Immigration vient du mot latin migratio, qui veut dire le passage d’un lieu à l’autre.
C’est à l’aube du nouveau siècle que j’ai décidé de partir à Vancouver, dans le but d’améliorer mon anglais. Et contrairement à toutes mes attentes, mon expérience dans la belle Colombie-Britannique se poursuit encore aujourd’hui.
Je me souviens de mes premiers jours. Ce qui m’a le plus marqué, c’est la différence de la taille des bouteilles de Coca-Cola dans les gigantesques supermarchés de Coquitlam. Est-ce ça le rêve nord-américain, l’abondance, la grandeur, l’ampleur ? … mmh moi je préfère dire plutôt l’espace, l’air, l’océan, cette belle nature qui enveloppe la ville de sa prestance et de sa force.
En France, Paris est la reine. Cette belle ville, chouchou des touristes, s’impose avec prestige. Paris, Ville-lumière, où tous est monopolisé, à tel point que je n’arrivais plus à y respirer. Trop grouillante, trop bondée, trop râleuse, trop belle et prétentieuse, mais je l’aime quand même. Comment ne pas succomber à son histoire, son élégance, ses musées, ses cathédrales, ses terrasses de cafés, sa culture, sa gastronomie, ses nuits folles… C’est drôle, j’ai l’impression que Paris contient en elle-même toute la France, ça n’est plus une ville, c’est tout un univers.
Lorsqu’ on arrive dans un autre pays si différent de son pays d’origine, il arrive souvent que l’on se sente tout petit, un peu perdu, donc il faut prendre son courage à deux mains et réapprendre tout, comme un nouveau-né. Comment fonctionnent les transports, la banque, les routes, les logements, les magasins … Si on est aventureux on s’émerveille devant tous ces changements. Mais si on est moins curieux, on veut vite repartir au pays, retrouver ses habitudes. Être dans son cocon. Personnellement, j’adore l’idée d’embrasser le monde entier dans mes petits bras. Au fond, ne sommes-nous pas tous citoyens de la même planète ? Alors pourquoi ne pas élargir ses horizons et sa perception ?
Le changement est aussi vecteur de choc culturel. Le plus dur pour moi a été cette sensation indéfinissable de solitude. D’une ville sociale, culturelle, je me suis retrouvée dans une ville distante et sportive. Au début, ce n’était pas évident, je préférais les cigarettes au yoga, la bonne bouffe aux fast-food. Et le plus dur, c’était de me voir devenir une mendiante, affamée d’un peu de chaleur humaine. Trop isolée, trop séparée, trop d’incompréhensions, de malentendus, de colère, de rage, seule au bout du monde. Mais un jour la lumière fut. J’ai compris que j’étais passée d’une extrémité à une autre, afin de trouver le juste milieu. Il est vrai que la culture anglo-saxonne peut paraître plus distante que celle des “latins” plus émotifs et dramatiques.
Entre chaud et froid je suis passée au tiède et c’est à ce moment que j’ai réalisé que même en France, j’étais seule, la vie sociale ne faisait, en fait, que masquer ma solitude. Pourquoi se sentir si seule même dans son propre pays ? Peut être parce qu’on a juste besoin de se retrouver. Notre maison, c’est nous, tout simplement.
Voyager n’est pas suffisant, il est nécessaire de rester plusieurs années ailleurs pour apprendre à vivre différemment, sortir de ses habitudes et élargir sa perception.
Le Canada et sa gigantesque bouteille de Coca-Cola sont ainsi pour moi le symbole de mon ouverture d’esprit, de l’espace, de ma reconnexion avec la nature, avec moi-même, je respire. Ça me change bien des petites rues précieuses de Paris. Paris, je t’aime, Paris, tu me manques, mais j’ai le sentiment d’appartenir à la terre entière, et ça m’aide à en apprendre davantage sur moi-même, à me retrouver, à grandir, à trouver ma liberté.