Savez vous quelle est la seconde plus large communauté de Colombie-Britannique ? Si vous lisez ces lignes, et les comprenez, c’est que vous en faites partie.
Environ 300 000 francophones habitent la province, de Vancouver à Prince Rupert, de Sparwood à Victoria, les locuteurs de la langue de Molière forment un groupe ouvert, mais liés entre eux par l’amour du français, et un certain désir de pouvoir vivre une partie de leur quotidien dans leur langue maternelle.
C’est à l’Hotel Executive Airport Plaza de Richmond que s’est réunie l’Assemblée générale annuelle de la Fédération des francophones de la Colombie-Britannique (FFCB) les 8, 9 et 10 juin.
Cette année, la Fédération accueillait deux nouveaux membres en son sein. Le Conseil scolaire francophone de la Colombie-Britannique et l’Assemblée francophone des retraités et ainés de la province ont été accepté à l’unanimité. Ils rejoignent donc les 36 autres associations, membres actifs et de soutiens de la FFCB.
Média…La Source consacrera une page supplémentaire en français
La communauté s’est penchée en premier lieu sur une situation embarrassante, à défaut d’être gênante : l’absence de journal entièrement francophone dans la province.
Avec la cessation de parution de l’Express du Pacifique, plus aucun journal n’est entièrement en français en C.-B.; le journal La Source, précurseur dans le format bilingue en Colombie-Britannique, continue de publier une section dans cette langue.
Pour palier, quelque peu, à ce manque, un Gentleman’s agreement a été négocié entre La Source et la Fédération. Notre journal proposera au cours des prochaines semaines une page supplémentaire en français (et donc une de plus aussi en anglais), dédiée à la communauté francophone.
La Fédération s’engage en retour via le Conseil scolaire francophone de la Colombie-Britannique à fournir des informations pour alimenter cette page en partant du principe de base journalistique que le journal se réserve une entière liberté quant au choix du contenu publié dans ses pages et ne sera donc pas en aucun cas la “voix officielle” de la communauté, mais plutôt un point de chute des nouvelles de celle-ci.
Si l’expérience se déroule bien, un communiqué destiné à officialiser cette relation devrait paraître au début de l’automne. A noter par exemple, que certains membres de la communauté comme l’Association francophone de Victoria, le CSF distribuent déjà le journal en partenariat avec La Source. La proposition de cette collaboration a fait l’unanimité lors du vote de l’assemblée.
A la question de savoir si L’Express du Pacifique allait renaître de ses cendres, la Fédération a expliqué n’avoir aucun pouvoir de décision en la matière, le Conseil d’administration du journal et la “fédé” n’ont absolument aucun lien.
Santé en français
L’autre sujet à l’ordre du jour de vendredi était la présentation de Réso-Santé.
Partant du constat que les francophones avaient nettement moins accès aux services de santé dans leur langue que les anglophones, dix-sept réseaux de santé francophone ont été créé à travers le pays sous l’égide de la Société Santé en Français (S.S.F).
Une branche de ces réseaux se consacre uniquement aux francophones de C.-B., et c’est elle que présentait son directeur, le docteur Louis Giguère.
Financée par le Bureau d’appuis aux communautés de langues officielles à travers la S.S.F, Réso-Santé vise principalement à favoriser l’accès et la création des services de santé en français, et à encourager la pérennité des structures francophones existantes. Un énorme chantier mais dont les effets sont régulièrement visibles comme au Festival du Bois de Maillarville, à UBC ou encore aux Jeux francophones, au Conseil scolaire francophone de C-B auxquels Réso-Santé a apporté sa participation.
Afin d’aider les professionnels de la santé à travailler en français, le réseau leur propose par exemple des ateliers multimédia en ligne, ou encore les épaule dans la rédaction des documents médicaux dans cette langue. Un travail de titan à travers toute la province !
Le parcours de l’Honorable Patrice Abrioux fêté
La journée de vendredi s’est achevée sur la réception en l’honneur du juge de la Cour suprême de la Colombie-Britannique, l’Honorable Patrice Abrioux.
S’il y a des destins que l’on peut qualifier d’atypiques, celui du juge en fait indéniablement partie. Né à Aberdeen, dans le nord de l’Écosse, mais de parents français, M. Abrioux a toujours vécu dans des milieux anglophones. Ses parents, des universitaires, voyagent beaucoup.
Un premier déménagement l’amène au Canada, à Régina en Saskatchewan où il grandira avant de rejoindre Victoria où il commencera ses études de droit puis réussira le barreau en 1981. Commence alors sa carrière d’avocat en C.-B. où son excellente maîtrise des deux langues, le français par ses parents, l’anglais par son environnement, ainsi que ses compétences juridiques l’aident à gravir les échelons jusqu’à son poste actuel, ô combien important, de juge de la Cour suprême de C.-B.
Il est le troisième francophone nommé juge dans la province, et le premier à la cour suprême de la Colombie-Britannique. Une étape importante pour la communauté francophone qui, à travers cette réception, tenait à saluer l’exceptionnel parcours d’un homme de qualité et le succès dans la reconnaissance au droit d’être jugé en français pour les francophones de la province.
Fin connaisseur des rouages de la FFCB, le juge à tenu à rendre un hommage discret mais élégant au travail des femmes de la communauté, « des femmes d’influence » selon ses propres termes. Une manière de souligner l’importance de leur rôle dans l’organisation et l’avancement des objectifs de la Fédération.
Distinctions francophones
La journée de samedi était principalement marquée par la remise de deux prix à des membres de la communauté.
Le prix Napoléon Gareau fut attribué à Mme Jocelyne Doré-Lawson. Il récompense les personnes qui, part leurs actions bénévoles, ont contribué à enrichir la vie des francophones de C.-B.
Originaire de Montréal, Mme Doré-Lawson a siégé 18 ans au Conseil d’administration du Centre culturel francophone de Vancouver, comme conseillère d’abord en 1994, vice-présidente en 1995 puis présidente de 1999 à 2011.
Décrite par tous comme une dirigeante travailleuse, généreuse et forte, elle laisse derrière elle un centre culturel plus actif que jamais (Festival d’été francophone, Coup de cœur francophone, Juste pour rire de Vancouver…).
“Il faut se battre lorsque l’on est francophone dans la province, toutes les aides, tous les bénévoles, toutes les personnes qui veulent vivre en français doivent se manifester et nous soutenir” nous explique-t-elle avant de rappeler qu’en C.-B., le français est une langue appréciée de tous, y compris des anglophones “qui inscrivent leurs enfants dans les programmes d’immersion française avant même leur naissance, avec des listes d’attente de cinq ou six ans !”
Preuve s’il en est de la qualité du travail de cette femme dont la passion aura porté la francophonie dans la province presque vingt ans durant.
Le prix Gérald-et-Henriette-Moreau quant à lui a été attribué à M. Craig Holzschuh. D’origine franco-ontarienne, M. Holzschuh est le directeur artistique et général du Théâtre la Seizième depuis 2001.
Après une maîtrise de mise en scène obtenue à UBC, il rejoint la troupe en 1999 et prend sa direction deux ans après. Sous son égide, ce ne sont pas moins de 40 nominations et 13 prix aux Jessie Richardson Award et au Gala des masques qui seront remportés par la compagnie.
À travers le projet “Pont”, il aide de nombreux jeunes à découvrir et à s’initier au théâtre en français, mais c’est principalement en raison de son travail acharné et à la qualité de celui-ci que M. Holzschuh a acquis une solide réputation qui contribue à faire rayonner la culture et les lettres francophones dans l’Ouest canadien.
Recevant le prix des mains de M. Réal Roy, le président de la FFCB, M. Holzschuh a malicieusement remarqué que “les murs de mon bureau viennent d’être peinturé, ça va faire beau accroché là bas !”. La nouvelle programmation du Théâtre de la Seizième sera disponible le 6 septembre.