Le ramadan est un mois sacré pour les musulmans du monde entier, un moment de spiritualité, de jeûne et de partage. En Colombie-Britannique, où la communauté musulmane francophone est minoritaire, vivre pleinement cette période demande des efforts supplémentaires. Entre diversité linguistique, accès aux ressources religieuses et maintien des traditions, ces fidèles s’adaptent pour perpétuer leur foi. Rencontre avec Qamar et Ibrahim, deux musulmans francophones d’Abbotsford, qui partagent leur expérience du ramadan dans cette petite ville de la grande région de Vancouver.

Qamar, membre de la communauté musulmane de la province, originaire du Maroc et installée à Abbotsford depuis huit ans. | Crédit : Berenice Jean-Louis
Paul T Tshilolo – IJL-Réseau.Presse – Journal La Source
Une communauté discrète mais engagée
La Colombie-Britannique est une province multiculturelle où se côtoient de nombreuses communautés d’origine arabe, pakistanaise, sud-asiatique et africaine. Pourtant, la présence musulmane francophone y est encore limitée. « Je connais au moins cinq francophones qui fréquentent notre mosquée », explique Qamar, originaire du Maroc et installée à Abbotsford depuis huit ans. « C’est la première année que je rencontre autant de musulmans francophones ici, et cela a été une belle surprise. »
Ibrahim, qui a vécu 19 ans au Québec avant de s’installer en Colombie-Britannique il y a deux ans, partage un constat similaire. « À Montréal, la communauté musulmane francophone est très grande. Les enseignements islamiques se font en arabe et en français, alors qu’ici, ils sont souvent en anglais ou parfois en arabe. »
Les pratiques du ramadan sur les bords du Pacifique
La pratique du ramadan en C.-B. repose sur les mêmes principes fondamentaux qu’ailleurs : jeûne du lever au coucher du soleil, prières nocturnes (Tarawih), lectures du Coran et moments de partage en famille ou entre amis.
« Pendant la journée, nous prions, nous visitons la mosquée, nous lisons le Coran et nous apprenons davantage sur l’islam », raconte Qamar. « Chaque soir, nous faisons huit prières. Des imams viennent et les jeunes participent à des discussions religieuses. »
À Abbotsford, les musulmans ont accès à deux mosquées principales, dont le Centre islamique. Ibrahim y retrouve régulièrement une dizaine d’autres francophones. « Après la prière, nous discutons tous ensemble dans nos langues respectives, mais l’anglais reste le principal moyen de communication. »
Un ramadan vécu avec intensité et le défi de l’accès aux produits halal
Un autre aspect important du ramadan est la cuisine. Les musulmans doivent consommer des aliments halal, notamment de la viande sacrifiée selon les rites islamiques. Qamar se souvient des difficultés rencontrées à son arrivée en Colombie-Britannique. « Il y a huit ans, trouver de la viande halal ici était un vrai défi. Cette année, nous avons deux boucheries bien connues où nous pouvons nous approvisionner facilement. » Ibrahim confirme cette amélioration : « À Abbotsford, nous avons trois boucheries halal, ce qui nous facilite grandement la tâche. »
Malgré les défis, le ramadan en Colombie-Britannique demeure un mois de bénédiction et de renouveau spirituel. Qamar, qui a grandi dans un environnement musulman, trouve chaque année une nouvelle signification à ce mois sacré. « Cette année, j’ai beaucoup appris sur ma religion. Nous avons eu des cours tous les vendredis et dimanches, et j’ai approfondi mes connaissances comme jamais auparavant. »
Ibrahim partage ce sentiment d’unité renforcée. « Le ramadan est un mois que Dieu a choisi, un mois de miséricorde et de bénédiction. C’est un temps de grande récolte spirituelle. »
Solidarité et engagement communautaire
Si la communauté musulmane francophone d’Abbotsford reste modeste, elle ne manque pas d’initiatives pour renforcer la solidarité. Des Iftars collectifs sont organisés lorsque cela est possible, et les membres s’entraident pour maintenir leurs traditions malgré les contraintes.
Qamar insiste sur l’importance de créer des activités pour les enfants afin de les rapprocher de la religion. « Ici, on doit faire plus d’efforts pour organiser des rencontres et des événements qui permettent aux jeunes de mieux comprendre leur foi. »
Une intégration dans un contexte anglophone
L’un des défis majeurs pour les musulmans francophones d’Abbotsford est la barrière de la langue. Certaines prières et enseignements religieux se déroulent en anglais. « La langue qui nous unit ici, c’est l’anglais », souligne Ibrahim. « Sur les recommandations d’Allah, nous ne faisons pas de différence entre francophones et anglophones, car nous sommes tous des serviteurs de Dieu. »
Pour Qamar, cette diversité linguistique ajoute une difficulté supplémentaire à l’organisation du ramadan. « C’est plus compliqué de se rassembler, car il y a des barrières de communication entre les différentes origines. » Malgré cela, des efforts sont faits pour maintenir un lien entre les croyants francophones, notamment par des cours et des discussions religieuses.