le Mardi 7 octobre 2025
le Mardi 7 octobre 2025 1:04 Chronique

Un Nobel peu noble

Un Nobel peu noble
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En octobre, nous y sommes déjà, le nom du lauréat du prix Nobel de la paix sera rendu public. Histoire de me distraire, le temps de cette chronique, je me suis mis dans la peau et principalement dans la tête de Donald Trump dont on connaît l’intérêt pour cette haute distinction qu’il estime lui revenir de droit. Maintenant, une fois à bord, je peux vous dire que je ne suis pas à l’étroit. Il y a de la place. Tranquillement je m’installe. Je me mets à l’aise. J’en profite pour visiter ses méninges qui font la sieste actuellement. Elles ronflent pendant que ses chevilles gonflent.

Monsieur se réveille enfin. Ses premiers mots ne me surprennent pas : « tarifs, où sont mes tarifs ? », confondant tarifs et pantoufles. Puis lentement, prenant son temps, monsieur USA, à l’image de son long discours à l’assemblée des Nations-Unies, se lance dans une tirade divagante, décousue, incohérente et surtout interminable. Par curiosité je le suis, pas à pas, tout au long de son trajet cérébral.

« Alors, bon, voyons où en sommes-nous ? Melania ? Melania ? Mais où est-elle celle-là ? En fait elle n’est jamais là et puis, je l’ai prouvé, je peux me passer d’elle. Par contre je ne peux pas me passer d’ailes de poulet de KFC. Tiens, en voilà qui restent de la veille. Autant les finir. Hum, miam, miam que c’est bon. Ses ailes ont le goût de la victoire, comme disait Robert Duval dans le film Apocalypse now.

Alfred Nobel, né en 1833, en Suède, a légué sa fortune pour créer les Prix Nobel. | Photo par Adam Jones

Toujours pas de Melania. Pas de soucis. Je peux choisir tout seul mes longues cravates rouges. Les plus belles cravates du monde. Personne ne fait d’aussi merveilleuses cravates. Même les Français et encore moins les Italiens n’en font d’aussi belles. Emmanuel et Georgia ne vont pas aimer que je dise ça mais c’est la vérité et je dis toujours la vérité même si, pour les besoins de ma cause, je la déforme par pur plaisir.

Voyons, cravate, tiens celle-ci est assez longue. Il faudra que je fasse attention de ne pas marcher dessus. Qu’est-ce que j’ai au programme aujourd’hui ? Il doit bien y avoir quelqu’un à virer ou à insulter, un pays à terroriser, un texto pour dénigrer un comédien, un journaliste ou toute personnalité médiatique ? Qui est-ce qui a oublié de me lécher les bottes ou le popotin dernièrement ? Ceci dit je dois faire attention à ce que je dis et à ce que je fais. Je ne veux pas mettre en péril mes chances d’obtenir le prix Nobel de la paix pour 2025. Nous sommes en octobre et prochainement on devrait connaître le nom du récipiendaire de ce prix que je convoite depuis mon retour à la Maison Blanche. Je pense avoir tout fait pour qu’il me soit attribué.

D’avoir changé le nom du département de la défense en département de la guerre ne devrait pas compromettre mes chances. Mon peu d’engagement envers les services des droits de l’homme et mon manque d’enthousiasme, oh, je peux même le dire, mon manque de respect à l’égard des institutions démocratiques pourraient certes me jouer un vilain tour. Par contre mes énormes efforts déployés, grâce à mon magnifique flair, en vue de l’avancement de la diplomatie américaine, dont on a souvent dénoncé les maladresses, devraient compenser mes petites lacunes. Grâce à mes formidables interventions, en sept mois sept conflits ont été réglés. Bon, je sais, il y en a qui vont dire qu’en fait je n’y suis pour rien mais cela ne m’empêche pas d’en réclamer le crédit. Après tout, mentir, tromper et exagérer, à ce que je sache, ne sont pas mentionnés dans le processus d’évaluation des candidats. J’ai donc toutes mes chances. D’ailleurs je ne vois personne qui, mieux que moi, mérite ce prix.

Ceci dit, si je ne suis pas nommé je prendrai ça comme un affront envers les États-Unis. J’enverrai sur-le-champ mes troupes, ces mêmes militaires qui s’entraînent et occupent les principales grandes villes démocrates américaines. Oui, je les enverrai envahir la Norvège car je hais ceux qui me résistent, ceux qui s’opposent à moi. Mon modèle ce n’est pas Jésus mais Genghis Khan. Ça commence à faire. Je perds patience. Melania, ma petite biche, où t’es passée ? Ton gros doudou de Donald a besoin de toi pour le consoler. J’ai envie qu’on me dise que je suis merveilleux ».

Ouf ! Il est grand temps pour moi de quitter cette ambiance toxique et ce cerveau écervelé. Après ce voyage au fin fond de son univers, je reste là à me demander : comment ce personnage fait-il pour vivre avec lui-même et surtout comment ce candidat au prix Nobel de la paix réussit-il à dormir en paix ?