D’un bout à l’autre de la Canada Line

Attention La Baie et Holt Renfrew, vous devez être sur vos gardes ! Le détaillant américain Nordstrom vient d’arriver à Vancouver. Ce n’est pas un séisme, mais le choc est palpable. C’est le nouveau point d’ancrage du commerce de détail au centre-ville…collé sur la station City Centre de la Canada Line. Émile Zola aurait pu choisir l’endroit pour y scénariser son « Au bonheur des dames » version 21e siècle. Le principe reste le même, soit de tout pour tout le monde…mais pas pour toutes les bourses.

Enfin, l’intersection Georgia et Granville retrouve la lumière et reprend sa vocation commerciale. Adieu l’affreuse guimauve où, à son ouverture, logeait Eaton’s qui cédait sa place à Sears, dans cet immeuble ouvert au public en 1973, dont l’enveloppe blanche devait servir de contraste au monolithe noir qu’est la tour TD. La nouvelle enveloppe de verre, dont la composition unique lui permet de refléter des teintes qui varient selon la lumière du jour, offre ainsi plus de variété que les autres tours de verre du centre-ville qui ne font que renvoyer la couleur du ciel ou des immeubles voisins.

Nordstrom au coeur du centre-ville de Vancouver. | Photo de GoToVan

Nordstrom au coeur du centre-ville de Vancouver. | Photo de GoToVan

Toutefois, la structure restant la même, le design de l’enveloppe ne peut avoir l’originalité de son proche voisin, le Telus Garden. L’aménagement intérieur est de haute qualité, accueillant et facile à manœuvrer. Grands espaces ouverts, bien délimités selon les marchandises et les grandes marques, dont plusieurs sont disponibles à Vancouver pour la première fois. Les trois étages fourmillaient de clients lors de ma visite, un samedi alors qu‘il faisait un soleil radieux. Les fauteuils roulants y étaient nombreux et on voyait plusieurs clients accompagnés de chiens- guides, ce qui atteste de la qualité d’accueil et de la facilité de déplacement !

Les marchandises offertes sont de qualité et de bon goût, et le choix des styles ne manque pas…
pour les bourses bien garnies surtout. On y sent l’aisance des clients venus acheter et la curiosité de ceux qui n’étaient venus que pour voir. Pause café, apéro, casse-croûte ou repas: tout est possible. Vous y trouverez un café qui n’est pas un Starbucks, un bar et un bistrot, où l’accueil est chaleureux et qui sont déjà bien fréquentés.

Il restera à voir quel succès connaîtra Nordstrom. Les habitués des grandes surfaces du centre-ville savent déjà que la hiérarchie des trois grands est comme suit : Holt Renfrew en haut de la pyramide, Nordstrom au milieu et La Baie à la base.

Les mieux nantis qui préfèrent les magasins exclusifs n’auront pas bien loin à aller.

Versace aura bientôt pignon sur rue, dans un nouvel immeuble au 745 Thurlow, coin Alberni, où ses voisins seront le complexe hôtelier et de condos de luxe Shangri-La, puis les marques de haut de gamme Burberry, Escada, le diamantaire De Beers, Tory Burch, le tout à un coin de rue de ce que sera bientôt la tour Trump, de biais sur la rue Georgia. Pas assez exclusif à votre goût ? Continuez vers l’est sur Alberni jusqu’à Burrard et vous y trouverez Hermès, Christian Dior, Louis Vuitton et Tiffany’s.

Trop cher pour vous ? Ne vous en faites pas. On construit encore des grands centres commerciaux avec d’énormes parcs de stationnement. C’est le cas des galeries McArthurGlen, ouvertes à Richmond cet été, accessibles par la station Templeton de la Canada Line juste avant l’aéroport de Vancouver. C’est un village artificiel, constitué de magasins d’usine de designers, construit dans un terrain vague, balayé par les courants d’air qui s’engouffrent dans les fausses allées. C’est en fait une destination pour ceux qui n’ont pas d’avion à prendre et nulle part d’autre à aller.

C’est en voiture que la majorité des curieux s’y rendaient en ce même samedi radieux, alors que le métro était loin d’être bondé.

L’ironie est que lorsque ce centre ouvrait ses portes plus tôt cet été, les acheteurs impatients de profiter des prix supposés imbattables des magasins d’usine des grands designers, (la définition de designers ici doit être prise avec un grain de sel) s’y sont rendus en masse et en voiture, causant un embouteillage assez important pour que plusieurs voyageurs aient cru rater leur avion. Ce qui n’était pas le cas de ceux qui avaient sagement choisi de s’y rendre avec la Canada Line…circuit après tout construit pour faciliter et alléger la circulation des voyageurs entre le centre-ville et l’aéroport.

Vous connaissez l’expression populaire qui veut que ce soit le voyage qui compte et non la destination. Ce sera à vous de décider lequel de Nordstrom ou des galeries McArthurGlen vaut le déplacement d’un bout à l’autre de la Canada Line. Mon choix est fait. Je reste en ville.