Le Canada est un pays officiellement bilingue, mais comme chacun le sait, en s’aventurant à utiliser le français dans les rues de Vancouver, cela ne se voit pas toujours. Pour les francophones de Colombie-Britannique, il est des moments où l’on espérerait que ce bilinguisme officiel soit une réalité, surtout dans les situations importantes ou difficiles, où l’utilisation de sa propre langue peut rassurer. Petit exposé donc sur les services en français disponibles dans deux secteurs où l’utilisation de sa langue maternelle est très désirée : la santé et le droit.
Plus de médecins travaillant en français qu’au Québec
Pour un francophone, obtenir des services médicaux en français est d’une importance primordiale. Dans des situations de grande incertitude, il est impératif de pouvoir comprendre ce qui se passe autour de soi et de se faire comprendre. Nombreux donc sont les moments où « la question de la langue est une question importante de sécurité et d’éthique », comme l’explique Séverine Debacker, gestionnaire des projets à Réso-Santé, une organisation visant à promouvoir le développement et l’accès aux services de santé en français de la province. Même en ce qui concerne des procédures médicales relevant plus de la routine, il est « important pour le patient d’être servi dans sa langue maternelle pour avoir un meilleur service.»
Fort heureusement pour les francophones de la province« on bénéficie en français en Colombie-Britannique de quatre fois plus de médecins per capita que le Québec » selon Louis Giguère, directeur de Réso-Santé. En effet, grâce aux écoles d’immersion et au statut privilégié du français dans le système scolaire par rapport aux autres langues minoritaires, il existe plus de 650 professionnels de santé dans la province offrant des services médicaux en français. On les retrouve dans tous les domaines, de la dentisterie à la massothérapie, en passant bien sûr par les médecins de famille. La communauté francophone est donc « une communauté assez favorisée, » affirme Louis Giguère. « Le seul défi c’est, parce que les gens qui offrent des services en français ont souvent des noms anglophones on n’est pas capable de les trouver sans avoir un outil ».
Cet outil, Réso-Santé le fournit sous forme de son « Répertoire des professionnels et professionnelles de la santé », accessible en ligne (www.résosanté.ca) ou alors dans l’Annuaire de la Fédération des francophones de la Colombie-Britannique. Cet outil ne cesse de grandir en utilité, augmentant à chaque année de deux à trois cents noms. En plus de fournir des renseignements importants aux francophones de la province, le répertoire encou-rage les professionnels à être proactifs dans leur offre de services vis-à-vis des francophones.
Toutefois, si l’on peut généralement trouver un service médical en français lorsqu’on le désire ; il existe un secteur du service de santé plus difficilement accessible aux francophones voulant se servir de leur langue. « Dans les hôpitaux il n’y a pas vraiment de services en français. Sauf que si t’arrives à l’urgence et tu parles seulement français ils vont essayer de trouver quelqu’un pour toi, » confie Louis Giguère.
Vu l’organisation des hôpitaux, un changement de ce côté-ci n’est pas à espérer très prochainement. Il est davantage probable qu’une amélioration de plus se réalise dans le secteur privé. Le grand espoir serait d’établir une clinique entièrement francophone.
Plus de droits,moins de services
Contrairement au secteur de la santé, les francophones jouissent de certains droits linguistiques dans le secteur juridique. Cependant, ces droits ne s’appliquent qu’aux procédures pénales, où l’accusé a, entre autres, le droit de se défendre devant un tribunal composé d’un juge, ou d’un juge devant jury qui s’expriment dans sa langue officielle. Pour ce qui est du civil, l’anglais est la seule langue dans laquelle peut se dérouler le procès. Ce qui mène l’Association des juristes d’expression française de la Colombie-Britannique (AJEFCB) à conclure que « si on veut éventuellement mettre en place des services [en français] il faudra le faire à travers la négociation avec la province. » Un travail de taille mais que l’AJEFCB continue à entreprendre avec le but, un jour, de mettre ces services sur pied.
Pour le moment, les francophones de la province doivent se satisfaire de trouver un juriste capable de les servir en français. Par contre, si l’AJEFCB estime que « parmi les professionnels juridiques on peux compter sur un peu moins de 10% qui sont capables d’offrir un service en français », il n’est pas aussi aisé de les retrouver que les professionnels de la santé. L’AJEFCB a établi un répertoire de juristes parlant français, mais celui-ci est encore à ces débuts.
La conclusion à en tirer? Si un francophone en Colombie-Britannique souhaite être servi en français dans les situations difficiles de la vie, il peut tomber malade autant que Dieu le veut. Mais il serait bien avisé d’éviter les embrouilles judiciaires, du moins pour le moment.