La rentrée scolaire de cet automne 2024 en Colombie-Britannique marque un tournant décisif pour l’avenir des programmes d’immersion française, au moment où la province se prépare aux élections provinciales du 19 octobre. Dans une lettre ouverte, la Fédération des francophones de la Colombie-Britannique (FFCB) et Canadian Parents for French BC & Yukon (CPF BC & Yukon) lancent un appel aux candidats politiques pour qu’ils prennent des mesures concrètes face aux défis rencontrés par les étudiants et les familles francophones. La Source s’est entretenue avec Jason Howe, directeur général de CPF BC & Yukon, ainsi qu’avec Marie-Nicole Dubois, la présidente de la FFCB, afin d’approfondir les points soulevés.
Paul T. Tshilolo
IJL – Réseau.Presse – Journal La Source
Le premier constat préoccupant est la baisse des inscriptions en immersion française dans certains districts scolaires, une tendance observée depuis la pandémie. Jason Howe explique que « même si le nombre d’élèves dans les écoles francophones a augmenté, les programmes d’immersion française font face à une diminution des inscriptions ». Il attribue cette situation à deux facteurs principaux : une pénurie d’enseignants qualifiés en français et un manque de salles de classe dans certaines écoles, notamment à Vancouver et Surrey.
Cette pénurie a des répercussions directes sur l’expansion des programmes et sur la qualité de l’enseignement. « Sans enseignants qualifiés et sans infrastructures adéquates, les districts scolaires peinent à répondre à la demande des familles désireuses d’inscrire leurs enfants en immersion », précise Jason Howe. En outre, il déplore le manque de promotion de ces programmes auprès des jeunes et des familles.
Des initiatives pour renverser la tendance
Malgré ces défis, CPF BC & Yukon reste optimiste quant à l’avenir des programmes d’immersion française. Le directeur général de l’organisme mentionne plusieurs initiatives visant à inverser cette tendance, notamment la création d’activités en français pour renforcer l’engagement des jeunes. « Nous voulons offrir aux élèves des occasions d’apprendre non seulement la langue, mais aussi de s’immerger dans la culture francophone », explique-t-il.
Cependant, Jason Howe souligne que CPF BC & Yukon ne joue pas un rôle direct dans la gestion des écoles. Il appelle donc à une plus grande collaboration avec les autorités éducatives pour mettre en place des comités dans chaque district scolaire, chargés de se concentrer sur les défis spécifiques à l’immersion française. « Certains districts ont déjà créé de tels comités, mais ce n’est pas le cas partout, notamment à Surrey », note-t-il.
Les attentes de la communauté francophone envers les partis politiques
Du côté de la FFCB, la présidente Marie-Nicole Dubois rappelle que les élections provinciales représentent une occasion cruciale pour faire avancer les enjeux liés au français en Colombie-Britannique. « Par le passé, nos efforts pour attirer l’attention des candidats ont été vains », déplore-t-elle. Cependant, cette année, la FFCB adopte une approche plus stratégique en mettant en avant des questions prioritaires qui concernent aussi bien la communauté francophone que la majorité anglophone. « En abordant des sujets tels que la pénurie d’enseignants et d’infrastructures scolaires, nous espérons capter l’attention des candidats et les encourager à intégrer ces enjeux dans leur plateforme électorale », explique-t-elle.
Un appel à un soutien accru pour le bilinguisme
L’un des principaux messages de la FFCB et de CPF BC & Yukon aux décideurs politiques concerne l’importance du bilinguisme et de l’immersion française pour l’avenir de la province.
Jason Howe insiste sur le fait que l’apprentissage du français ouvre des portes aux jeunes et leur offre des ouvertures professionnelles futures. « Nous encourageons les jeunes à devenir bilingues, car cela leur permettra d’accéder à un plus large éventail de carrières, que ce soit au niveau local ou national », affirme-t-il.
Pour renforcer ces programmes, le directeur général du CPF BC & Yukon recommande que les districts scolaires les plus touchés, comme Vancouver et Surrey, bénéficient de ressources supplémentaires et d’une meilleure planification à long terme. Il plaide pour une approche collaborative avec les autorités éducatives et demande aux élus de s’engager activement pour soutenir ces initiatives. « Nous aimerions voir les candidats aux élections provinciales faire du développement des programmes d’immersion française une priorité dans leurs plans éducatifs », ajoute-t-il.
Des progrès encourageants, mais insuffisants
Bien que des progrès aient été réalisés ces dernières années, notamment avec des discussions initiées par certains candidats, les deux organisations estiment que le soutien gouvernemental reste insuffisant. La présidente de la FFCB, Marie-Nicole Dubois, reconnaît que la popularité des programmes d’immersion est en hausse, mais que le financement ne suit pas toujours. « Le gouvernement devrait allouer des fonds suffisants pour répondre adéquatement à la demande croissante », affirme-t-elle.
Elle se réjouit toutefois des conversations en cours avec trois candidats aux prochaines élections provinciales d’octobre et espère que ces discussions se poursuivront tout au long de la campagne électorale. « Nous comptons sur les médias pour interpeller les candidats sur leur réponse à notre lettre ouverte », ajoute-t-elle.
Vers un avenir plus prometteur pour l’immersion française
Malgré les obstacles, Jason Howe et Marie-Nicole Dubois restent optimistes quant à l’avenir des programmes d’immersion française en Colombie-Britannique. Ils espèrent que les discussions en cours aboutiront à des engagements concrets de la part des élus, permettant ainsi d’assurer la pérennité et l’expansion de ces programmes dans toute la province.
En conclusion, la rentrée scolaire 2024 et les élections provinciales représentent un moment charnière pour la communauté francophone en Colombie-Britannique. Par leur lettre ouverte, la FFCB et CPF BC & Yukon ont lancé un appel clair aux candidats : l’avenir du bilinguisme et des programmes d’immersion dépend de leur engagement à soutenir et à renforcer ces initiatives. Il appartient désormais aux élus de répondre à cet appel et de prendre des mesures pour assurer un avenir prometteur à l’éducation en français dans la province.