Discours du Trône : La continuité dans le changement

Le Gouverneur général David Johnston en compagnie du Premier ministre Stephen Harper lors du récent Discours du Trône. Photo de Stephen Harper, Flickr

Le Gouverneur général David Johnston en compagnie du Premier ministre Stephen Harper lors du récent Discours du Trône. Photo de Stephen Harper, Flickr

Un petit Discours du Trône et le tour est joué ? La population est soudainement amadouée et son attention détournée? C’est du moins le pouvoir de persuasion que plusieurs prêtent à ce discours si précieusement préparé par les proches collaborateurs du premier ministre. Toutefois, rien n’est aussi simple.

Bien sûr ce discours, qui montre la voie dans laquelle compte s’engager le gouvernement dans les 12 à 15 prochains mois, lève le voile sur ce que le gouvernement considère être les enjeux clés du moment. Qui plus est, comme ce sera probablement le dernier Discours du Trône avant le prochain scrutin fédéral, il y a tout lieu de croire que celui-ci a été mûrement réfléchi, sondage à l’appui, pour toucher les cordes sensibles des électeurs que veut charmer le gouvernement.

Car, on le sait, en ces temps de politique moderne rien n’est le fruit du hasard. Tout gouvernement qui se respecte prend bien soin de calculer minutieusement les moindres gestes qu’il pose question de s’assurer les faveurs de l’électorat. Et n’allez pas croire un instant que le tout n’est que des machinations propres au gouvernement de Stephen Harper.

Laissons la partisannerie de côté et avouons que toutes les formations fomentent leur agenda de la même manière.

Une parmi les nombreuses manifestations au Canada. Photo par M.J. Milloy, Flickr.

Une parmi les nombreuses manifestations au Canada. Photo par M.J. Milloy, Flickr.

Ceci dit, le Discours du Trône présenté la semaine dernière est dans la tradition du gouvernement fédéral actuel. Il y a une bonne dose de mesures pour soutenir la création d’emplois et la promesse d’être dur envers les criminels et de protéger les communautés. Ce sont là des thèmes qui sont chers aux troupes conservatrices. Et comme je le mentionnais dans ma dernière chronique, le gouvernement conservateur continue d’être troublé par les décisions des tribunaux au sujet des sites d’injection supervisés. Si tant bien qu’il en remet et promet une loi qui permettra aux citoyens de s’exprimer avant qu’un site d’injection puisse ouvrir dans le quartier. Fidèle à son habitude d’y aller d’un titre évocateur, il la nommera Loi sur le respect des collectivités.

C’est le genre de promesse qui a de quoi ravir les partisans de la formation qui sont plus friands de politiques sociales voire conservatrices. Mais ceux qui sont plus intéressés par les mesures fiscales ne sont pas en reste puisque le discours annonce une loi sur l’équilibre budgétaire. Mais, comme l’ont appris plusieurs gouvernements provinciaux, ce genre de loi vient souvent hanter leurs protagonistes quand cet équilibre devient une cible difficilement atteignable. En fait, il se pourrait que celle-ci soit une sorte de cadeau empoisonné pour un prochain gouvernement.

Comme prévu, l’agenda gouvernemental accorde une grande place au thème de la protection des consommateurs. C’est probablement à ce chapitre que le gouvernement s’engage sur un nouveau terrain. Mais, c’est quand même une approche qui cadre bien avec son coté plus populiste qui prend ses racines dans l’ancien Reform Party. C’est aussi, il n’y a pas de doute, une série de mesures qui répondra aux complaintes les plus fréquentes de la part des consommateurs. Le tout a vraisemblablement été confirmé dans les sondages réalisés par le gouvernement. Le contraire me surprendrait énormément. Et n’oublions pas que cet intérêt pour la situation de cet imposant contingent de canadiens qui forme la classe moyenne se dessine avec comme toile de fond un objectif avoué de Justin Trudeau : faire de l’amélioration des conditions de vie de cette classe son cheval de bataille. Le gouvernement conservateur veut de toute évidence lui couper l’herbe sous les pieds avant que celle-ci ne prenne racine auprès des électeurs.

Le Discours du Trône marque le début quasi-officiel de la pré-campagne électorale prévue pour 2015. Bref, les jeux sont faits et on connaît maintenant les enjeux sur lesquels le gouvernement Harper compte faire bataille contre les partis d’opposition. Et, outre quelques nouveautés, on peut dire que ce discours propose la continuité saupoudrée de changements.