Un destin hors du commun et une vie ordinaire

J’avais quatre mois lorsque je suis arrivée au Canada. Je ne me souviens pas de ma première année à Vancouver. Petite, j’étais curieuse et excitée de faire partie d’une communauté très plurielle. Dès l’âge de cinq ans, j’ai éprouvé de grandes difficultés face aux interactions sociales. Mes camarades de classe ne comprenaient pas la mixité culturelle de ma famille – ni mon adoption. Quand les gens jettent un regard sur ma famille ils se rendent compte que nous ne nous ressemblons pas du tout. Mes parents sont de race blanche et je suis chinoise. Quand on me demande : « Qu’en est-il d’être adoptée ? », je n’ai pas vraiment de réponse. Je leur dis que c’est comme n’importe quelle famille. Je n’ai pas besoin d’être liée biologiquement à ma famille pour ressentir l’amour. Ils ont simplement besoin d’être des individus chaleureux et sympathiques qui me soutiendront dans mes projets de vie.

Bien évidemment, parfois je me demande comment ça se serait passé si j’étais restée en Chine et n’avais pas été adoptée au Canada. Par contre, je me rends compte que je n’aurais probablement pas eu beaucoup de succès. Je souffre d’un trouble neurologique – l’autisme – plus précisément, du syndrome d’Asperger. Résultat, les interactions sociales me sont difficiles et me faire des amis est compliqué. En Chine il y a peu d’avenir pour les gens ayant des besoins particuliers comme moi. Si vous échouez à la deuxième année d’école, vous allez être forcé de travailler dans les rizières pour le restant de votre vie. En y pensant, ce n’est certainement pas le genre de vie que je désire mener. Je pense que, d’une certaine façon, je devais être adoptée au Canada et que le destin m’a trouvé un chez-moi et une famille parfaite.

Au cours de ma vingtaine d’années au Canada j’ai découvert des activités telles que le taekwondo, la danse, le chant, la guitare, le piano et les arts dramatiques. Maintenant, je suis écrivaine, avec plus de trois ans d’expérience comme journaliste. Je suis très heureuse de pouvoir contribuer à La Source. Je suis si reconnaissante d’avoir l’occasion de partager mes expériences personnelles d’orpheline qui a immigré au Canada dès son plus jeune âge. Je désire que d’autres enfants à l’orphelinat se rendent compte que trouver une famille est possible – mais cela prend du temps. Chaque année je tâche de recueillir des fonds pour les orphelins pour pouvoir redonner aux enfants démunis de famille ou de foyer. Je me souviens qu’à l’âge de neuf ans j’ai fait un don de 100 $ à une école à Beijing. Les orphelins m’ont remerciée en me tricotant un foulard – qui ne dépassait pas la taille d’un T-shirt et qui était d’une teinte dorée affreuse. Mais vraiment c’est le geste qui compte.

Défilé du Nouvel An Chinois. | Photo par Liz Randall

Défilé du Nouvel An Chinois. | Photo par Liz Randall

Enfant, j’avais la coutume d’assister au défilé chinois chaque année, c’était une de mes célébrations préférées. Même si je ne vais plus au festival, je continue à faire honneur à mon héritage en pendant des lanternes dans mon appartement, en mangeant de la cuisine chinoise et en échangeant des enveloppes rouges (lai see) avec ma famille. Certains jours, je souhaite retourner dans mon pays d’origine et essayer de découvrir mes parents biologiques. Et pourtant, je préfère passer la plupart du temps avec la famille et les amis que je connais depuis l’enfance. Je demeure chinoise et j’embrasse mon héritage bien que je vive dans un pays beaucoup plus riche, qui offre plus d’occasions. J’ai droit à une bonne éducation et à une famille qui m’aime.

Rien qu’à penser aux orphelins en Chine, je me sens encore plus reconnaissante pour la vie que je mène aujourd’hui. Je souhaite que tous les enfants des pays en voie de développement puissent être adoptés au Canada. Quand j’aurai le temps et l’argent, je désire retourner en Chine et en découvrir plus sur mes origines chinoises. Pour le moment, je vais m’appliquer à apprécier ma vie à Vancouver. Je suis chanceuse de vivre dans une ville si belle. Je serai toujours fière d’être une Canadienne de souche chinoise.

 

Traduction Barry Brisebois