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le Lundi 7 avril 2025 20:30 Initiative de Journalisme Local

Vivre en français hors des grands centres urbains : un défi récurrent pour les femmes de la C.-B.

Vivre en français hors des grands centres urbains : un défi récurrent pour les femmes de la C.-B.
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Les femmes francophones de la Colombie-Britannique vivant en milieu rural font face à des obstacles spécifiques, notamment concernant l’accès aux services, l’intégration communautaire et les possibilités professionnelles.

Paul T Tshilolo – IJL-Réseau.Presse – Journal La Source

Isolement et accès limité aux services

L’isolement est un obstacle presque insurmontable pour les femmes francophones vivant dans des régions éloignées. Selon Anna Kaiava, chargée des communications de l’organisme Réseau-Femmes Colombie-Britannique, « la première difficulté que rencontrent ces femmes est l’isolement. C’est pourquoi nous essayons d’aller à leur rencontre et de leur permettre d’intégrer un réseau ». L’organisation met en place divers programmes pour briser cet isolement, comme la Ressource mobile, qui propose plus de 100 ateliers gratuits, accessibles en ligne ou en région.

Lyne Chartier et sa fille | Crédit : Lyne Chartier

Pour Lyne Chartier, une francophone qui vit à Nelson depuis 17 ans, les difficultés sont bien réelles : « Il y a plusieurs manières d’être une femme francophone à Nelson. Celles qui ont des enfants se regroupent et participent aux activités de l’Association des francophones des Kootenays Ouest (AFKO), mais d’autres restent isolées, notamment celles qui viennent ici pour le sport et le style de vie. »

L’accès aux services en français demeure un enjeu de taille, surtout dans le domaine de la santé. Lyne Chartier souligne les difficultés rencontrées : « Vivre la ménopause ou la dépression dans un environnement où les ressources en français sont quasi inexistantes est très difficile. Il faut chercher ces ressources en anglais, et c’est un tout nouveau vocabulaire à apprendre, ce qui complique l’accès aux soins et au soutien ».

Un marché du travail et des infrastructures peu adaptés

Outre l’isolement, l’intégration professionnelle est un autre défi. De nombreuses femmes francophones ont du mal à trouver un emploi correspondant à leurs compétences et où elles peuvent travailler en français. « Nous reconnaissons que les ressources disponibles pour les femmes francophones sont insuffisantes », affirme Anna Kaiava. « Nous essayons d’offrir des programmes pour les accompagner, mais cela dépend beaucoup des financements gouvernementaux ».

Le manque d’infrastructures francophones est aussi un frein à leur développement personnel et professionnel. « Il est très difficile d’avoir accès à l’éducation en français en région. Si on veut étudier en français, c’est 100 % en ligne, ce qui limite les possibilités », explique Lyne Chartier. « Les services de garde sont rares et coûteux, ce qui complique encore plus la conciliation travail-famille ».

Le rôle essentiel des organismes communautaires

Face à ces difficultés, des organismes comme Réseau-Femmes Colombie-Britannique jouent un rôle essentiel. Avec 19 regroupements à travers la province, l’organisme cherche à créer des espaces d’échange et de soutien pour les femmes francophones. « La moitié de nos regroupements évoluent en région, mais nous avons du mal à maintenir certains groupes actifs faute de ressources et de participantes », reconnaît Anna Kaiava.

Un exemple édifiant est celui de Prince George, où un regroupement dynamique de femmes arrive à rassembler plus de participantes que certains groupes de Vancouver. « Nous aimerions relancer des regroupements dans d’autres régions, comme à Nelson, où l’activité est actuellement en pause », ajoute-t-elle.

Des solutions pour un avenir meilleur

Pour améliorer la situation des femmes francophones en région, plusieurs pistes sont envisagées. Lyne Chartier insiste sur l’importance de créer plus de possibilités de rencontres et d’activités financées : « Il faudrait offrir davantage de bourses pour organiser des activités et des rencontres, afin de renforcer les liens communautaires ».

L’accès aux services de soutien, plus particulièrement pour les femmes victimes de violence, est aussi un enjeu crucial. « Si une femme francophone est battue ici, je ne sais pas quels services en français sont disponibles localement. Peut-être qu’elle pourrait appeler l’organisme Inform’elles, mais il n’y a pas de ressources claires », regrette-t-elle.

De son côté, Réseau-Femmes promet d’accroître ses efforts pour offrir des programmes adaptés, mais l’organisme demeure dépendant des politiques gouvernementales. « Nous faisons tout notre possible pour accompagner ces femmes, mais sans soutien financier accru, il est difficile d’étendre nos services », conclut Anna Kaiava.

Bien que la communauté francophone en région rurale continue encore de maintenir sa vitalité, elle reste confrontée à des obstacles importants. Une meilleure reconnaissance des besoins de ces femmes et un soutien accru des institutions publiques permettraient de renforcer leur inclusion et leur bien-être au sein de la population britanno-colombienne.