Héros de la liberté d’informer, agitateur de données confidentielles à la barbe des Etats et des organisations corrompues, le fondateur de Wikileaks, Julian Assange, est aujourd’hui reclus dans un carré équatorien de quelques mètres en Grande-Bretagne, pour échapper à la justice.
Hébergé à l’ambassade du président de l’Équateur Rafael Correa, il cherche à échapper à tout prix à l’extradition vers la Suède qui l’a placé sous mandat d’arrêt, pour une affaire de viol présumé. Il cherche également à échapper à la justice américaine, qui est très affectée par les révélations de Wikileaks relatives à la guerre en Irak et Guantanamo, ou encore au dénudement des tuyaux de relations diplomatiques des Etats-Unis avec le reste du monde (250 000 télégrammes).
Un sacré coup de canif dans le miroir de l’Amérique, qui depuis nourrit sa vengeance et a fait d’Assange un homme à abattre. Il risque selon lui jusqu’à la peine de mort pour espionnage.
On se souvient notamment dans ses révélations comment l’ancien directeur du service canadien du renseignement de sécurité, Jim Judd, avait alors qualifié la vision du monde des Canadiens d’angélique “à la Alice au pays des merveilles”, dans une discussion avec un conseiller du département d’Etat des Etats-Unis.
Alors oui Assange a de quoi craindre toute extradition. Mais pourquoi le récipiendaire de plusieurs prix de journalisme a-t-il choisi la protection de l’Equateur et de ce président régulièrement mis à l’index par les Organisations Non-Gouvernementales (ONG) pour atteinte à la liberté de la presse et connu pour avoir fermé à tour de bras des chaînes de télévision indépendantes ?
Pour des raisons politiques et idéologiques d’abord. Assange avait besoin d’un porte-parole antiaméricain pur jus. Ce dernier, qui a par ailleurs le soutien des pays de l’Union des États sud-américains, milite désormais à ses côtés pour que la Grande-Bretagne et la Suède se positionnent contre l’extradition d’Assange aux Etats-Unis. Une petite bombe diplomatique, mais beaucoup de bruit, pour ce petit pays de 15 millions d’habitants enclavé entre la Colombie et le Pérou, qui malgré le libellé de sa monnaie en dollars américains, marque ainsi son indépendance vis-à-vis de la super-puissance.
Néanmoins, l’ancien hacker qui sur son site souligne que WikiLeaks a “survécu et triomphé contre les attaques judiciaires et politiques ayant pour but de réduire l’organisation, ses journalistes et ses sources anonymes au silence”, ne fait-t-il pas entorse à ses principes à travers cette alliance ?
Si l’objectif est de sauver sa peau et de protéger l’existence de son organisation à tout prix, c’est peut-être un moindre mal. Mais en tout cas, l’image du héros de la liberté d’expression en ressort quelque peu écornée.