Les aînés à la croisée des chemins

Au lendemain de la journée internationale des personnes âgées [1er octobre], la ville de Vancouver accueille deux grandes conférences sur le thème Vieillir dans un monde en changement et Le vieillissement et la société. A l’image de sa population générale, la Colombie-Britannique est la troisième province après l’Ontario et le Québec abritant le plus grand nombre de personnes âgées.

Des services culturellement appropriés

Gloria Gutman prévoit plus de 700 participants à la conférence Vieillir dans un monde en changement. Photo par Gloria Gutman.

En 2011, l’espérance de vie au Canada était estimée à 81 ans et demi, « L’espérance de vie en Colombie-Britannique est, quant à elle, un peu plus élevée que dans d’autres provinces. » souligne Gloria Gutman directrice du centre de recherche et du département de Gérontologie de l’Université Simon Fraser.

Mais dans une ville aussi multi-ethnique que Vancouver, il a fallu mettre en place des services culturellement appropriés. Les immigrants doivent faire face à différentes maladies, à cause de leurs pays d’origines, de leurs habitudes alimentaires, de vie mais aussi du fait d’un système génétique différent. Ainsi les communautés d’origine indienne ont plus de prédispositions au diabète que les autres. Il en va de même lorsque l’on parle de la prise en charge des personnes âgées qui vivent en Colombie-Britannique. La spécialiste rappelle « Par exemple nous remarquons que dans la communauté punjabi, les familles sont nombreuses, elles vivent aussi beaucoup ensemble. Les aînés sont donc plus entourés et les responsabilités des descendants sont plus importantes envers leurs aînés. »

Pour les canadiens d’origine chinoise, les familles ont moins d’enfants et les aînés donc se retrouvent plus facilement seuls quand ils arrivent à un âge avancé. Ce qui pose alors un problème de prise en charge. Car si la Colombie-Britannique peut se vanter de la qualité de ses services, la prise en charge financière reste encore souvent un facteur problématique. Son système d’allocation s’étale sur trois niveaux. Le premier est gouvernemental : les canadiens de plus de 65 ans, ayant vécu depuis plus de 10 ans sur le territoire, se voient allouer une pension de vieillesse. Le second est lié aux entreprises où le bénéficiaire a travaillé. La plupart des sociétés importantes prévoient un fond de retraite pour allouer cette pension par la suite aux anciens salariés. Enfin le dernier niveau privé est issu des économies et placements effectués par la personne elle-même. « Cependant, il faut savoir que 7% des personnes âgées vivent sous le seuil de pauvreté ici en Colombie-Britannique. Si ce chiffre n’est pas très élevé, il cache une grande disparité. Ainsi plus de la moitié des femmes de plus 65 ans et seules vivent, elles, en dessous de ce seuil ! » rappelle Gloria Gutman. Il y a aussi un net désavantage pour les autochtones qui, de par leurs moyens, ont accès à un niveau de vie moins sain. Il y a beaucoup de pauvreté et les soins sont donc plus limités. Le taux de suicide et d’alcoolisme chez les Premières nations d’âge avancé grimpe en flèche. Des données qui s’opposent avec le reste de la population vieillissante.

« En toute logique, nous notons que les personnes âgées se portent de mieux en mieux, je suis en meilleure santé que ma mère qui était en meilleure santé que la sienne. ». Les aînés prennent plus soin d’eux, ils sont plus connectés à la société, ils utilisent les nouvelles technologies mais se confrontent parfois à un problème de culture et même de langue. Notons que 33% des aînés n’ont pour langue maternelle ni le français, ni l’anglais.

L’industrie d’argent
De nombreuses associations se sont ainsi créées pour répondre aux besoins et conseiller les aînés dans leur langue maternelle. C’est le cas de la Fédération des aînées et aînés francophones du Canada, qui représente d’abord les anciens francophones vivant en milieu minoritaire :

« Nous sommes le porte-parole de 332 465 personnes francophones de 50 ans et plus notamment dans les stratégies de prévention des abus et de la fraude, les activités intergénérationnelles et l’employabilité pour les personnes aînées et retraitées francophones au Canada. » L’une de ses antennes s’est d’ailleurs installée à Victoria, véritable « capitale de la retraite » avec la région de l’Okanagan. Le climat et le style de vie attirent ces nouveaux arrivants qui en retour génèrent de nouveaux services. « Nous l’appelons l’industrie d’argent en rapport avec la couleur des cheveux des anciens. On remarque un flux de migrations de résidents d’Ontario et des provinces à l’Ouest vers l’océan pacifique. » remarque Gloria Gutman. La raison de ce flux est simple : une fois débarrassés de leurs responsabilités, les retraités décident de déménager vers un lieu qui leur rappelle de bons souvenirs, où ils se sentent à l’aise souvent le lieu où ils passaient leurs vacances auparavant.

Il faut cependant faire attention au mouvement opposé, les jeunes retraités déménagent en couple mais lorsque l’un des deux décède, celui qui reste rentre souvent dans sa province d’origine pour se rapprocher de sa famille. C’est une migration inversée que l’on prend moins en compte mais qui est pourtant bien réelle.

Motivée par le net vieillissement de la population, une vaste étude sera d’ailleurs entreprise auprès de 50 000 aînés au Canada et qui durera une vingtaine d’années. Elle sera effectuée par plus de 160 chercheurs. Elle sera la plus vaste étude sur le vieillissement jamais réalisée au Canada pour améliorer la qualité de vie des aînés.

 

Aging and Society
UBC Robson Square
www.agingandsociety.com
5 au 6 novembre

Aging in a changing world
Hyatt Regency
www.cagacg.ca
18 au 20 octobre