Quand les touristes sont victimes du tourisme

La ville d’Arras en France. | Photo par Pascal Guillon

Rien n’arrête la croissance du tourisme mondial, même pas la crise de 2008. Les grands sites touristiques d’Europe, longtemps réservés à une minorité de gens très riches, sont maintenant accessibles à une clientèle moins nantie du monde entier. Mais le visiteur est à la fois bénéficiaire et victime de ce tourisme de masse.

Venise est l’exemple type d’une industrie touristique qui a trop bien réussi. La plupart des habitants ont fui cette ville devenue un parc d’attraction historique. Le pont des Soupirs ressemble au métro parisien à l’heure de pointe. Dans les étroites ruelles de cette vieille ville, le visiteur piétine dans de véritables embouteillages piétonniers. Les autorités municipales songent maintenant à vendre des billets d’entrée pour la place San Marco pour générer des revenus supplémentaires, mais surtout pour assurer la circulation de la fouledes visiteurs. Le problème n’est pas unique à Venise. À Rome, des barrières vont être érigées pour canaliser le flot des visiteurs à la fontaine de Trevi. Les touristes pourront ainsi passer lentement devant le monument mais n’auront pas le droit de s’y arrêter. Il y a longtemps qu’il faut réserver à l’avance pour avoir accès aux grands musées, notamment au Vatican. Un peu partout en Europe, l’accès aux grands musées célèbres devient difficile à cause de foules de plus en plus difficiles à gérer. À Barcelone, la ville songe à faire payer l’accès à certains parcs et jardins publics aux non-résidents.

Dans ces villes où le tourisme est vécu comme une invasion malfaisante, ceux qui ne gagnent pas leur vie dans cette industrie sont de moins en moins accueillants. Pour eux, les foules touristiques sont des hordes barbares qui font grimper les prix, encombrent les transports publics et transforment les logements locatifs en Airbnb.

La ville de Dijon en France. | Photo par Pascal Guillon

À ceux qui veulent cependant visiter l’Europe et me demandent des conseils, je me permets de faire les recommandations suivantes. Pour ce qui est des grandes villes aux célèbres musées, allez y donc hors saison, voire en plein hiver. Certes, la pluie, et parfois quelques flocons de neige, sont désagréables (les Canadiens ont connu pire) mais c’est un vrai plaisir d’éviter les foules de touristes. Pour ceux qui préfèrent se rendre en Europe à la belle saison, il existe une multitude de petites villes magnifiques où le nombre de visiteurs est tout à fait raisonnable. Au lieu de Munich, pourquoi pas Ratisbonne (Regensburg en allemand) ? Au lieu d’Amsterdam, pourquoi pas Groningen ? Il y a à travers l’Europe des centaines de petites villes charmantes mais peu connues des Nord-américains. En France, je pense à Auxerre, Orléans, Arras, Colmar, Bergerac et tant d’autres. En Espagne et au Portugal, loin des côtes et de quelques villes historiques très connues, de nombreuses petites villes charmantes ont étés oubliées des grandes hordes de touristes. En Sicile et en Sardaigne se trouve une Italie si différente des grandes villes musées du centre et du nord. Chacune de ces petites villes peut servir de base à partir de laquelle on peut visiter les villages avoisinants.

De plus, ces petites villes sont généralement moins chères que les grands centres, ce qui est appréciable pour les Canadiens dont le dollar manque de muscle. Une autre Europe existe loin des foules de touristes, des pickpockets et des boules de crème glacée à 5€.

Une autre Europe existe loin des foules de touristes, des pickpockets et des boules de crème glacée à 5€.