“Go Canucks go !” A l’heure où d’aucun s’interroge sur ce que signifie être Canadien, les visages enjoués de Vancouvérois venus d’ici et d’ailleurs nous rappellent qu’un simple but peut effacer bien des différences quand arrive le moment de le célébrer dans une ambiance enivrée où les néophytes côtoient les habitués. Le hockey comme facteur d’intégration, il fallait y penser, les Canadiens l’ont fait !
Mais laissons un instant de côté la coupe Stanley pour s’intéresser aux festivals d’été qui, eux aussi, ont un rôle à jouer pour souder une population constituée de près de 50% d’immigrants (Statistiques Canada). Entre juin et septembre, plusieurs cultures seront ainsi représentées : Japon, Inde, Grèce, Italie, Scandinavie, Caraïbes, Francophonie… Un immense patchwork s’annonce à l’horizon.
Mais pourquoi montrer tant d’attachement à sa culture d’origine au point de vouloir l’exposer aux yeux de tous ? Ne faudrait-il pas y voir une tentative de repli identitaire ? Il est vrai que la plupart des individus ont par nature tendance à fréquenter des personnes de leur culture en vertu de l’intériorisation des représentations sociales dont parle notamment le psychologue Jean Piaget. Cette situation est connue à Vancouver comme dans d’autres villes occidentales très cosmopolites.
Communautés plutôt que communautaires
Toutefois, ne voyons pas dans ces festivals un dessein communautariste mais plutôt une volonté d’insertion. A la différence de pays comme la France, où le principe d’assimilation invite la culture d’origine à se cantonner à la sphère privée pour favoriser l’unité, le Canada, au nom des libertés individuelles, n’interdit pas le maintien des différences quand elles ne font pas obstacle aux dynamiques d’échanges.
Justement l’échange, c’est précisément ce dont il est question dans ces festivals. Le Minsitère du Patrimoine canadien a par exemple récemment salué « les efforts du centre portugais de Vancouver, qui, à travers ses actions culturelles, bâtit de nouveaux ponts de compréhension entre les peuples. »
Parfois vieux de plusieurs dizaines d’années, les principaux festivals ethniques de la ville et de la Colombie-Britannique ont pris de l’ampleur et s’attachent à perpétuer cet état d’esprit. Bien sûr, il s’agit en premier lieu de mettre en lumière sa culture d’origine à l’instar du Powell Street Festival qui fêtera ses 35 ans les 30 et 31 juillet. Au programme : découverte des arts asiatiques et volet historique sur la présence japonaise à Vancouver. Pour Julia Aoki, la Directrice générale, « Il est difficile d’identifier une raison unique pour justifier de la mise en place de cet événement. Au départ, je pense vraiment qu’il s’agissait d’une volonté des Canadiens japonais d’utiliser la culture pour renforcer la cohésion au sein de la communauté. Toutefois, la cohésion ne signifie pas l’uniformité et nous espérons que la diversité de notre programmation permet aux gens d’explorer la complexité de la culture japonaise. »
Le désir d’aider la communauté marque également la raison d’être de ces festivals comme le montre l’exemple du Greek Summer Festival qui se déroulera du 30 juin au 10 juillet sur Boundary Road. De simple fête de quar-tier lors de sa création en 1985, l’événement a depuis changé de statut pour devenir un des temps forts de la période estivale, fréquenté annuellement par presque 40 000 personnes. « Nous souhaitons servir au mieux les membres de la communauté » témoigne Eleni Angelopoulos, membre de l’équipe d’organisation. « Cela permet de participer au financement de la construction du foyer municipal qui abritera notamment une école orthodoxe grecque mais aussi un gymnase et des salles de réunion. » Une perspective compatible avec le partage culturel dans la mesure où « la plupart des visiteurs sont issus de pays différents » comme l’assure l’intéressée.
Vive l’ouverture !
En effet, on observe que les communautés ne se tournent pas uniquement sur elles-mêmes mais prônent au contraire l’ouverture d’esprit dans la tenue de leur festival.
C’est le cas du TD Vancouver Chinatown qui accueille chaque saison 50 000 visiteurs issus d’horizon différents. « Vancouver est souvent considérée comme une des villes les plus multiculturelles au monde », témoigne une des personnes en charge de l’événement. « Nous ne souhaitons pas uniquement promouvoir la culture chinoise auprès des Chinois (Selon Statistique Canada, environ 400 000 Chinois vivent dans le Grand-Vancouver), mais également auprès de ceux qui viennent du monde entier. Nous joignons d’ailleurs plusieurs cultures avec des danses et des musiques indiennes, mexicaines, coréennes et africaines. »
L’organisation Trinidad and Tobago Cultural Society of British Columbia va même encore plus loin dans sa volonté d’ouverture. Son Président, David Smith, explique ainsi qu’un des objectifs poursuivis par le Carribean Days Festival, est « de contribuer au développement de la culture ca-nadienne en présentant un événement multiculturel qui se veut le reflet de la société canadienne. » Les participants venus des quatre coins du monde se donneront cette année rendez-vous les 23 et 24 juillet à Waterfront Park, à North Vancouver.
Danser la Salsa avec un verre de rouge à la main au milieu d’Asiatiques qui dégustent des bananes plantains, après tout, c’est peut-être cela être Canadien…