Tenter l’aventure en franchissant les barrières européennes nous tenait à cœur depuis longtemps. Restait à trouver la destination. Après un rapide engouement pour la Chine et quelques clics sur internet, mon mari a pris le train pour le salon Destination Canada qui se tient chaque année à Paris. Des rencontres, des discours, et des envies de développement et d’épanouissement professionnels, c’est décidé, nous nous envolerons Outre-atlantique avec un permis vacances-travail (PVT).
Professeur des écoles depuis quelques années en France, enchaînant les postes de remplaçante fractionnés sur plusieurs écoles, j’ai entrepris au plus tôt les démarches d’équivalence de diplômes, ce qui ne fût pas une mince affaire!
Début septembre sonna alors. Le CSF me proposa un poste de remplaçante alors que je décidai parallèlement de postuler à un poste en immersion. Je fis ma rentrée en 2ème année, pour continuer avec des maternelles au mois de décembre.
J’ai tout d’abord été impressionnée par la cohésion de l’équipe et le soutien de la direction. Ainsi, dès mon arrivée, on m’a aiguillé vers des personnes ressources et permis d’aller en observation dans une classe.
La cohésion au sein de l’école est à son apogée lors des assemblées qui rassemblent l’ensemble des élèves et du personnel dans le gymnase autour de la célébration d’un évènement tels que la Saint-Valentin ou le Jour de la Terre.
J’ai été surprise de l’intensité avec laquelle toute la communauté scolaire s’investit et célèbre ces jours particuliers en chantant, dansant, en partageant un texte, un discours, un poème. Une belle découverte, malgré mon énorme gêne lors de ma première assemblée. Lorsque tout le monde s’est mis à chanter l’hymne national, j’ai été incapable d’articuler la moindre parole. C’était pour moi une découverte !
Ces assemblées me rappellent l’atmosphère enjouée lors des fêtes de Noël ou de fin d’année en France. Cependant, c’est dommage qu’ici, le Père Noël ne rende pas visite aux enfants à l’école.
Bien loin de mes souvenirs de directeur d’école débordé, devant à la fois assurer sa classe et les relations parents, mairie, inspection…, l’école fonctionne comme une grosse entreprise avec le directeur à sa tête, son aide-directeur à ses côtés et des secrétaires qui gèrent à la fois les petits bobos et informations en tout genre.
Je regrette cependant qu’il n’y ait pas de conseils d’école. En France, ils se tiennent tous les trimestres et permettent de rassembler parents, enseignants, mairie…afin de faire le point sur des projets et résoudre parfois certains dysfonctionnements.
Je ne connais pas la course contre la montre qui me crie « on ne va jamais finir le programme ! », un refrain que l’on entend de la maternelle jusqu’à l’Université en France. Ici, on prend le temps. Grâce à mon immersion dans le système éducatif, je me suis aussi aperçue que l’enseignement « d’attitudes à adopter en cas de… » et la place pour la méditation sont sans doute à l’origine des tempéraments calmes et respectueux des canadiens. Il y a cependant quelques semaines tellement chargées que j’ai du mal à trouver une place pour les enseignements plus institutionnels.
Depuis le mois de décembre, j’enseigne en maternelle en immersion. Après 4 mois avec 22 élèves de 5 ans, je me rends compte que ceux-ci ont un meilleur niveau en français que mon niveau d’anglais en arrivant ici. Je les envie de déjà maîtriser à cet âge-là, la compréhension d’une langue étrangère. Dans les classes d’immersion, certains ne parlent ni le français, ni l’anglais à la maison. Ces derniers démarreront leur entrée sur leur marché du travail, certes dans quelques années encore, mais avec une bonne longueur d’avance ! Si seulement j’avais pu bénéficier d’un tel programme, je n’aurais pas tant redouté les entretiens avec les parents durant les premiers mois, ni même les échanges avec les locaux lors de mes précédents voyages. Mon complexe de l’accent et ma peur de l’erreur tranchent avec le « franglais » assuré de mes élèves. On les encourage à parler français au maximum mais si les mots ne viennent pas, ils y ajoutent une touche de leur langue maternelle. Le mélange est rassurant et l’échange entre les communicants maintenu. Ainsi, les progrès sont rapides et permanents. J’ai appris et me lance d’avantage. Je me hasarde quelques fois à des traductions anglaises, ce qui fait beaucoup rire mes élèves !
Je ne m’attendais pas à une si grande différence entre deux systèmes éducatifs de pays développés occidentaux mais mon expérience professionnelle à Vancouver me permet d’apprendre, de me former, de critiquer, de réinvestir, de modifier mon enseignement jour après jour. Mon engouement est tel pour l’immersion, que je m’intéresse de plus en plus à l’enseignement du français comme langue étrangère, spécialement pour les plus jeunes. J’envoie aussi régulièrement des nouvelles à des collègues-amies restées en France pour leur faire partager les dernières méthodes en vogue que je découvre. A mon retour au pays, je continuerai de mettre en pratique mes connaissances acquises ici et prendrai le meilleur de chaque pays pour parfaire mon enseignement.