Le Vancouver Writers Fest anime Granville Island en cette fin octobre. Parmi les auteurs invités cette année, plusieurs sont originaires des provinces maritimes. Est-il plus difficile de vivre de sa plume quand on habite l’est du pays ? Comment diffuser son œuvre ? Trois écrivaines du Nouveau-Brunswick et de Terre-Neuve-Labrador nous répondent.
« Mon mari et moi venons souvent en Colombie-Britannique. Nous avons de nombreux amis ici. Vancouver est une ville fantastique. J’en ai de très bons souvenirs. » Beth Powning se réjouit de passer la fin du mois sur la côte Ouest du pays.
Elle est l’une des écrivaines invitées au Vancouver Writers Fest qui se déroule du 20 au 25 octobre, à Granville Island. Beth Powning parcourt des milliers de kilomètres pour être présente ; elle habite au Nouveau-Brunswick. « C’est la deuxième fois que je participe à ce festival. La première fois, c’était en 2004. Je venais de sortir mon premier roman, The Hatbox Letters », se souvient-elle.
Depuis sa création, le Vancouver Writers Fest, qui célèbre cette année sa 28e édition, a pour vocation de réunir des auteurs canadiens et du monde entier. Si ceux originaires de Colombie-Britannique sont majoritaires, la programmation se veut des plus éclectiques. Celle à venir réunit des personnes originaires du Brésil, d’Australie, du Danemark, etc.
Une fois n’est pas coutume, les écrivains des Maritimes sont bien représentés : cinq femmes (deux basées au Nouveau-Brunswick – parmi lesquelles Beth Powning – et trois à Terre-Neuve-Labrador) font entendre la voix de l’Est. En 2014, seuls deux auteurs de Terre-Neuve-Labrador (Michael Crummey et Russell Wangerski) étaient au programme.
Un seul pays : le monde de la littérature
Du côté de l’organisation, Hal Wake, le directeur artistique, se défend de vouloir mettre en avant ou non une région. Il affirme au contraire devoir jongler avec les disponibilités des uns et des autres tout en veillant à se renouveler. Le Vancouver Writers Fest n’a qu’un seul pays : le monde de la littérature.
Édith Bourget n’est pas peu fière d’être l’une des têtes d’affiche de cette édition. Elle anime deux rencontres avec de jeunes lecteurs en milieu scolaire, prévues les 20 et 21 octobre. « Ce que j’aime avec ce genre de rendez-vous, c’est que c’est mon travail qui est mis en lumière. Je ne viens pas présenter un livre ou un album illustré, mais expliquer mon parcours et ma démarche. Cela promet de beaux moments intéressants. »
Elle aussi réside au Nouveau-Brunswick et vient de lancer un nouveau roman jeunesse Opération Noël, une nouvelle aventure de sa série Rouge Tomate qui met en scène Tom, le héros, et sa bande d’amis. En 2011, elle était déjà l’invitée du Vancouver Writers Fest.
Pour Elisabeth de Mariaffi, de Saint-Jean, Terre-Neuve, il s’agit d’une première venue. « Ce festival est devenu un incontournable. Il a acquis une excellente réputation. Je suis tout excitée d’en faire partie cette année », s’impatiente-t-elle.
Enracinée dans sa terre d’adoption
Pour autant, ces trois femmes qui vivent de leur plume n’ont pas le sentiment d’incarner l’identité de leur lieu de résidence. « L’action de certains de mes livres se déroule peut-être au Nouveau-Brunswick, mais leur environnement se veut universel. En tant qu’écrivaine, j’aspire à l’universalité. Il en va de même avec les thèmes que j’aborde », précise Édith Bourget.
Elisabeth de Mariaffi partage son point de vue. « Je me suis installée à Saint-Jean en 2012. Je m’y sens très bien et c’est devenu mon chez-moi. Mais je ne me considère pas comme une auteure attachée à un endroit. J’ai grandi à Toronto, passé beaucoup de temps en Europe. Mon écriture s’est nourrie de ces expériences. »
Des trois, Beth Powning semble la plus enracinée dans sa terre d’adoption, elle qui est née en Nouvelle-Angleterre. « Je me définirais avant tout comme une auteure canadienne, mais je suppose que le Nouveau-Brunswick influe sur mon travail. Cette province est riche d’histoires, de traditions et d’hivers très rigoureux », sourit-elle.
« On ne rayonne pas sans effort »
Pour rien au monde, Édith Bourget, Elisabeth de Mariaffi et Beth Powning ne quitteraient leur coin de paradis. Et ce, qu’importe si les éditions Boréal, l’une des plus importantes maisons du pays, ont leurs bureaux à
Montréal ou si, comme l’affirmait en 2014 Statistiques Canada, les deux tiers des revenus issus de la production de livres au Canada sont générés en Ontario.
« Ce n’est pas le lieu qui fait l’écrivain, mais son travail. On ne rayonne pas sans effort. Être constant dans la qualité, c’est le secret », pense Édith Bourget. Beth Powning, elle, ne s’est jamais posé la question. « Je n’ai pas l’impression qu’être issue de la côte Est me facilite ou me complique les choses. À vrai dire, je n’en sais rien », élude-t-elle.
À l’approche du rendez-vous littéraire vancouvérois, toutes se concentrent sur l’enrichissement qu’elles vont en tirer. « Je participe avec d’autres écrivains à trois ateliers : l’un sur les fables, un autre sur le thriller et enfin un dernier sur la place de la femme. C’est pour moi l’occasion de m’exposer à des publics variés », expose Elisabeth de Mariaffi.
Beth Powning garde en mémoire les échanges qu’elle a eus avec des auteurs canadiens et étrangers lors de son précédent passage en 2004. « Je suis toujours en contact avec certains. » De son côté, Édith Bourget perçoit sa présence comme l’occasion de renforcer les liens entre la communauté francophone de l’Est et celle de l’Ouest. Ce coup de projecteur sur ses livres, écrits dans la langue de Molière, contribue à la diffusion de la francophonie, selon elle.
Hal Wake, le directeur artistique du festival, dépeint cet événement comme « un voyage de découvertes ». Il ne reste plus qu’à embarquer.
Retrouvez le détail de la programmation du Vancouver Writers Fest sur le site Internet : www.writersfest.bc.ca