Ayant pour but de mettre en lumière le travail d’artistes immigrants et réfugiés, la cinquième édition du STAND festival se déroulera du 1er au 10 novembre à Vancouver. Près de 50 artistes seront présents afin d’offrir une programmation riche et variée : spectacles de danse, concerts, pièces de théâtre ou encore expositions d’art.
À l’origine localisé sur la rive nord de Vancouver, le STAND festival a beaucoup évolué depuis son lancement en 2021. Créé par l’organisation à but non lucratif Blackout Art Society, le festival se déploie désormais à travers le centre-ville de Vancouver. Pour cela, le ScotiaBank Dance Centre accueillera les évènements musicaux, la danse sera mise à l’honneur dans les locaux de The Annex, et enfin le Presentation House Theater rassemblera l’ensemble des performances théâtrales ainsi que de multiples ateliers d’initiation et expositions artistiques.
Pendant une semaine, le festival réunira des artistes immigrants et réfugiés provenant de six villes canadiennes (Victoria, Montréal, Québec, Toronto, Regina et Calgary) et représentant une vingtaine de pays.
Les organisateurs insistent sur l’importance de donner une plateforme à des projets culturellement variés. « Le festival est d’autant plus important aujourd’hui d’un point vu d’équité, de diversité et d’inclusion », explique Shideh Taleban, responsable marketing de l’organisation. « En tant que migrants, nous avons-nous même mis du temps à trouver notre place ici. Il nous semblait important de partager notre expérience avec les artistes tout en leur montrant les raccourcis et possibilités dont ils peuvent bénéficier ».
Le théâtre comme force d’humanisation
A Dictionary of Emotions in Wartime sera l’une des cinq pièces de théâtre présentées au STAND festival. Cette dernière a d’abord vu le jour en janvier 2024 à Victoria sur l’île de Vancouver et sera jouée pour la première fois à Vancouver dans le contexte du festival.
Cette production puissante et émouvante détaille la véritable expérience d’Olena, une jeune femme originaire de Kherson, dans les premiers jours de l’invasion de l’Ukraine par la Russie.
« Toutes les personnes participantes dans cette pièce sont arrivées en 2022 suite à la guerre en Ukraine », raconte Karmen McNamarra, co-réalisatrice de l’œuvre. C’est d’ailleurs par le biais de son association Help Ukraine Vancouver Island qui vise à venir en aide et accompagner les réfugiés ukrainiens depuis le début de la guerre, que Karmen a fait la découverte du script d’Olena Astasieva.
Anastasiia Konstantynova incarnera la protagoniste de A Dictionary of Emotions in Wartime le 8 novembre prochain.
« En tant que Canadienne, je voulais absolument avoir une perspective ukrainienne », souligne Karmen. Elle s’est alors concertée avec la réalisatrice Diana Budiachenko, et les deux femmes ont décidé de travailler ensemble afin de donner vie à ses mots.
« Je pense que le festival apportera encore plus de visibilité à notre histoire », se réjouit la réalisatrice. « Selon moi, en tant que Canadiens, on peut avoir tendance à se perdre dans les statistiques et cette pièce permet de mettre un visage sur les discours que l’on peut entendre ». La pièce a pour but de documenter la dureté de la guerre tout en racontant des histoires à la fois très humaines. « J’espère surtout que le public en ressortira avec une plus grande compréhension de la réalité et de ce que les réfugiés ukrainiens traversent », ajoute Karmen.
La danse pour exprimer la violence
Collapse est le nom qu’ont donné le Molokhia Squad à leur performance. Composé de deux jeunes danseurs, Inès Chiha et Bashir Al Mahayni, le groupe s’est formé il y a un an dans le contexte d’un atelier de création organisé par le chorégraphe québécois Lazylegz.
Avec tous deux des parcours très différents et des styles de danse assez opposés, leur collaboration n’a pas tout de suite été une évidence. « Nous n’avions pas du tout le même vocabulaire », se confie Inès. « Le développement de cette pièce a été tout un conflit, nous avons dû faire face à beaucoup de contradiction entre nos idées et nos mouvements respectifs ». C’est l’idée même derrière la pièce : l’exploration de la résistance, de l’oppression et de la survie. « Comment se construire au moyen d’une forme de violence alors que celle-ci nous entoure au quotidien », résume le groupe.
Le duo de Collapse sera présent sur la scène de The Annex le 2 novembre prochain.
Inès, d’origine franco-tunisienne, est une danseuse contemporaine passionnée de sports de combat depuis son plus jeune âge. « Dans mon approche de la danse il y a beaucoup d’éléments qui rappellent mon bagage physique en judo », raconte-t-elle.
Bashir, lui, originaire de Syrie, a découvert le breaking quand il était jeune. « J’ai appris en regardant les autres danser », se remémore-t-il. La danse a toujours été une façon pour l’artiste de communiquer avec son environnement. « Quand la guerre a éclaté en Syrie, j’ai dû déménager en Jordanie et la danse est devenue le langage grâce auquel je communiquais ».
Les danseurs se disent rester très ouverts et sensibles aux retours de leur public. « Ce que tu veux exprimer et ce que le spectateur perçoit est toujours très différent », précise Inès. C’est pour eux, un an de travail et de recherche qui a débuté dans la rue et dans les halls d’immeubles, et que le groupe espère un jour exporter et partager avec d’autres communautés. « Ce serait un rêve pour nous de nous produire en Tunisie et en Syrie », conclue Bashir.