L’espace revisité

L’espace RevisitéUne artiste a rencontré un espace et un curateur : voici la genèse de l’exposition actuelle qui se tient à l’Espace Cantu, Kingsway et 10e avenue Est, où 26 artistes exposent des toiles, surtout abstraites, mais pas uniquement, pendant 26 jours. Le titre, le thème de ce survol passionnant des jeunes artistes contemporains vancouvérois, est The Space In Between (jusqu’au 5 novembre).

Emmanuelle Renard, habitée par ce concept depuis 2003, cherchait depuis longtemps un espace à louer, et l’Espace Cantu, ancienne usine qui sera démolie est tout indiqué : dix mètres par trente, poutres en bois apparentes à quinze mètres du sol, éclairage magnifique…

Mme Renard a approché Keith Cunningham qui a accepté de collaborer avec elle car il est justement courtier et consultant en art auprès de grandes sociétés  : « Très franchement, après avoir prévenu les artistes du thème, je faisais ma sélection sur la valeur artistique des œuvres… Une vaste majorité d’abstraits, je suis moi-même artiste abstrait, j’ai dû me surveiller en choisissant les œuvres. Le thème est passionnant, j’ai accepté l’idée d’Emmanuelle sans y réfléchir à deux fois. Il est sûr que sur les 26 artistes, il y en a qui sont tellement heureux d’avoir l’occasion d’exposer ! Certains artistes ont dû chercher très fort le thème dans leur œuvre… » mais Mme Renard a fait remarquer « je m’intéresse aussi à l’espace entre les personnes et leurs sentiments. Il y a toujours cet espace… »

Ce thème est au centre de l’art de Mme Renard depuis longtemps. Depuis, en fait, un voyage – par cargo ! – à travers le Pacifique, voyage de recherches sur l’érosion. Elle s’est aperçue que ce voyage était une transition : les marins passaient tout leur temps à peindre et repeindre la coque, les surfaces métalliques; à chaque port, ils disparaissaient et se faisaient remplacer par d’autres.

« De même, l’espace Cantu se prête à mon thème, c’est un espace destiné à disparaître. Un espace de transition, entre deux états. Les poutres même seront rachetées et transformées.

L’espace RevisitéAdriana Molina, rencontrée à l’exposition, parle de l’impermanence du paysage « entre le ciel et l’eau, qui sont permanents, inchangeables. Ce qui se passe dans l’espace entre eux est intéressant. Espace où la nature devient l’espace urbain, c’est l’espace de transformation. Il y a toujours un espace entre la nature et la ville, l’espace entre la réalité et le reflet, où le reflet, en permanente transformation, représente la nature avant l’arrivée de la ville, donc en train de se transformer (Permanent Transformation number one). Pour Permanent Transformation number two, j’ai dépeint des êtres humains qui descendent, dirait-on, d’arbres-reflets renversés, au-dessus de la ville qu’ils transforment. »

Mme Renard commente pour nous, certaines des autres œuvres. Ainsi, la photo sur gélatine de la migration des papillons de Luis Miranda, « Il y a tant de papillons que parfois leur poids casse les branches des arbres. Il faut trois générations depuis le Canada jusqu’au Mexique. En migration veut dire en transition, en transit. » L’œuvre en braille d’Oscar Valero Saez, immense toile mystique, la passionne : « C’est l’espace entre le visuel et l’alphabet tactile du braille, pour finir en œuvre visuelle. L’artiste enlève la distance, nous permettant ainsi de nous rapprocher des handicapés. Il y a beaucoup de poésie. »

L’œuvre figurative de Maria Tratt lui inspire des idées sur la réalité : « perception personnelle ou réalité universelle, qu’en est-il ? Si je peignais ce même paysage, ces mêmes scènes, ce serait un tout autre tableau. » Selon Mme Renard, l’art abstrait est : « un travail qui consiste à apprivoiser le vide, un travail d’oubli du conscient ; il s’agit d’être à l’écoute de ce qui se trouve derrière le conscient. »

The space in between – Contemporary art
Show runs to Nov. 5 11-4 Tues- Sun.
Cantu Building
196 Kingsway @ 10th Avenue
Vancouver BC

Keith Cunningham:
www.attaglanz.ca

Emmanuelle Renard:
www.emmanuellerenard.com