le Mardi 18 mars 2025
le Jeudi 6 février 2025 22:45 | mis à jour le 18 février 2025 11:02 Société

Les forêts anciennes de la Colombie-Britannique : le dernier pour cent

Les forêts anciennes de la Colombie-Britannique : le dernier pour cent
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Le gouvernement de la Colombie-Britannique indique que 14 % de ses terres sont protégées. Si certains scientifiques estiment que 30 % sont nécessaires pour la durabilité, la plupart affirment que 50 % sont indispensables pour garantir une planète habitable. | Crédit : TJ Watt, Creative Commons

La protection et la restauration des forêts de la Colombie-Britannique, notamment des forêts pluviales tempérées côtières et intérieures d’importance mondiale, sont considérées par les scientifiques comme essentielles pour atteindre l’objectif de 30 % de protection des terres d’ici 2030.

Marie-Paule Berthiaume – IJL – Réseau.Presse – Journal La Source

La biologiste professionnelle agréée, Amber Peters, indique que « les experts de l’industrie admettent avoir scié la branche sur laquelle nous sommes assis. Le Global Wood Summit, tenu en octobre 2024 à Vancouver, a d’ailleurs abordé la question de la  » réduction de la fibre « , en référence à la diminution de la ressource. »

Amber Peters entreprendra une tournée en Colombie-Britannique en février 2025 avec le nouveau film de la Valhalla Wilderness Society, SAFE HAVEN: The Rainbow-Jordan Wilderness, dans l’espoir de reproduire l’impact de conservation occasionné par le documentaire Primeval: Enter the Incomappleux. | Crédit : Tévan Wilson

Parler tout en coupant

Amber Peters remet en question les discours gouvernementaux remplis de bonnes intentions et confirme que la plupart des recommandations passées en matière de protection des forêts anciennes, souvent reprises d’un rapport à l’autre, n’ont pas été appliquées. Selon elle, des décennies d’ingérence, de coupes à blanc et de protections insuffisantes ont rendu les écosystèmes de la province vulnérables aux incendies de forêt, aux inondations, aux sécheresses et au déclin de la biodiversité.

« Il reste moins de 1 % des forêts anciennes à grands arbres, les plus productives et riches dans la province, comme l’indique le rapport 2020 BC’s Old Growth: A Last Stand for Biodiversity. Ces forêts fournissent de l’eau douce, stabilisent le sol et agissent en tant que banques de carbone vitales à l’échelle mondiale. Elles stabilisent le climat, mais en réduisant leur capacité, elles contribuent désormais au changement climatique en brûlant », explique-t-elle.

Lors d’une conférence au Capitol Theatre de Nelson le 27 janvier 2025, la responsable du Mother Tree Project, Suzanne Simard, a déclaré que la forêt pluviale intérieure de la province a presque la même capacité de stockage de carbone que la forêt pluviale côtière, qui rivalise avec celle de l’Amazonie. | Crédit : Jdoswim, Creative Commons

Forêt pluviale tempérée intérieure

Malgré ce constat, Amber Peters reste optimiste grâce aux efforts de conservation, comme la proposition de la Valhalla Wilderness Society pour trois nouveaux parcs dans la zone humide Interior Wetbelt, en réponse aux recommandations du rapport de 2010 intitulé Conservation of Ecological Integrity in B.C. Parks and Protected Areas mené par le bureau du vérificateur général de la C.-B.

« Nous avons la possibilité de préserver la biodiversité, de soutenir les espèces en péril et de protéger les écosystèmes vitaux pour les générations futures. Mais pour y parvenir, il faut sensibiliser les décideurs et renforcer le soutien offert aux initiatives de conservation », déclare Amber Peters.

Le dernier bastion

La fondatrice d’Elemental Journeys et guide de plein air, Andrea Fox, a planté des arbres pendant plusieurs années. « En juin 2021, lors du dôme de chaleur qui a frappé l’Ouest canadien, je voyais les arbres mourir à mesure que je les plantais. Pour échapper aux feux de forêt cet été-là, je me suis rendue sur l’île de Vancouver, le seul endroit dans la province sans fumée. Par hasard, j’ai rejoint le mouvement activiste Last Stand à Fairy Creek, puis, par la suite, Last Stand West Kootenay. »

Andrea Fox a reçu le prix Suzy Hamilton Legacy en 2024 pour son engagement exemplaire en faveur des forêts anciennes, de la biodiversité et des initiatives entreprises avec Last Stand West Kootenay.

Andrea Fox partage son parcours empreint de dévouement, jalonné de victoires et de revers dans la lutte pour protéger les forêts anciennes. 

Malgré ses efforts de négociations avec l’industrie forestière et les dérogations obtenues, elle reste aujourd’hui « accablée » par la destruction progressive des arbres et forêts qu’elle s’efforce de préserver.

« C’est en grande partie dû à l’incapacité du gouvernement à appliquer intégralement les recommandations d’experts, comme celles que l’on retrouve dans le rapport Old Growth Strategic Review (OGSR), publié en septembre 2020 », explique Andrea Fox.

Selon le ministère de la Forêt de la C.-B., la province « continue de progresser dans la conservation des arbres les plus anciens et les plus rares, tout en favorisant une sylviculture durable qui génère davantage d’emplois locaux pour chaque arbre récolté. »

En réponse à l’une des recommandations de l’étude OGSR, le ministère affirme avoir mis en place des moratoires volontaires sur l’exploitation forestière respectées par les titulaires de permis forestiers de la région de Kootenay-Boundary. « Ces moratoires sur la récolte des forêts anciennes resteront en vigueur jusqu’à ce que la province, les Premières Nations et l’industrie puissent élaborer une approche durable et à long terme pour la gestion de ces forêts dans la région de Kootenay-Boundary », précise le ministère de la Forêt.

Une carte confidentielle divulguée en 2024 aux médias révèle que le gouvernement a déplacé plus de la moitié des moratoires établis vers des zones de moindre valeur, rendant ainsi les forêts anciennes exploitables.