si la relève continue à se faire attendre. « La plupart des membres sont des amis de longue date », confie Joseph Pighin. « Mais aujourd’hui, nous ne sommes plus très nombreux car nous vieillissons. Nous perdons des membres. Tout comme les chœurs allemand, autrichien, suisse … Nous perdons tous des membres et ils ne sont pas remplacés. Mais nous continuons ! » En partageant ainsi avec détermination la beauté de sa langue et de sa musique, les membres du VIFC honorent l’objet initial de cet ensemble vocal : préserver l’identité culturelle italienne à l’heure de la mondialisation.

 

Vancouver Folk Chorus Concert:
A Musical Journey

4 juillet, 19 h

Italian Cultural Centre de Vancouver

 

Les ensembles vocaux, des cœurs qui battent pour la défense de la culture italienne

Le 12 mars 2011, à l’occasion du 150e anniversaire de la réunification de l’Italie, le Théâtre national de Rome, sous la direction de Riccardo Muti, donna une représentation du célèbre opéra Nabucco de Verdi. Avant la représentation, Gianni Alemanno, maire de Rome à l’époque, est monté sur scène pour dénoncer les coupures dans le budget de la culture du gouvernement de Silvio Berlusconi, alors présent dans la salle. Cette intervention réveilla le sentiment patriotique des spectateurs qui réclamèrent un bis du Va pensiero, le chœur des esclaves, symbole de la quête de liberté du peuple, considéré par les Italiens comme le second hymne national. Ce soir là, le chef d’orchestre Muti accorda alors le bis et invita le public à chanter avec le chœur, expliquant que « si nous continuons ainsi, nous allons tuer la culture sur laquelle l’histoire de l’Italie est bâtie. »

Il raconte, dans un article repris par le Times, que « tout l’opéra de Rome s’est levé. Et le chœur s’est lui aussi levé. Ce fut un moment magique dans l’opéra. » Un moment qui réaffirma les liens étroits qu’entretiennent la musique et l’histoire politique du pays et l’importance de la sauvegarde du patrimoine culturel italien.