Nouvel An chinois, entre traditions et mondialisation

The Year of the Dragon - Illustration par Diana Lippolis

The Year of the Dragon - Illustration par Diana Lippolis

Huangdi 4710 a été entamée lundi, par de nombreuses festivités, aux quatre coins du monde. Le lapin de métal blanc a donc laissé la place au… dragon d’eau, emblème de cette nouvelle année dans le calendrier chinois. Plus de deux milliards de personnes ont participé à la célébration dans le monde et la Chine a été le témoin d’environ trois milliards de trajets à travers son territoire. Traversant le temps et les frontières, la fête demeure un véritable phénomène.

Une cérémonie incontournable

Si la Chine et les pays de l’Asie du Sud-Est ont accepté le calendrier grégorien dans leurs administrations, ils restent très attachés au calendrier dit « luni-solaire » dans leur vie quotidienne. Suivant ce dernier, nous avons donc assisté, lundi 23 janvier, au commencement d’une nouvelle Lune. La date marquant le début de la nouvelle année varie ainsi tous les ans, mais reste située entre le 21 janvier et le 20 février. Comme dans le calendrier grégorien, ce moment signifie le renouveau, le moment où l’on fait le bilan de l’année écoulée et où l’on prend des engagements pour celle qui s’annonce. Cette fête incontournable est souvent célébrée en famille. Chacun se rendant chez ses proches, les embouteillages vont de pair avec la soirée du réveillon ! C’est un évènement majeur dans la culture chinoise, donnant lieu à la plus longue période fériée de l’année : sept jours. Les Philippines, Taïwan, Hong Kong ou l’Indonésie offrent trois jours de repos aux salariés.

De nombreuses coutumes sont observées. Autour du dîner familial, le soir du réveillon voit crépiter les pétards et les feux de Bengale. Des étrennes sont offertes dans des enveloppes rouges – couleur de la chance, du bonheur, de la santé, ainsi que du système communiste. Le premier jour de l’année, les familles se rendent au temple. Bien que les congés ne durent que quelques jours, les festivités se poursuivent jusqu’au quinzième jour du premier mois (cette année, le 6 février), qui marque la fête des lanternes. Pour clore les célébrations, les familles se promènent le soir, une lanterne à la main.

Contrairement au nouvel an du calendrier grégorien des sociétés occidentales, le nouvel an chinois est empreint d’une symbolique fondamentale. Chaque nouvelle année se déroule à la lumière d’un élément et d’un signe du zodiaque, dont le mariage donne lieu à de nombreuses hypothèses sur les évènements heureux et tragiques à venir. Cette symbolique demeure centrale, bâtie autour de l’anthropomorphisme : on attribue à douze animaux et cinq éléments naturels, des caractéristiques comportementales. Ainsi, dans l’astrologie chinoise, le dragon d’eau fait figure d’animal caractériel et l’eau d’élément apaisant et fluide ; 2012 est attendue comme une année tiraillée entre détermination et discussions, où le compromis adoucira les tensions. Cette symbolique est comprise comme atteignant les domaines du politique et du familial, et comme déterminant le feng-shui, l’énergie du bien-être, des nouveau-nés.

Une fête mondiale et commerciale

Le nouvel an chinois n’est plus simplement chinois : la mondialisation est au centre du phénomène. San Francisco, Paris, New York et bien d’autres, ont fait du nouvel an une fête communautaire et commerciale, construite quasi-systématiquement autour d’une parade. 50000 spectateurs sont, par exemple, attendus à celle de Vancouver qui aura lieu dimanche 29 janvier, à partir de midi. Départ situé au Millennium Gate, sur Pender Street.

À l’étranger, la commémoration se traduit par ce que la chercheuse française Estelle Auguin, a appelé un « théâtre d’économies ethniques ». Les quartiers communautaires rencontrent une foule de spectateurs, s’ouvrent à la commercialisation d’accessoires tels que masques, costumes, maquillages, cartes postales… Le milieu de la restauration connaît également un boom. Même la Poste canadienne imprime deux timbres spéciaux en édition limitée pour l’occasion, dessinés cette année par le graphiste Louis Fishauf.

« Il est vrai que les commerçants, en Chine comme à l’étranger, essaient de vendre davantage, sur fond d’atmosphère d’excitation générale ; mais cela reste avant tout une tradition. On peut comparer ça à Noël, en un sens… Même si le nouvel an reste plus festif, plus heureux, plus bruyant. », reconnaît Vicky, 19 ans, étudiante à l’Université de Colombie-Britannique (UBC). Vicky, d’origine chinoise, a vécu à Hong Kong depuis ses 5 ans et jusqu’à son entrée à l’université. Elle a toujours fêté le nouvel an, entourée de sa famille : « Le nouvel an demeure, en Chine, la grande occasion de se réunir tous ensemble ».

Pourtant, Vicky admet qu’elle se sent un peu éloignée de l’évènement. Elle attribue cela à la fois à la distance géographique et à son âge. Résidant au Canada, elle n’observe plus toutes les coutumes habituelles, comme « ne pas manger de viande le premier jour de l’année, par exemple ».

La nouvelle génération semble en permanence osciller entre honneur d’une tradition fami-liale et affranchissement. Même si l’attachement à la symbolique et au feng-shui ne faiblit pas, les plus jeunes remarquent que le nouvel an chinois n’est désormais plus l’affaire « que d’une journée, au lieu de deux semaines ».

Malgré quelques timides mutations, la fête conserve son statut d’évènement de l’année. Le nouvel an chinois reste l’occasion d’espérer, autour de ses proches, des lendemains heureux…

Bonne année !

Parade de Vancouver, 29 janvier 2012, 12h.

Renseignements :
www.cbavancouver.ca/parade.html