Afin de mieux vivre cet hiver qui n’en finit pas, j’ai décidé, pour me changer les idées, de penser à autre chose qu’à la vie politique que l’on nous impose. Ma patience, souvent mise à l’épreuve, et mon niveau de frustration, chaque jour exacerbé, ont des limites. Ma santé mentale en souffre. Je suis au bord du gouffre. Mon exaspération a atteint son trop-plein.
Un peu de répit pour mes soucis. J’ai besoin d’un changement. D’un changement radical. Le moment est donc venu de tout lâcher. Attention, je ne suis, ni lâche, ni lâcheur pour autant. J’ai besoin simplement de penser à autre chose. À quelque chose de réjouissant. Ça doit se trouver.
Tiens, le jubilé de la Reine par exemple. Pourquoi pas ? On dirait que cela fait des heureux. À chaque visite de notre royauté, les admirateurs se pressent sur son passage et les moments de liesse générale ne courent pas les rues ces temps-ci. Voilà donc ce qu’il me faut. Des images de jubilation collective pour apaiser et tranquilliser mes nuits. J’y pense, donc j’y suis. Voilà. Oui, c’est bien.
Un petit instant… Mais qu’est-ce que c’est ? Ah, non. Mon découragement reprend le dessus. Chassez le naturel, il revient au galop. C’est de trop. Adieu jubilé. Bonjour tristesse, madame Sagan. Pendant que la Reine jubile je me fais de la bile.
Autant le dire tout de suite : je suis républicain de cœur et anti-monarchiste par principe. Voilà pourquoi, en cette année du jubilé, la moutarde anglaise et non de Dijon me monte au nez. Mon sang est rouge et non bleu. Je ne pourrais donc jamais accéder au trône.
Mes enfants non plus. Tant pis ou tant mieux pour eux. Entrons quand même dans l’arène, à Buckingham Palace exactement, le lieu de résidence de sa majesté la Reine dont nous sommes, bon gré mal gré, les sujets pour le moment. En cette année du jubilé, rien ne peut me faire jubiler.
Pensez-y : l’Angleterre doit nous envoyer le prince Charles et sa compagne à qui, autrefois, alors qu’elle était sa maîtresse, il avait écrit un billet doux lui indiquant qu’il rêvait d’être son tampon hygiénique.
Quelle royale délicatesse. Et c’est lui l’héritier qui, un jour, risque de nous gouverner ? Son voyage devrait être commandité par Kotex et non par les contribuables canadiens. À bien y penser, pas très appétissante cette visite.
La Reine et son prince consort (un peu trop souvent) auraient pu faire le déplacement ou nous envoyer quelqu’un d’autre. À la limite j’aurais trouvé la visite de ses chiens Corgis plus acceptable.
Le prince William et Kate Middleton, duchesse de Cambridge, sa nouvelle épouse, auraient pu, à la rigueur, convenir. Bill (permettez-moi de l’appeler ainsi, vu son jeune âge) et sa chère compagne ont un certain panache. Le monde se les arrache. Et tant pis si la reine se fâche. Ils ont du chien, ces chiots là.
De son côté Harry, le plus jeune prince, a préféré se rendre aux Antilles, où il n’a cessé de faire la fête. Je me demande s’il avait emporté, dans ses bagages, son costume de SS qu’il aime porter lorsqu’il veut s’amuser. À bien y penser, je ne suis pas mécontent que ce prince sans rire ne nous ait pas honoré de sa présence. La royauté, décidemment, n’est pas de toute beauté.
Toutefois, si la monarchie voulait vraiment séduire les Canadiens, elle aurait envoyé Pipa. Pipa, la fille à papa, le papa de Kate. Kate en quête de quoi ? Et moi qui m’inquiète. Mais où est passé Pipa ? Pipa ? Pipa ? Nulle part. Pas de Pipa par ci. Pas de Pipa par là. On ne lui demande pas son avis à Pipa. Dans ses nouvelles fonctions Pipa peut peu.
Alors, qu’on le veuille ou non, c’est Charles qui s’en vient. Le charlot de circonstance que l’on va recevoir en grandes pompes. Je n’ai pas l’intention de cirer les miennes ni les siennes lorsqu’il sera là.
Si ce n’était que de moi, on le recevrait sur l’un des quatre sous-marins en piteux état que les Britanniques nous ont vendus. Oui, celui avec des avaries. Celui qui a été victime d’un petit carambolage. Un sous-marin qui, comme nos condos, connaît des problèmes d’étanchéité.
On laisserait aller le prince à la recherche d’Ogopogo, au fond du lac de l’Okanagan. Ça leur apprendrait, aux Britanniques, ces vendeurs d’amphibie d’occasion, de nous bazarder des sous-marins citrons. Si au moins ils étaient jaunes ! Et l’on voudrait que je jubile…