Le 14 mai prochain les Britanno-colombiens seront appelés aux urnes pour prendre part à la quarantième élection générale de la province. À quelques jours du scrutin qui désignera le ou la prochain(e) premier(mière) ministre de la province, La Source est allée prendre la température au sein de la communauté francophone. Quelles peuvent-être les attentes d’un tel rendez-vous lorsque l’on est en situation minoritaire ?
À première vue, les électeurs francophones partageraient le même sentiment et la même attitude que l’ensemble de la population en âge de voter : une relative apathie et une implication faible dans la chose publique. Autrement dit les élections provinciales ne passionnent pas les foules et les francophones ne font pas exception.
C’est d’ailleurs pour ça que la Fédération des francophones de la Colombie-Britannique (FFCB) a pris l’initiative de rédiger un document éducatif distribué dans la communauté afin d’inciter ses membres à faire entendre leur voix.
«Le vote est quelque chose de personnel mais nous voulons aussi que les francophones posent des questions aux politiques, qu’ils soient plus impliqués,» explique Christian Deron, coordinateur des relations gouvernementales auprès de la FFCB, à l’origine de l’initiative.
Selon lui, si la communauté francophone ne pèse pas dans la politique, elle a tout de même des attentes voire des doléances. La question de la place donnée à la langue française arrive en tête des préoccupations. Or aucun des quatre candidats n’en fait mention dans son programme et évite d’ailleurs d’évoquer le sujet.
Or selon Christian Deron, « les attentes des francophones s’articulent autour de trois choses : la préservation des acquis linguistiques, la création d’un espace francophone et le maintien des services en français. »
Des revendications difficiles à faire valoir alors que la Colombie-Britannique est l’une des deux seules provinces à ne reconnaître aucune langue officielle (pas même l’anglais) et où la politique des services en français est directement financée par des enveloppes fédérales.
La question de l’importance donnée au français résonne aussi chez les acteurs économiques de la communauté. Les entrepreneurs espèrent évidemment davantage d’ouverture à l’innovation et sur les marchés mais surtout, ils souhaitent avoir accès à une information en français, note Donald Cyr, le directeur général de la Société de développement économique de Colombie-Britannique (SDECB).
«La majorité de nos partenaires viennent de la France avant même de venir du Québec et ces investisseurs éprouvent souvent des difficultés de communication avec leurs homologues britanno-colombiens car ils n’ont pas accès à une information de qualité en français.»
Alors que les écoles d’immersion française refusent chaque année de plus en plus d’inscriptions, victimes de leurs succès, le domaine de l’éducation en français est toujours un sujet qui passionne la communauté. Aujourd’hui, la Colombie-Britannique totalise 5000 élèves qui suivent leur scolarité dans les écoles d’immersion.
Et le chiffre ne cesse d’augmenter, rehaussé par la présence de nouveaux arrivants qui font le choix du français quand il s’agit d’inscrire leur enfant à l’école. «Pour autant la place de la langue française n’est prise en compte par aucun candidat, personne ne se mouille quand il s’agit d’évoquer cette réalité», observe Yvon Laberge, directeur général du Collège Educacentre, seule institution d’enseignement francophone pour adultes dans la province.
«D’un autre côté, il y a également une partie de la population francophone à qui ça ne pose pas de problème de vivre en anglais et ceux là n’ont pas de revendications concernant la langue ou la francophonie en général», ajoute-il.
À Victoria, Christian Francey estime pour sa part que la question de l’emploi est un des principaux sujets de préoccupation de la communauté francophone.
«Des endroits comme Campbell River ont beaucoup souffert à cause de la fermeture des usines à papier,» rappelle le directeur général de la Société francophone de Victoria. Depuis, un chantier a été lancé par BC Hydro pour rebâtir le barrage et la construction d‘un nouvel hôpital est en projet.
Au final, si l’on en croit les responsables de la communauté francophone, les quatre partis politiques qui vont se disputer la tête de l’échiquier politique de la province seraient finalement beaucoup moins réceptifs au fait français que la population elle-même qui l’a accepté depuis longtemps.