le Mercredi 23 avril 2025
le Mardi 8 avril 2025 1:04 Chronique

Rengaine et ritournelle

Rengaine et ritournelle
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Trois semaines viennent de s’écouler depuis ma dernière chronique et, à bien réfléchir, je constate, avec regret, qu’une fois de plus il m’est quasi impossible de faire autrement que de parler de Donald Trump et de ses élucubrations. Monsieur continue, qu’on le veuille ou non, de tenir le haut du pavé de l’info et donc de l’actualité. Malgré mes nombreux efforts, très regrettablement, je subis son emprise. Difficile d’y échapper. Cela me peine. J’en souffre le martyre. Malheureusement je peux peu contre ce fougueux faux gueux.

Certes la politique canadienne me tient à cœur, en particulier les élections fédérales dont il est encore beaucoup question actuellement. Mais même là, bon gré mal gré, le thème central, la préoccupation de tous, tourne toujours autour de Trump : qui, de tous les candidats, peut mieux lui faire face ? Qui est le plus apte à nous protéger contre ses continuelles attaques, qu’il s’agisse de sa guerre tarifaire ou de son atteinte à notre souveraineté ? De lui dépend donc l’élection de notre premier ministre. Embarrassant, regrettable, vous ne trouvez pas ?

Voilà à quoi nous en sommes réduits : du Trump mur à mur. Du Trump par ci, du Trump par là. Pas une journée ne se passe sans que l’on entende des vertes et des pas mûres sortir de la bouche de ce monsieur à l’ego surdimensionné. Depuis le 20 janvier, journée de son intronisation, il accapare nos esprits en affichant impunément tout un arsenal de mauvaises dispositions. Il choque, il menace, il pourfend, il ment, il inquiète, il nargue, il affole, il fustige, il blâme. On n’en sort pas. Ses sorties relèvent du cauchemar. Comment m’en sortir ?

Donald Trump | Illustration par Donkey Hotey

Je m’en vais boire un verre avec des amis, de quoi parlons-nous ? Vous l’avez deviné. Ai-je besoin de mentionner son nom ? Non. Je rencontre une collègue au supermarché, de quoi est-il question ? Vous l’avez saisi : du prix élevé des produits alimentaires certes mais nous passons immédiatement à une conversation sur les mesures et les menaces proférées par le président américain. Échange de quelques plaisanteries désobligeantes s’ensuit : pourquoi le Canada ne ferait-il pas des États-Unis son quatrième territoire ou sa onzième province ? Ou encore : ne devrait-on pas changer le nom du pays de nos voisins du Sud en États-Désunis ?
Ne pourrait-on pas lui accorder le titre d’échevin à titre de compensation après avoir annexé son pays ? Rien de bien méchant. De simples paroles et parodies inoffensives.

Le 30 mars dernier j’ai assisté à la présentation très patriotique des Junos. En filigrane au cours des speechs, la présence du maître de la Maison Blanche s’est faite sentir sans que son nom pour autant soit prononcé. Ce personnage, qui deviendra légendaire pas pour les bonnes raisons, pèse sur nos vies à la manière d’un énorme nuage de mauvais augure suspendu au-dessus de nos têtes. Par ses prises de position et ses décrets à l’emporte-pièce, il impose un rythme effréné à l’actualité. Il est omniprésent. Dans tous les médias il n’est question que de lui. Dans ces conditions et à cette allure comment voulez-vous que je résiste ?

J’écris et dis tout cela sachant très bien qu’à chacune de mes chroniques je me répète. Une rengaine presque à bout de souffle qui n’en finit pas d’en finir. Un refrain qui sans doute à la longue arrive à casser les pieds. Afin d’éviter la lassitude et le désintérêt général, j’essaie, souvent en vain et tant bien que mal, de varier les qualificatifs qui décrivent cet inqualifiable individu. Je fais appel au dictionnaire des synonymes pour tenter de trouver un nouvel adjectif le décrivant. À ce stade-ci je pense les avoir tous utilisés. D’exécrable à horrible, de répugnant à détestable en passant par haïssable, déplorable, imbuvable et que sais-je ? J’arrive au bout du rouleau. Je tombe en panne sèche d’où le besoin de me répéter. Il me faut trouver autre chose. En réfléchissant bien je finis par penser que trumpinable serait l’adjectif qui lui siérait le mieux. L’Académie, qu’elle soit française ou québécoise, devrait accepter ce néologisme et fermement l’imposer lorsqu’il s’agit de décrire toute personne fourbe, vile et insupportable.

Quant à parler de la garde rapprochée de Trump, tous des ‘‘yes men’’, il va sans dire que pour les quatre prochaines années ce sera toujours dans les mêmes termes péjoratifs qu’il m’arrivera de parler d’eux. À moins que par miracle le geôlier de la Maison Blanche se transforme en être raisonnable, je suis ainsi condamné à être désobligeant à leur égard. Ces clowns, ces zigotos, ces importuns, ces hurluberlus, ces gugusses, ces linottes, comme leur maître, même si cela déplaît, auront toujours droit à ma continuelle ritournelle.