Tiens donc, il me semble que le député Marc Garneau, autrefois candidat à la chefferie de son parti, a lu ma dernière chronique au sujet de la vague Justin Trudeau qui s’apprête à déferler sur le Parti libéral du Canada. L’ancien astronaute a en effet décidé de lancer la serviette, si convaincu est-il de l’inévitable destinée de cette course à la chefferie. Je blague, bien sûr. La raison de sa décision est bien plus simple. Marc Garneau a de toute évidence eu l’intelligence de ne pas s’accrocher à un rêve inaccessible.
Il a, selon ses propres dires, reçu un message on ne peut plus clair au terme d’une consultation qu’il a réalisée auprès de milliers de membres et sympathisants libéraux. Sa conclusion a été que l’avance de Justin Trudeau est telle que rien ne peut l’empêcher de devenir chef en avril. Il faut quand même se demander comment ses anciens colistiers justifieront de rester dans la course. Je suspecte qu’il ne sera pas seul à vouloir éviter l’humiliation en se retirant avant le vote.
Mais cette annonce de Marc Garneau a quand même un peu surpris. Après tout, il est celui qui y est allé des attaques les plus tranchantes à l’égard du favori. Contre Justin Trudeau, il a surtout joué la carte de l’expérience et de la maturité, sans oublier qu’il a plus d’une fois suggéré que le député de Papineau faisait plus dans le style que dans la substance. Tout cela est de la vieille histoire; il a tourné la page et Justin Trudeau est dorénavant son homme. Il sera « un loyal soldat » comme il l’a mentionné dans son message annonçant son retrait.
Pour Justin Trudeau cet appui, bien qu’aucunement nécessaire à sa quête pour la chefferie de son parti, lui amène un homme d’une grande capacité intellectuelle qui n’a pas eu peur de proposer des politiques publiques durant sa campagne. Une fois la campagne terminée et Justin Trudeau aux commandes du Parti libéral, Marc Garneau devrait jouer un rôle important dans son équipe libérale, ce qui saura profiter au nouveau chef.
Le vote final n’apparaît maintenant plus que comme une forma-lité. Mais une fois installé dans le bureau du chef du parti, la dure réalité attendra le nouveau chef. Pour Justin Trudeau la course au leadership aura peut-être été, en quelque sorte, l’étape la plus facile. Avec le rôle de chef viennent d’importantes responsabilités. Entre autres, il devra unir son caucus, voir à l’articulation d’un plan à proposer à la population canadienne, parcourir le pays pour aider la formation à récolter les fonds dont elle a bien besoin et, bien sûr, subir les attaques de ses adversaires. Celles-ci ne devraient pas tarder à faire leur apparition.
Il sera intéressant de voir comment il tirera son épingle du jeu lors de ses face à face avec le premier ministre Harper à la Chambre des communes. Ce dernier a plusieurs années d’expérience parlementaire et semble rarement déstabilisé au terme de la rituelle période des questions. Pour ma part, j’ai bien hâte de voir la dynamique entre les deux.
Devant toutes ces responsabilités, il faut quand même avoir une pensée positive pour Justin Trudeau. Il sera amené à s’absenter plus souvent qu’avant de sa famille. Avec de jeunes enfants, cela ne peut être facile. Mais, c’est la nature de la bête comme le veut l’expression. Sa formation doit être renouvelée et il en sera le premier architecte. Pour ce faire, il devra aller à la rencontre de ses membres et des autres Canadiens sans relâchement.
On saura dans un peu plus de deux ans, lors du prochain scrutin général, si l’effort aura été suffisant. Mais avant tout, il faut qu’il gagne la course au leadership. De toute évidence une simple formalité.