Ô Canada ! C’est en entamant l’hymne national canadien le 11 juillet 2012 dans les locaux de Citoyenneté et Immigration Canada, que j’ai enfin pu savourer ma citoyenneté canadienne en français et en anglais. Une journée marquée du sceau du mérite, puisque j’ai dû attendre près de 10 mois une date de cérémonie officielle après avoir passé et réussi le test requis pour le prétendant « au titre » de citoyen(ne). Ce jour-là, 83 personnes de toutes origines ont écouté Madame le Juge donner son discours dans les deux langues. Je revois très bien encore le blason accroché au mur juste derrière elle, symbole du Canada représenté par les armoiries de la royauté anglaise (le lion et la harpe) et française (la licorne et la fleur de lys). Il y avait cette devise inscrite en latin juste en dessous : A Mari usque ad Mare, signifiant d’un océan à l’autre.
Cette devise fait d’autant plus écho, que mes ancêtres étaient certes gaulois, mais aussi bretons ! De l’Atlantique au Pacifique, je me suis donc lancée à l’aventure au Canada, plus précisément à Vancouver. Pourquoi ? Quand je suis arrivée il y a quatre ans et demi, je n’aurais jamais pensé une seconde rester aussi longtemps. Forte de ma résidence permanente chèrement acquise après un an et demi d’attente en France (patience est mère de vertu), j’ai très vite ressenti un sentiment d’intense liberté. A la vue de ces montagnes, le sentiment d’être au bout du monde m’a submergé. J’ai aussi très vite compris l’origine du sobriquet donné à Vancouver : terminal city. Terminus tout le monde descend ! J’ai traversé l’Atlantique et tout le Canada pour arriver à l’entrée du Pacifique. Un si long parcours guidé par une seule chose : l’envie d’évoluer. Le Canada est une terre d’immigrants et c’est sur la base de l’immigration et du multiculturalisme que s’est construite l’identité canadienne. C’est sur cette même base que j’ai eu envie de sortir de la masse, de m’extraire d’une identité européenne forte de ses origines et de son identité culturelle, mais parfois étouffante et rigide pour ses propres enfants. Je viens d’un endroit où quand on est jeune, on n’a pas la même place que des personnes plus âgées. Ici la jeunesse, c’est le fuel de cette société. Les jeunes sont beaucoup plus considérés. On peut essayer, rater, recommencer, apprendre et pour finir avancer, parce qu’on apprend toujours de ses expériences passées.
A la veille de mon départ pour Vancouver, j’ai eu une conversation téléphonique avec un homme immigré depuis de très nombreuses années. Et ce vieux sage m’avait dit : « Hélène, en Amérique du Nord rien n’est jamais acquis ! » Et c’est vrai, rien ne l’est ! C’est au travers de mes différents emplois, stages et bénévolats que j’ai pu réaliser que le Canada était un endroit où on pouvait créer littéralement sa vie. Une créativité empreinte parfois d’angoisse, de peur du lendemain, mais c’est aussi la capacité de tout un chacun de savoir rebondir. Ma cérémonie de citoyenneté c’est une boucle qui s’est bouclée sur quatre ans et demi d’apprentissage pour rester au Canada. Je n’oublie pas qui je suis, ni d’où je viens (mon grand-père s’en retournerait dans sa tombe). La France sera toujours mes racines, mon berceau natal, mon sang puisque toute ma famille est là bas. Mais le Canada, c’est tout simplement une extension de moi, le jardin que je cultive ! Comme quoi on peut être Française et Canadienne, je crois que ça s’appelle être Franco-canadienne ! Et j’en suis fière, « keep calm and carry on » est devenue depuis lors ma devise !