Les grands espaces : un art de vivre et de mieux-être

Photo par Daniel Fox


« Parce que c’est là ». Telle est la réponse du grand alpiniste Gaston Rébuffat sur sa motivation et sa définition de pourquoi gravir les montagnes.

La pratique des grands espaces s’explique-t-elle par sa simplicité ou bien peut-elle jouer un rôle plus profond dans notre vie et notre société ? Alors que s’ouvre du 29 février au 1er mars le salon annuel de l’industrie de plein air et du voyage, Vancouver Outdoor Adventure and Travel Show, les intervenants du salon et quelques passionnés locaux se racontent, à travers leur vécu.

L’omniprésence de la nature sous toutes ses formes est l’ADN de Vancouver, une ville peuplée de passionnés de plein air, ou de résidants qui ne sauraient tarder à le devenir, comme on le constate depuis des années. Mais que l’on se découvre une passion, ou que l’on soit déjà chevronné, chacun a en lui une géographie et une définition très personnelles de la jouissance des grands espaces. Si bien que l’on peut se poser la question de savoir comment penser notre usage de Dame Nature, toute aussi attirante qu’intimidante.

La passion au détour d’un voyage

Yvette Crossley, qui animera l’atelier « réaliser sa liste de voyages à faire avant de mourir », aime se présenter comme celle qui a changé de carrière après un simple voyage de deux mois et demi. Partie assistante comptable, elle est revenue agente de voyage. Elle l’explique par le fait qu’être en voyage ou dans la nature lui donne un sentiment d’euphorie et de bonheur intérieur impossible à décrire ». Les codes d’aéroports ont donc remplacé les codes comptables dans l’objet de son attention. Crossley note que pour autant, le fait de profiter des espaces naturels ne veut pas nécessairement dire « faire quelque chose », au contraire.

« Pour moi, être dehors au contact de la nature ne signifie pas que je suis toujours active. La nature a ce quelque chose de l’immobilité. Et j’adore regarder la vie organique suivre son cours », confie-t-elle.

Du rôle des grands espaces dans l’identité individuelle et sociétale

Basé à Vancouver, Daniel Fox, joint en plein travail de recherche sur l’île de Vancouver entre deux barres de wifi, sera également un intervenant sur le salon. Pour ce photographe-explorateur de la nature sauvage, le rapport à la nature prend une tournure plus philosophique et didactique.

« La nature a d’abord été mon refuge, un endroit me procurant un équilibre » partage-t-il. « Ensuite, elle m’a instruit, elle est devenue un endroit où j’ai pu apprendre sur ma vie. Elle m’a appris le contact social, la réciprocité, les systèmes, la mort, les cycles. Et puis, de devenir artiste, la nature est maintenant mon studio ».

La nature donc comme espace de développement personnel et de création artistique. C’est là un point important qu’il note : le manque de place consacrée à l’apprentissage de la nature alors qu’elle revêt une dimension éducative.

« La naissance de ma passion est en quelque sorte arrivée dès mon plus jeune âge », précise-t-il. « C’est pourquoi c’est si important pour les jeunes d’être à son contact. Quand on est jeune, on se crée des repères qui servent à se construire au fil du temps ».

S’il est un autre pays défini par les cimes enneigées, c’est bien la Suisse, dont nombre de nationaux sont venus construire la culture montagnarde que l’on connaît aujourd’hui dans l’Ouest canadien avec ses infrastructures ad hoc. Peter Schaefer, canado-suisse de 93 ans dont les réponses fournies par courriel ne dérogent pas à la précision suisse, est de ceux-là, lui qui est devenu un premier de cordée en matière de recherche sur les avalanches au Canada. Résidant maintenant au pied des montagnes de North Vancouver, les ferments de sa passion sont nés au cœur de son canton natal dans les traces de son père qui les lui a transmises. Et comme c’est souvent le cas lorsqu’il s’agit d’expliquer les raisons pour lesquelles on aime tant une chose, « définir la passion des montagnes est si difficile », répond-il d’abord comme Rébuffat, « parce que c’est là ». Il ajoute cependant ensuite qu’elles « permettent d’échapper à la ville caractérisée par l’ordre et de remplacer par des activités qui stimulent ».

La crête qui cache le sommet

Un autre grand alpiniste, Patrick Berhault, a dit : « Le danger est mortel mais le risque vital ». Passé le temps du fil Instagram ou de la quatrième de couverture d’un National Geographic, la volonté se réduit comme peau de chagrin.

« Le plus grand frein est la peur de faire quelque chose seul » relate Mme Crossley de ses entretiens clients. « La peur de tomber et de se retrouver dans un environnement inconnu » est ce que Peter Schaefer a, lui, souvent entendu.

« Le danger, c’est une chose. La peur se rapporte à notre perception et notre interprétation du danger. Il faut commencer par faire la différence » explique Daniel Fox. « Comme un domino, un à la fois ».

Yvette Crossley se veut rassurante en mettant elle aussi en garde contre les œillères que l’on s’impose à soi-même.

« Ne laissez pas (cette peur) vous empêcher de faire le voyage de vos rêves ! ».

Johanna, une Allemande stagiaire en architecture résidente de Vancouver ajoute l’importance de faire confiance à ses partenaires de voyage.

« Si tu fais confiance, ce sera toujours pour le mieux ». Son amie et compatriote Rike, ancienne doctorante en médecine à l’UBC, complète avec sa phrase fétiche « En général je leur réponds, allons-y ensemble un de ces quatre ! ».

Avant de sortir vos mousquetons et autres batteries photovoltaïques, planifiez votre prochaine aventure, destination le salon Vancouver Outdoor Expo qui se tiendra du 29 février au 1er mars.
Adresse et horaires sur www.outdooradventureshow.ca