Dans son discours de politique générale, l’ancien premier ministre français Lionel Jospin affirmait « trouver sa place dans la société, c’est d’abord trouver un emploi ». Il s’agit aussi de l’objectif de la quasi-totalité des francophones qui viennent vivre en Colombie-Britannique. Qu’ils viennent de la province du Québec, de France, d’Afrique ou d’Asie, l’emploi est la préoccupation numéro un des nouveaux arrivants.
Découvrir les spécificités de la province
Il s’agit d’ailleurs d’un besoin que les associations d’accueil des nouveaux arrivants ont très bien identifié, comme Vancouver en Français (VeF) ou Français du monde à Vancouver. Elles organisent chaque mois des ateliers dans le but de familiariser les francophones avec le marché de l’emploi en Colombie-Britannique en échange d’une contribution symbolique (5$ pour VeF). Le succès est au rendez-vous car si ces ateliers accueillaient une dizaine de personnes au début, ils reçoivent aujourd’hui plus d’une trentaine de participants à chaque session.
Dans les ateliers de VeF, Emmanuelle Archer (consultante en recherche d’emploi) dresse la liste des caractéristiques particulières du marché du travail local et auxquelles les francophones ne sont pas préparés. Les différences sont nombreu-ses, puisque contrairement aux pays francophones (Canada mis à part), la personnalité, la communication et le charisme comptent bien plus dans le CV canadien que les compétences techniques des candidats. Ce n’est pas tout, explique-t-elle : « Ici, on est dans une culture qui a vraiment énormément de mal avec la négativité, sous toutes ses formes. (…) Nous, quand avec notre approche de français râleurs, on se pointe, et bien on est un peu comme un éléphant dans un jeu de quille ».
D’où la nécessaire adaptation que doivent accomplir les francophones pour gagner la con-fiance et la sympathie de leurs employeurs potentiels. Parmi les quelques conseils que vous recevrez, vous aurez par exem-ple : Evitez d’employer le mot « problem », préférez lui le terme « challenge », ne pas chercher à poser des rapports de force, mais coopérer pour trouver des solutions. Ne pas fuir ses collègues, mais s’intégrer harmonieusement à l’équipe, même en dehors du travail. Des concepts qui peuvent surprendre les francophones habitués à des marchés du travail extrêmement difficiles ainsi qu’à des ambiances d’entreprises beaucoup plus rigides et hiérarchisées. Les réflexes à acquérir, souligne Emmanuelle, sont donc principalement de l’ordre du comportement.
Cependant, les différences ne s’arrêtent pas là. Le degré d’intégration à la société canadienne est également un facteur très important, que ce soit à travers le bénévolat, des activités sportives ou encore par la communication en ligne à travers LinkedIn et Facebook, régulièrement consultés par les employeurs du cru. Un coaching personnel est même proposé par les organisateurs de ces ateliers pour ceux qui en ressentent le besoin, mais contre rémunération cette fois.
La Boussole ouvre une nouvelle antenne à Surrey
Ces associations ne sont pas les seules à proposer leurs services. Depuis longtemps les institutions de la province se sont dotées d’outils pour aider les francophones à décrocher un emploi. A travers la Boussole et le collège Educacentre, l’offre d’aide à la recherche de travail va au-delà des nouveaux arrivants pour s’étendre aux francophones du pays, qu’ils soient de la province ou non. Pour Tony St-Pierre, gestionnaire des services à l’emploi à la Boussole, ceux qui débarquent en Colombie-Britannique sont moins bien lotis que les immigrants. Ces derniers disposent de nombreux programmes d’aide à l’emploi, des associations, ainsi que des programmes de leurs propres pays ou de communautés spécifiques par les francophones de souche. Ceux-ci jouissent de programmes d’aide gouvernementale, mais ils sont sont depuis peu en anglais, et la barrière de la langue est parfois très handicapante.
C’est pour toucher d’avantage de cette population que la Boussole ouvrira le 9 octobre une nouvelle antenne consacrée, entre autres, à ces services à Surrey. Dans le cadre de la stratégie de l’organisme, le local a été choisi en face de la sortie du skytrain de Surrey Central. Le lieu fut aussi déterminée par l’importante croissance de la population francophone dans la ville. L’une des difficultés auxquelles se heurtent les services francophones provinciaux est la grande dispersion des locuteurs de la langue de Molière. L’ouverture de cette dépendance constitue donc l’une des réponses à cette répartition.
French is an asset !
En détaillant le marché du travail, M St-Pierre insiste sur l’importance de cibler les métiers que l’on recherche pour les faire correspondre aux besoins des entreprises de C.-B. Il est par exemple très difficile pour un comptable fraichement débarqué de trouver du travail tant les comptables sont nombreux ici. A coté de cela, les emplois existent, mais dans de nombreux domaines les francophones font l’erreur récurrente de présenter des CV totalement surdiplômés pour occuper… des postes finalement très simples.
Fort heureusement, il existe de nombreux cas où, selon ses propres mot, « french is an asset ! » (Le français est un atout). Que ce soit dans l’hôtellerie, la restauration, l’éducation ou encore la communication, de nombreuses entreprises préfèreront embaucher des personnes bilingues, ce que les francophones de Colombie-Britannique sont, par la force des choses, dans leur grande majorité. Ce n’est pas sans un certain plaisir que M St-Pierre nous apprend qu’une fois les codes locaux intégrés, les francophones sont très efficaces pour décrocher un emploi, et y faire fructifier les avantages que leur confère finalement leur bilinguisme.