A l’occasion de la nouvelle édition du festival des films documentaires DOXA, trois réalisatrices s’emparent du devant de la scène et mettent en lumière des portraits de protagonistes liés par la même volonté de se faire entendre et de trouver leur place dans le monde d’aujourd’hui.
A l’ère où la parole des femmes se libère, le DOXA festival présente Because We Are Girls, de Baljit Sangra, Illusions of Control, de Shannon Walsh et Premières solitudes de Claire Simon.
Sortir du silence
Malgré les sujets très différents de ces trois documentaires, les trois réalisatrices se rejoignent sur l’importance d’éduquer et de sensibiliser les générations futures sur la réalité du monde actuel.
Baljit Sangra vient de la communauté Pendjabi canadienne. Lorsque son amie lui apprend qu’elle et ses sœurs ont été victimes d’agressions sexuelles par un membre de leur famille et qu’elles ont décidé de mettre en lumière ce traumatisme, la réalisatrice décide de suivre les sœurs dans leur combat.
« Jeeti et ses sœurs ont fait cette démarche pour elles-mêmes, mais également pour montrer à leurs filles et aux générations futures et présentes qu’il est possible de s’imposer et de dire la vérité, » dit-elle.
Par le biais de Because We Are Girls, Jeeti évoque le fait de faire cette démarche pour elle, mais également pour montrer l’exemple à ses filles.
Malgré le caractère très personnel du sujet, de nombreuses femmes, mais aussi des hommes, peuvent se retrouver dans l’histoire de Jeeti et ses sœurs, comme l’explique la réalisatrice : « Plus vous restez personnel, plus ça devient universel et de nombreuses personnes, en dehors de la communauté, peuvent se retrouver dans cette histoire ».
Des femmes combattantes
Quant à Shannon Walsh, la réalisatrice de Illusions of Control, elle est consciente que « les jeunes générations en ont assez d’entendre à quel point la situation est terrible. On sait que les choses sont en mauvais état. Mais aujourd’hui, il est important de chercher notre humanité et de trouver une solution pour ne plus faire les mêmes erreurs. En attendant, il faut trouver comment vivre avec ce monde en crise. »
En 2013, elle découvre, accablée, les conséquences de Fukushima sur les populations. De fil en aiguille, menée par sa curiosité et face à la découverte de nombreuses catastrophes naturelles causées par l’humanité,
la cinéaste décide de mettre en lumière des situations critiques et le combat de personnes pour survivre dans un monde en crise. Rapidement, Shannon Walsh réalise que ses portraits se concentrent sur des femmes de tête.
« C’est amusant, dit-elle. Je n’ai pas choisi de me concentrer sur des figures féminines. Mais partout où je suis allée, il se trouve que c’étaient des femmes qui enclenchaient le mouvement et essayaient de créer un monde nouveau pour les générations futures. Je pense que quand on réfléchit, cela dit beaucoup sur le monde dans lequel on vit. »
Des petits moments de vie pour de grandes émotions
Et l’amour dans tout ça? En questionnant de jeunes adultes sur leur vision du quotidien, du couple et de l’amour, Claire Simon permet à la jeune génération de mettre des mots sur le comportement de la génération précédente. Composé de « duos » ou « trios » d’adolescents de 16 à 18 ans, discutant de leur vie personnelle, Premières solitudes évoquent les petites choses de la vie qui, si elles semblent anodines pour les adultes, impactent souvent durement la vision des adolescents sur le monde, l’amour ou leur place dans ce monde. Né d’un partenariat entre la ville et le lycée Romain Rolland, le film devait être à l’origine un court métrage de fiction réalisé en collaboration avec les élèves spécialité cinéma. Claire Simon raconte : « Comme je ne me sentais pas à l’aise d’écrire pour des jeunes adolescents que je ne connaissais pas, je leur ai demandé le premier jour de faire des entretiens. Que j’ai filmés. Je leur ai dit : Je suis beaucoup plus âgée que vous mais j’ai une expérience de la solitude, vous aussi, donc on peut partir de ça. »
Pour la réalisatrice, malgré la jeunesse des protagonistes, le sujet du film parle à toutes les générations, anciennes et nouvelle. « J’ai choisi la solitude comme question parce que ça me semblait l’expérience la plus intéressante à partager au-delà des générations. » précise-t-elle.
Trouver sa place dans le monde
Qu’ils abordent l’entrée dans la vie adulte tout en soignant leurs blessures d’adolescents, qu’elles tentent de se reconstruire suite à une agression sexuelle ou qu’elles tentent de survivre face à une catastrophe causée par l’homme, tous les protagonistes de ces documentaires ont une chose en commun : trouver leur place dans le monde dans lequel ils évoluent. Baljit Sangra raconte « Pour les sœurs, il s’agit de briser le silence, d’être entendues, par leur famille et par leur communauté. Elles veulent mettre en lumière la vérité et retrouver leur place au sein de leur famille, avoir leur père qui les regarde ». Shannon Walsh dépeint des portraits de femmes qui se battent pour créer un nouveau monde et trouver, en attendant, leur place dans un monde dévasté. Elle explique : « Peut-être que dans 10 ans, on pourra dire « ça y est, on a trouvé une solution »,
mais aujourd’hui, ce que font ces femmes et ce que nous faisons, c’est trouver comment dépasser cela, comme vivre dans un monde en crise que l’homme a créé ». Chez Claire Simon, il s’agit d’étudier la place de ces jeunes adultes dans le monde par rapport à leurs parents et leur vision de leur avenir. La réali-
satrice précise : « Ces petits moments de vie échangés par de jeunes adultes nous disent quelque chose de leur point de vue sur l’amour, sur l’éducation et comment cette génération voit ou ne voit pas le futur. »
De tous les horizons, de tous les âges et de toutes les origines, les protagonistes de Premières solitudes, Because We Are Girls et Illusions of Control aspirent à trouver une vérité qui leur est propre. Les trois documentaires seront diffusés au festival DOXA entre le 2 et le 12 mai 2019. Pour en savoir plus : www.doxafestival.ca